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Violence dans les stades : Carton rouge pour les supporters fanatiques et agressifs !

 

La lutte contre la violence est fondamentalement une œuvre collective dans laquelle doivent s’impliquer tous les intervenants concernés, et pas seulement le ministère de tutelle, qui n’a pas lésiné sur les moyens pour lutter contre la violence dans les stades et le sport en général.

Après une courte éclipse qui s’est avérée comme un cessez-le-feu fragile et précaire, revoilà le hooliganisme de retour dans les arènes sportives. Un «come back» qui lui a permis de frapper fort lors du traditionnel derby qui a opposé, dimanche dernier, à Radès, le Club Africain à l’Espérance Sportive de Tunis. Les images de ce match que nous avons suivi à la télé et qui ont été ensuite abondamment relayées par les réseaux sociaux font mal au cœur. Jets de fumigènes et de projectiles (bouteilles en plastique, pierres…), slogans haineux et obscènes, entraîneur bousculé, arrêt de la rencontre à deux reprises à cause des gaz lacrymogènes, de nombreux supporters poussés vers les portes de sortie, arrestations opérées par la police… Le tout devant les caméras de chaînes TV tant locales qu’étrangères. La déception était immense et le ras-le-bol sur toutes les lèvres. « J’ai mis environ trois heures pour rentrer à la maison», tempête un supporter « espérantiste », encore sous le choc, après les dégâts occasionnés à sa voiture. Et de jurer, «non, je ne remettrai plus les pieds dans un stade.» En face, un fan clubiste est fou furieux. « Même si, se défend-il, je suis un fidèle supporter du CA, je ne pardonnerai pas à notre public ces actes lâches qui n’honorent pas notre club centenaire qui a toujours été une école de civisme et de dignité ». Même le coach portugais des «Sang et Or», Cardoso, d’ordinaire zen et avare en déclarations, est monté au créneau en exprimant, dans la conférence d’après-match, sa désolation et son dépit. « Certes, a-t-il dit, mon équipe a gagné et mes poulains ont fait un sacré boulot. Mais, croyez-moi, je suis profondément triste après tout ce que j’ai vu aujourd’hui », appelant à « l’impératif d’identifier les formules susceptibles de mettre fin au déferlement du hooliganisme et de ne pas attendre qu’on déplore un mort pour le faire ».

Ailleurs, c’est bien pire !

Bien évidemment, pas question de banaliser ce fléau universel, d’autant que le malheureux épisode de ce dimanche-là a été précédé, au cours de la présente saison, de plusieurs incidents presque identiques, enregistrés non seulement dans des stades, mais aussi dans des salles de compétition. Historiquement, il faut rappeler qu’on a recensé, particulièrement sous le régime de Ben Ali, des morts parmi les supporters lors du fameux match Béja-Espérance, ainsi que dans les championnats des divisions inférieures. N’oublions pas non plus l’année 2022 qui a vu le décès tragique et troublant, aux alentours du stade de Radès, du jeune tifosi clubiste Omar Laabidi.

Il n’en demeure pas moins vrai qu’on peut toucher du bois, rien qu’en se remémorant les terribles tragédies sportives survenues loin de nos frontières. Citons-en les plus dramatiques. Le 29 mai 1985, pas moins de 39 personnes ont péri dans les incidents qui ont émaillé, au stade Heysel de Bruxelles, la finale de la Coupe d’Europe des clubs champions Juventus-Liverpool. Le 2 mai 1992, c’était « le drame de Furiano», du nom du stade français où la fin houleuse du match a fait 18 morts et 2.357 blessés. Un bilan considéré jusque-là par les médias de l’Hexagone comme «la plus grande catastrophe de l’histoire du football français.» Et puis, le 29 mai 2022, quelque 135 blessés, dont 86 jugés en état très grave, ont été recensés à la fin du match Liverpool-PSG. Cela sans oublier le macabre décompte de pertes en vies humaines causées par les fréquents incidents enregistrés dans d’autres arènes sportives occidentales et surtout sud-américaines.

