Souvenirs d’escapade à la Galite — Notre île mystérieuse (III ET FIN): L’île des tentations
C’est une île qui viole les lois du temps, tant son histoire a été discontinue. Pourtant, elle a eu par intermittence des épisodes épiques. Posée par une main divine sur les eaux salées, la Galite demeure éternelle mais toujours changeante à travers les yeux qui se posent sur elle.
Aujourd’hui, toute vie a reflué d’elle. Aussi déserte que son cimetière marin, la Galite n’éveille à peu près aucun écho dans notre quotidien. Elle redevient une portion de terre à explorer et s’offre gracieusement pour consoler ceux qui ne résistent pas à la tentation du large.
Malgré l’occupation française, les Galitois ont conservé de leurs origines difficiles quelques traits marquants : les violences verbales et physiques étaient fréquentes dans l’île. Les délits de pacage, nombreux, s’expliquent pour l’absence d’un cadastre. Les querelles familiales prenaient rapidement de l’importance dans une société où toutes les familles étaient alliées et où l’insularité exacerbe les tensions.
D’ailleurs, deux tentatives de grande colonisation de type capitaliste ont été vouées à l’échec, à cause du caractère farouche et même sauvage des habitants de l’île.
La première a eu lieu en 1883-1884 pour y faire de l’élevage et la deuxième en 1894 pour l’exploitation des richesses minières de l’île.
L’île se vide d’un seul coup
Au début du XXe siècle, la Galite connut une certaine «prospérité» avec la mise en valeur de quelque 60 hectares de terres cultivables ainsi que par l’exploitation des richesses halieutiques environnantes, en particulier les langoustes.
Naturalisés citoyens français pour la majorité écrasante d’entre eux, les Galitois bénéficièrent d’une amélioration sensible de leur niveau de vie et de la qualité de leur relation avec le continent.
Après l’indépendance du pays en 1956, le décret de 1964 de nationalisation des terres tenues par des étrangers et par des colons vida d’un seul coup l’archipel. La population, estimée à 200 personnes dans les années 60, s’en est trouvée réduite à zéro aujourd’hui si l’on excepte les quelques militaires et les gardes-côtes qui veillent sur l’archipel.
Ces militaires se sont aujourd’hui attelés à réhabiliter les anciennes maisons en ruine du village et à réaménager les routes et les quelques infrastructures de base dans l’île. Le projet en cours, dont l’objectif essentiel est de redonner vie à l’île, porte aussi sur la restauration des constructions à caractère historique ainsi que sur la mise en valeur des vestiges archéologiques datant de l’époque punique tels que les nécropoles et l’habitat troglodyte. Au plan de l’environnement, la Galite, qui est d’une importance majeure en termes de biodiversité, souffre de la dégradation progressive de son écosystème.
Tirer l’île de son sommeil
A cet effet, les efforts conjugués du ministère de l’Environnement et du Développement durable et ceux du ministère de la Défense tendent, dans le cadre d’un projet cofinancé par le Fonds français de l’environnement mondial, à créer une aire protégée marine et côtière à la Galite. Dans ce cadre, un volet du projet portera sur des actions de reboissement et d’approvisionnement en eau, pour faciliter les activités agricoles terrestres. Ce projet, que tous les intervenants voient d’un bon œil, vise à assurer, pour le biais de quelques aménagements fonctionnels, l’amélioration des conditions de vie pour les pêcheurs durant leur séjour sur l’île, par la construction d’un gîte de pêcheurs, la mise en place d’une centrale de production de glace et la mise à disposition d’un atelier magasin.
Enfin, ce serait un péché mortel de ne pas évoquer l’écotourisme comme étant l’activité la plus adéquate envisagée pour valoriser durablement un patrimoine naturel, historique et culturel, mais à l’échelle «réduite», qui respecte le milieu naturel. Voilà ce qui permettrait à la Galite de renaître de ses cendres sous de bons auspices.
En attendant, dans sa léthargie actuelle, elle reste enveloppée du même mystère qui entoure les autres îles et îlots de la Tunisie : l’îlot Kneiss au sud de Mahrès, les îles Kuriat au large de Monastir, l’îlot de Chikli qui domine le lac de Tunis, l’île Plane qui fait face à Ghar El-Melh, l’île Pilau ou l’île Cani à la latitude de Cap Zebib.
Toutes des îles au «trésor» qui nous enivrent de leur beauté et dont la découverte ne sera ni moins passionnante ni moins fertile en surprises que celle de la Galite, l’île de toutes les tentations.
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