National

Tribune – Les droits de l’enfant 35 ans après: Réimaginer l’avenir pour chaque enfant

Par Hatem KOTRANE | Professeur émérite à la faculté des Sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis-Université de Carthage Ancien membre et vice-président du Comité des droits de l’enfant des Nations unies

1. Il y a 35 ans, le 20 novembre 1989, l’Assemblée générale des Nations unies adoptait, lors de sa 44e session, la Convention relative aux droits de l’enfant (ci-après «la Convention»), ratifiée à ce jour par 196 États dans le monde, dont la Tunisie et tous les autres pays arabes. Un engagement avait alors été pris à l’égard de tous les enfants, sans distinction aucune, celui de respecter, de protéger et de mettre en œuvre une valeur essentielle qui transcende tous les principes et droits reconnus par la Convention : la dignité de l’enfant.

2. Tout enfant est, en effet, un être humain unique et précieux de sorte que les États parties sont engagés à respecter les droits énoncés dans la Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune, ainsi qu’à reconnaître le droit de tout enfant qui est capable de discernement d’exprimer librement son opinion sur toute question l’intéressant, les opinions de l’enfant étant dûment prises en considération eu égard à son âge et à son degré de maturité, pour que, en toute hypothèse, sa dignité individuelle, ses besoins particuliers, son intérêt supérieur et sa vie privée soient respectés et protégés.

Dans la même Convention, les Etats avaient pris l’engagement de faire en sorte que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale, et ce, dans toutes les décisions qui le concernent, de respecter la responsabilité première et commune des parents pour ce qui est d’élever l’enfant et d’assurer son développement et, si l’enfant est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, de lui assurer une protection de remplacement.

3. D’autres engagements avaient été pris, comme celui de reconnaître le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible, son droit à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social, son droit à l’éducation et à la formation professionnelle, son droit aux loisirs et aux activités culturelles et artistiques, son droit d’être protégé contre toutes les formes de violence, de mauvais traitements et d’exploitation économique ou sexuelle, sans égard à son droit s’il est suspecté, accusé ou convaincu d’infraction à la loi pénale, à un traitement qui soit de nature à favoriser son sens de la dignité et de la valeur personnelle, qui tienne compte de son âge ainsi que de la nécessité de faciliter sa réintégration sociale.

4. La célébration, le 20 novembre cette année, du 35e anniversaire de la Convention offre-t-elle, dès lors, l’occasion d’évaluer les avancées accomplies en Tunisie depuis la ratification de la Convention, étant rappelé que la Tunisie a également ratifié le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, parmi 178 pays dans le monde. La Tunisie a, en outre, ratifié le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, parmi 173 pays dans le monde.

Renouvelant son engagement en faveur des droits de l’enfant, la Tunisie a ratifié, plus récemment, le troisième Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l’enfant relatif à la procédure de communication. La Tunisie est, à ce jour, le premier État de la région Mena et de tous les pays arabes à ratifier/ou à accéder à ce Protocole ratifié à ce jour par 50 pays dans le monde, suivie de l’État de Palestine (10 avril 2019).

5. La ratification de ce protocole renforce, sans aucun doute, les mesures et mécanismes mis en place en Tunisie dans le domaine de la protection des enfants contre les diverses formes de violence et d’exploitation, notamment depuis la promulgation du Code de la protection de l’enfant par la loi n° 1995-92 du 9 novembre 1995, qui constitue encore aujourd’hui une référence de ce qu’un pays peut faire de mieux en la matière et qui a influencé la rédaction de plusieurs lois dans plusieurs pays arabes.

6. D’aucuns seraient pourtant enclins à affirmer que le ralliement à ce mouvement universel de défense et de promotion des droits de l’enfant ne ferait que masquer la réalité et que les enfants et les adolescents sont les grands oubliés du combat pour les libertés et pour la démocratie.

7. Nous vivons en fait une époque essentiellement ambivalente, y compris dans le domaine des droits de l’homme de l’enfant. Car, s’il est vrai qu’aucune époque n’a autant donné aux enfants de droits, de soins, d’attention spéciale, aucune autre époque ne les a, en même temps, autant exposé à des risques et autant demandé d’adaptation à ces derniers : enfants abandonnés ou vivant dans d’autres situations difficiles — pauvreté, handicaps, violences et mauvais traitements subis par des enfants, y compris au sein de la famille, enfants privés de milieu familial dont nombre d’entre eux sont placés dans des institutions, dégradation des services de santé publique offerts aux enfants, abandon scolaire touchant en Tunisie plus de 100.000 enfants chaque année, ainsi livrés aux risques d’exploitation, d’exclusion sociale, de déviance et de délinquance, autant de questions et de défis parmi tant d’autres et qui commandent à ce stade de l’évolution un questionnement fécond sur les valeurs réellement partagées dans notre pays, ainsi que sur le soutien et les moyens que l’État et la société dans son ensemble sont prêts à consentir pour que les enfants, tous les enfants, continuent d’inscrire éternellement la Tunisie dans leur confiance !

L’article Tribune – Les droits de l’enfant 35 ans après: Réimaginer l’avenir pour chaque enfant est apparu en premier sur La Presse de Tunisie.


lien sur site officiel

Source :

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page