Culture

Jack Lang, président de l’Institut du Monde Arabe, à La Presse : «En 2023, l’IMA présentera une saison sous le nom de « Vive la Palestine !»

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Entretien conduit par Adel YAHYAOUI

Jack Lang est l’homme d’Etat français le plus connu, surtout sur la scène culturelle et politique. Il est le fondateur principal des fêtes de la musique, connues dans le monde entier. En outre, M. Lang a occupé plusieurs postes dans sa carrière : il était ministre de la Culture de 1981 jusqu’à 1986 à l’époque du président François Mitterrand et il a été aussi le député de Loir-et-Cher de 1986 à 1988, etc. Actuellement, cette personnalité politique est à la tête de l’Institut du monde arabe, ayant été nommé en 2013 par le président de la République française, François Hollande. Depuis, Jack Lang essaie d’enrichir les services de l’IMA en matière de culture arabophone dans le monde occidental en usant d’une stratégie bien définie. Lang se dévoile à La Presse dans une interview enrichissante en abordant des thématiques culturelles entre la Tunisie et la France.

Comment définiriez-vous l’IMA ? Quels sont, de nos jours, son importance et son rôle majeur?

L’IMA est une institution sans équivalent dans le monde. C’est un véritable pont entre l’Occident et le monde arabe. Valéry Giscard d’Estaing avait été le premier à envisager la création d’une institution de ce genre, dans le but d’apaiser les tensions du lendemain de la première crise pétrolière et de créer des collaborations fécondes entre les deux rives de la Méditerranée. François Mitterrand avait repris cette belle idée et on lui doit le magnifique bâtiment, conçu par Jean Nouvel, qui abrite aujourd’hui l’IMA. L’existence de l’IMA est à mon sens plus que jamais nécessaire dans le contexte actuel où les crispations identitaires exacerbent une certaine polarisation Orient-Occident. Plus qu’un pont diplomatique, l’IMA est avant tout un pont culturel, un musée doublé d’une programmation riche qui contribue à la connaissance du monde arabe en France et en Europe.

Dans quel but cherchez-vous à diffuser la culture arabophone en Europe généralement et en France particulièrement ?

La mission première de l’IMA est justement de faire connaître et rayonner les cultures arabes en France et en Europe, et ce faisant, déconstruire les préjugés qui entachent l’image du monde arabe en France et plus largement en Europe. Il s’agit de promouvoir la connaissance de l’autre et de mettre en avant une culture qui reste malheureusement encore trop méconnue en Occident. Il s’agit également de donner à voir des cultures et des patrimoines immensément riches et passionnants, dont la connaissance est indispensable pour la bonne compréhension de l’histoire française et européenne.

Aucune autre institution dans le monde ne propose un éventail de manifestations aussi élargi en lien avec le monde arabe. Débats, colloques, séminaires, conférences, spectacles de danse, concerts, films, ouvrages, rencontres, cours de langue, de civilisation, grandes expositions permettent tous les jours au public de l’IMA de se confronter à ce monde singulier et bouillonnant.

Avez-vous des connaissances pratiques relatives au domaine du théâtre en Tunisie ?

Le théâtre a toujours été prolifique en Tunisie depuis l’Indépendance. Beaucoup de créations théâtrales voient le jour chaque année, produites par des jeunes et des moins jeunes et attirent de nombreux spectateurs. Elles sont également invitées à se produire à l’étranger, dans le monde arabe, en Afrique et en Europe. Il y a également un festival annuel des Journées théâtrales de Carthage qui présente des créations africaines et arabes, tout en mettant en exergue la production tunisienne. Sur les autres questions, je ne peux évidemment pas me prononcer puisqu’elles relèvent de la programmation de l’IMA et des relations qu’il entretient avec les instances tunisiennes.

Existe-t-il des projets à venir, organisés en partenariat entre vous et le ministère tunisien de la Culture dans le domaine artistique globalement et dans le théâtre en particulier?

La France, à travers son réseau culturel en Tunisie (Service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France, Instituts français à Tunis, Sfax et Sousse), œuvre à offrir un espace de dialogue et de découverte entre les cultures tunisienne et française, et à développer la coopération éducative et linguistique, universitaire, scientifique, culturelle et audiovisuelle entre les deux pays. Cette volonté se traduit par une riche programmation culturelle tout au long de l’année, des partenariats forts avec les opérateurs culturels tunisiens (musées, galeries, institutions, associations ou collectifs d’artistes) ou encore des programmes d’échanges et de soutien pour les créateurs et professionnels de la culture. A l’IMA, nous mettons régulièrement en lumière la riche création artistique tunisienne. Nous avions présenté, à l’occasion du premier anniversaire de la Révolution du Jasmin, l’exposition Dégagements… la Tunisie un an après, ou encore la 2e Biennale des photographes du monde arabe contemporain en 2017, qui mettait un accent particulier sur les artistes tunisiens. Plus récemment en 2022, l’exposition Slimen El Kamel, à cœur ouvert, a consacré à cet artiste tunisien sa première exposition muséale en retraçant ses différentes périodes artistiques depuis 2010 et en présentant sa nouvelle série sur le thème de l’amour dans la société orientale.