Les ultras sont passés par là 

On sait que le foot, connu pour être le sport le plus populaire du monde, est devenu un véritable phénomène social qui s’est installé particulièrement dans les quartiers populaires. Là où la marginalisation et le chômage aidant, on ne compte plus désormais le nombre sans cesse croissant de groupes de supporters dits «ultras». Cela va des Dodgers aux Leaders, en passant par les Vandals, Winners, Zapatista, Blutz..

Inspirés du tristement célèbre hooliganisme occidental avec ses foudroyantes artilleries telles que Ultras No face No name, Casual ultras, Ultras stickers, Ultras passion et autres Ultras mentality, les nôtres rivalisent d’imagination, mais aussi de brutalité.

Auteurs de sensationnels dits «dakhlas» mis en scène via drapeaux et bannières géants pleins de slogans et photos, généralement aussi provocateurs que les autres, à l’adresse du public adverse, ils pointent toujours les premiers au stade, affublés d’un look bizarre et, pour certains, dans un état second. «Sachez que ces jeunes âgés de 18 à 26 ans ont fait des arènes sportives leur source de défoulement privilégiée», assure le sociologue Samir Berrabeh qui explique qu’ «il nous a été donné de vérifier que la plupart d’entre eux débarquent au stade ou dans une salle de compétition soit en état d’ébriété, soit drogués, quand ce ne sont pas les deux à la fois. C’est pourquoi ils commettent inconsciemment leurs forfaits.» Sont-ils incontrôlables à ce point ? Il faudrait, propose notre interlocuteur, que les responsables des clubs lancent régulièrement des actions de sensibilisation tous azimuts à l’intention de cette communauté, en exhortant les autorités compétentes à prendre des mesures de durcissement des opérations d’accès aux enceintes sportives. « Des suggestions que nous qualifions de défendables, quand on sait que dans plusieurs pays civilisés, on lutte contre le hooliganisme par une stratégie radicale. En ce sens qu’un agent de l’ordre affecté dans un stade bénéficie, en cas de débordement de la foule, d’une carte blanche pour matraquer, tirer du LPD et balancer du gaz lacrymogène et des grenades de désencerclement ».

Des messages de paix et d’amour en harmonie avec les fondements essentiels du sport

A contrario, il y a deux semaines, le public de l’Esperance a admirablement donné le bon exemple, en sortant, à l’occasion de la dernière finale africaine face aux Pharaons d’Al Ahly, une superbe «dakhla» qui a fait, mine de rien, un tabac sur la Toile, avant de faire le tour du monde des médias. Pourquoi ? Tout simplement parce que sur les dizaines de drapeaux et banderoles brandis ce jour-là, étaient inscrits, richement colorés, des messages de paix et d’amour, soit en harmonie avec les fondements essentiels du sport, en tant que vecteur de joie, de rassemblement et de solidarité. « Cet exploit réalisé par nos supporters n’aurait jamais pu se produire sans l’encadrement du président du Club », affirme le président de section, Kais Attia.

Verrons-nous, un jour, dans nos stades un remake de ce genre ? « On l’espère vivement », réagit Moncef Cherif, directeur général du sport au ministère de la Jeunesse et des Sports, qui estime que « la lutte contre la violence est fondamentalement une œuvre collective à laquelle doivent s’impliquer tous les intervenants concernés, et pas seulement notre ministère qui n’a pas lésiné sur les moyens pour lutter contre ce fléau ». Les propos de M. Cherif sont d’autant plus palpables que l’Etat, tout au long de ces deux dernières années, et en dépit d’une conjoncture difficile, n’a ménagé aucun effort pour promouvoir le secteur du sport. En attestent, à titre d’exemple, l’augmentation des subventions allouées aux fédérations et aux équipes nationales, le soutien à l’organisation de manifestations internationales, le renforcement du volet relatif à la formation, l’intensification de la lutte contre les manœuvres occultes et la consolidation de l’infrastructure sportive (construction de nouvelles salles omnisports, rénovation de sites en piteux état, reconstruction du stade olympique d’El Menzah et de la piscine du Belvédère, restauration du stade Zouiten…).

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