Economie tunisie

Samir NCIR, directeur général de l’Hasdrubal Thalassa à YASMINE-Hammamet, à La Presse : «La culture est une valeur ajoutée pour le tourisme»

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Samir Ncir est aux commandes de l’un des fleurons de l’hôtellerie de luxe en Tunisie, l’Hasdrubal Thalassa à Yasmine Hammamet. Il s’escrime, contre vents et marées, à maintenir à flot un hôtel haut de gamme par ces temps maussades où tout tend à la banalisation des services, à la dégradation du produit et à l’opportunisme facile. Dans cet hôtel-musée, le credo culturel est dans l’ADN des propriétaires et circule dans les veines des employés. Il nous parle dans cet entretien de sa botte secrète en tant que manager et évoque ses soucis de développement du secteur touristique dans le pays. Ecoutons-le.

Comment s’est passé l’épisode Covid pour l’hôtellerie de luxe ?

Pour les deux saisons 2021/2022, le tourisme de luxe ou haut de gamme, contrairement à celui de masse, a pu tirer son épingle du jeu malgré toutes les difficultés. Il est vrai que toutes les unités hôtelières ont été affectées par la fermeture des frontières, le confinement et la restriction des voyages. Cependant, pour le segment haut de gamme habitué à tourner avec des taux d’occupation timides qui oscillent entre 30 et 60% dans l’année, pour les bonnes saisons on tourne à 40%. De ce fait, la résilience était possible aux prix élevés pratiqués comme toujours et qui compensent le manque à gagner sur le Rev part. Ces prix jugés élevés permettaient de maintenir un niveau de qualité supérieur du produit ; mais quand on compare les prix pratiqués par d’autres hôtels de même catégorie dans d’autres pays, nos prix ne représentent pas une barrière pour des clients qui cherchent des hôtels haut de gamme à des prix abordables pour un pouvoir d’achat beaucoup plus élevé que celui dans notre pays. Etant donné que payer 150 à 200 euros par nuit pour une suite de 70 mètres carrés avec des prestations de qualité n’est pas cher payé, surtout pour les touristes des pays du Golfe. Un hôtel comme l’Hsdrubal à Dubaï ou à Monaco, y a pas photo au niveau des prix. Mais pour revenir aux effets de la pandémie sur le secteur, on est parmi les rares hôtels à avoir résisté. On n’a pas fermé nos unités, on a essayé d’optimiser au mieux nos équilibres budgétaires et on a gardé nos employés qui représentent notre capital humain et ce grâce à la vision de Mohamed Laâmouri et à Raouf Laâmouri qui ont tenu à ne pas sacrifier le personnel. En 2022, on a commencé à revenir peu à peu au rythme de fonctionnement, habituel, après deux années difficiles. C’était la reprise en 2022 et pour 2023 les prévisions sont bonnes à part le mois du Ramadan qui est toujours caractérisé par une petite baisse de l’activité mais à partir du mois de mai.

Vous misez sur la culture comme un argument de vente ou pour augmenter le prestige de la chaîne ?

Pour nous, la culture est une valeur ajoutée. Car quand il y a un  mariage entre la culture et le tourisme, c’est un plus pour la destination et une offre distinguée pour les clients. D’ailleurs les professionnels se demandent  toujours pourquoi n’avons-nous pas un seul département ministériel qui allie tourisme, patrimoine et culture. En effet, quand ces trois volets se rencontrent, il y a une nouvelle synergie qui se crée et de nouveaux produits qui prennent forme et attirent une nouvelle clientèle à la recherche d’expériences mémorables et marquantes.

Est-ce que l’hôtel attire des stars et des vedettes internationales ?

Ce n’est pas une coïncidence si notre chaîne pendant le Sommet de la Francophonie a compté treize chefs d’Etat et cinq Premiers ministres, en plus des chefs de délégation. L’Hasdrubal est l’un fleurons du tourisme tunisien qui a toujours attiré des stars, des vedettes du cinéma et de la chanson.

D’ailleurs, nous accueillons depuis le mois de mai 2022 les vedettes et les guest star d’une grande production qui sera diffusée au mois de Ramadan sur les chaînes arabes, à savoir le feuilleton «Mouaya Ibn Abi Sofiène», des Egyptiens des Syriens et des vedettes des pays du Golfe comme Ahmed Badir, Aymen Zayden ou Wael charaf ont séjourné pendant le tournage du feuilleton à l’Hasdrubal. C’est une bonne chose pour l’hôtel et pour la destination. D’ailleurs, Assem Turki, producteur et le réalisateur, a opté pour notre hôtel après un grand repérage car l’établissement offre un cadre culturel propice aux attentes de ces grandes vedettes.