Que pensez-vous du 18e Sommet de la Francophonie, qui s’est déroulé à Djerba-Tunisie les 19 et 20 novembre 2022 ?

Tout d’abord je me réjouis du succès de cet évènement. Je me réjouis surtout que ce sommet se soit tenu en Tunisie, un pays ouvert sur le monde, et qui reste un espace propice aux échanges et à l’enrichissement mutuel. Je salue d’ailleurs la très riche programmation proposée en marge de cet évènement, dont l’exposition de calligraphie, art à travers lequel beaucoup d’artistes tunisiens s’expriment avec beaucoup de beauté. C’est d’ailleurs à l’artiste graffeur franco-tunisien El Seed qu’ont été confiées la création et la réalisation de la fresque géante sur le bâtiment de l’IMA, inaugurée en 2014. La francophonie reste un formidable moyen de communication et de partage des cultures. Je pense que la Francophonie avec un grand F ne doit pas faire oublier la francophonie avec un petit f, celle qui relie tous ces peuples et qui participe à la richesse de leur multilinguisme et au dialogue des civilisations.

S’agissant du multilinguisme promu par la francophonie, je saisis cette occasion pour rappeler le travail exceptionnel que l’IMA a engagé en faveur de la langue arabe. Nous avons créé une Certification internationale de maîtrise de l’arabe (Cima) qui rencontre un succès croissant dans le monde.

Quelle importance revêt ce sommet pour les deux pays ?

C’est avant tout pour l’ensemble des pays francophones que c’est important, car, ne l’oublions pas, la francophonie rassemble une communauté de 321 millions de personnes. Sa tenue en Tunisie est très symbolique, compte tenu des relations privilégiées qu’entretiennent nos deux pays sur la base de liens historiques, culturels et économiques. Les nombreuses visites officielles de l’IMA par de hautes autorités tunisiennes ou personnalités culturelles, ainsi que mes différents voyages à l’occasion d’événements culturels majeurs en Tunisie témoignent du lien fort et étroit que l’IMA entretient avec la Tunisie. M. Kaïs Saïed nous a d’ailleurs fait l’honneur de sa visite en 2020. Enfin, engagé pour la mise en valeur du patrimoine et la création artistique tunisiens, l’IMA présente très régulièrement au public parisien de nombreux événements, expositions, colloques et spectacles qui mettent la Tunisie à l’honneur, et qui rencontrent régulièrement un franc succès.

Comment évaluez-vous la scène culturelle en France actuellement?

Je dirais que la scène culturelle française est multiple et pas seulement parisienne. Elle rayonne sur tout le territoire français. C’est souvent fascinant et à Paris, ça bouillonne ! Nous sommes un pays privilégié et il y a réellement une jeunesse aujourd’hui créatrice assez merveilleuse.

Est-ce qu’il y a une politique culturelle solide afin de réunir toutes les cultures arabes au sein de l’IMA ?

La mission de l’IMA est de mettre en valeur les talents des différents pays : les talents d’hier et ceux d’aujourd’hui. Ce plan de l’Institut a pour vocation de mettre en lumière une facette de la culture arabe car c’est une culture très riche.

La cause palestinienne ou le conflit israélo-palestinien fait-il partie des axes que l’IMA met en avant dans sa programmation ?

L’IMA est engagé depuis de nombreuses années à promouvoir la culture palestinienne sous toutes ses formes, notamment en abritant et exposant la collection pour le futur musée d’art contemporain de Palestine, avec Elias Sanbar. En 2023, l’IMA présentera une saison sous le nom de «Vive la Palestine !» qui permettra de découvrir ou redécouvrir ce que la Palestine apporte au monde sous toutes ses formes artistiques…

Quels sont les projets de l’IMA à venir ?

Outre cette saison palestinienne à l’été 2023, l’IMA prépare une exposition sur Les parfums dans le monde arabe pour la rentrée 2023. Une exposition inédite à la fois par son thème et sa richesse patrimoniale, mais aussi par son dispositif olfactif et scénographique.

Bien entendu, le projet de refonte du musée, Le Nouveau Musée de l’IMA, motivé par la remarquable donation en art moderne et contemporain de Claude et France Lemand, est l’élément phare de notre programmation pour les prochaines années. Ce Nouveau Musée de l’IMA permettra non seulement de faire découvrir les plus grands artistes du monde arabe dans un lieu unique en Occident, mais aussi d’aborder les enjeux actuels, tels que la décolonisation, la durabilité, la place des artistes femmes arabes.

A.Y.

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