Cela dit, on a compté parmi les stars Isabelle Adjani, Maria Carey, Antonio Banderas, etc. C’est une fierté pour nous et pour le pays d’ailleurs. Ils ont été formidablement surpris par la collection d’arts plastiques dont dispose l’hôtel et par le raffinement qu’elle leur procure. C’est grace à la vision de notre fondateur Mohamed-Laâmouri et de son fils Raouf Laâmouri qu’a été lancée la Fondation Mohamed Laâmouri pour la culture et les arts qui organise depuis des années des symposiums, des concerts et des colloques avec un directeur artistique, M. Ridha Laâmouri, un directeur musical, M. Laurent Jost, et un partenariat avec l’Institut français de Tunis et la collaboration du Conservatoire de musique et de danse  Paris. Nous organisons aussi dans ce cadre des résidences artistiques et éditons des livres d’auteurs tunisiens et étrangers.

La loi de finances 2023 a suscité une grande polémique et a provoqué l’indignation des professionnels du tourisme. Qu’en pensez-vous ?

Il est clair que cette loi n’est pas favorable à un secteur sinistré et ravagé par une décennie d’instabilité politique, d’attentats terroristes et de deux saisons fortement impactées par la pandémie. Il y a trop de charges fiscales, une envolée des prix et un taux d’intérêt qui grimpe et qui ne prend pas en considération le taux d’endettement élevés  que connaît le secteur. Je pense qu’il porte du tort à un secteur qui est au carrefour de toutes les augmentations, de la vevée progressive de la compensation et des charges fiscales encore plus lourdes. Nous savons que la question de la rentabilité des hôtels dépend des politiques fiscales qui impactent négativement un secteur aux épaules frêles, surtout que les professionnels n’ont pas été associés aux choix fixés par cette loi qui fera fuir les investisseurs étrangers et fragilisera davantage les investisseurs locaux.

Est-ce pour cela que vous avez revendiqué la création d’un Conseil supérieur du tourisme ?

Absolument. Je pense que le Chef de l’Etat est la première personne concernée par le développement du tourisme. En Turquie, Erdogan, qui a compris l’importance du tourisme, a développé l’infrastructure, la flotte aérienne, l’embellissement des villes, etc. Seul le Président peut donner une impulsion au secteur, assurer la stabilité au niveau du pays et mobiliser les investisseurs et les professionnels autour d’un programme d’action à court, moyen et long terme pour en faire une locomotive de développement.  Regardez ce qui se passe en Arabie Saoudite, il y une volonté politique claire pour parachever la vision 2030 qui tend à faire du tourisme une activité à forte valeur ajoutée.

Il est navrant de constater que les professionnels du tourisme en Tunisie sont exclus de la décision politique. A mon avis, il faut impliquer les professionnels et mêmes nos experts à l’étranger pour baliser la voie à un renouveau du secteur et pour une embellie de ses ratios. A cet effet, je pense qu’ un tourisme très raffiné qui attire cinq millions de touristes rentables et haut de gamme est meilleur qu’un tourisme de masse qui génère quelque dix millions de touristes avec un pouvoir d’achat très modeste.

Pensez-vous que la station touristique de Hammamet Sud comporte des défaillances structurelles ?

Bien sûr. Beaucoup de défaillances sont à relever. Plusieurs hôtels ont échoué et sont fermés, portant un grand préjudice à cette station. C’est  un cimetière hôtelier. Rien qu’à l’entrée de la station, l’hôtel Neptune, qui tombe en ruine et est fermé depuis des années, illustre avec éloquence l’état de désolation de la zone. L’absence d’éclairage, les routes mal entretenues et l’anarchie tous azimuts enlèvent à la station son charme et font fuir les visiteurs. Depuis sa création en 1990, il n’y a pas eu d’entretien. Peut-on la comparer avec Charm Echeikh ? Les bars de plage ne présentent aucune harmonie, il faut une charte pour ces constructions anarchiques. Comment est-ce qu’ils obtiennent les autorisations ? On met cela sur le compte du social alors qu’il il faut que cela soit encadré par les lois pour rebomber le torse à une station qui dispose pourtant de beaucoup d’atouts.

Avez-vous ressenti un problème d’approvisionnement avec la pénurie des aliments de base ?

Il y a des difficultés d’approvisionnement pour le lait, le sucre et l’huile comme partout dans le pays.  On essaye de stocker fruits, légumes et autres aliments pour satisfaire une demande haut de gamme.  Nous sommes cependant confrontés à des problèmes qui nuisent à la qualité de service des hôtels de luxe. Le recours aux bouteilles d’eau en plastique pour pallier l’absence des bouteilles d’eau en verre compromet nos standards de qualité. Le plastique n’est pas conforme aux normes de prestige de nos hôtels et on grince des dents  à chaque fois qu’on apprend que le stress hydrique que connaît le pays pourrait prolonger la perturbation des circuits de distribution par exemple.

Etes vous optimiste pour 2023 ?

Ce pays dispose de tous les atouts de la réussite. Malgré le peu de moyens, on a réussi  dans les années soixante à faire de la Tunisie une destination très sollicitée à partir de rien. Tout ce dont on a besoin, c’est une volonté politique, une adhésion du peuple et une plus grande implication des professionnels pour faire de ce beau pays une destination de rêve. Le reste suivra.

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