Transport aérien : Entre volonté de décollage et zones de turbulences !
Le secteur du transport aérien en Tunisie lutte pour se maintenir à haute altitude. Entre difficultés financières, pressions concurrentielles et enjeux de sécurité, son importance pour l’économie nationale ne peut être, cependant, surestimée.
Encore un dossier rouvert par le Chef de l’Etat. Le transport aérien en Tunisie commence à retrouver son souffle, mais de grands pas restent à franchir, alors que ce secteur s’avère être le point névralgique du secteur touristique et même de l’économie nationale.
Si le Chef de l’Etat a promis de redonner des ailes à Tunisair, principal acteur de ce secteur, la Gazelle commence progressivement à retrouver son éclat, bien que sa flotte soit considérablement réduite et ne puisse en aucun cas répondre à la demande de plus en plus grandissante, surtout que la conjoncture touristique s’annonce prometteuse.
Depuis plusieurs décennies, le transport aérien joue un rôle crucial dans la connectivité nationale et internationale de la Tunisie. Le pays dispose de plusieurs aéroports internationaux et nationaux qui desservent les principales villes et destinations touristiques, cependant le trafic reste monopolisé par l’aéroport de Tunis-Carthage qui a atteint ses limites en termes d’accueil des voyageurs.
Pour leur part, les compagnies aériennes nationales, notamment Tunisair, assurent des liaisons internationales vers de nombreuses destinations européennes, africaines et du Moyen-Orient. De plus, plusieurs compagnies aériennes étrangères opèrent des vols vers la Tunisie, renforçant ainsi la connectivité du pays avec le reste du monde.
Un transport aérien paralysé en partie
Le tourisme étant une composante majeure de l’économie tunisienne, le transport aérien revêt une importance particulière pour le développement et la croissance du secteur touristique. Les vols charters saisonniers sont également fréquents, pour répondre à la demande croissante de voyages vers les stations balnéaires tunisiennes telles que Hammamet, Sousse et Djerba. Cependant, ce secteur souffre d’inconvénients de taille, notamment au regard d’une infrastructure vieillissante, comme le confirment les experts en la matière. Principal aéroport arrivé à saturation, manque de compétitivité, principale compagnie nationale face à d’importants problèmes financiers, transport terrestre et interurbain défaillant et accord Open Sky en suspens, le transport aérien s’avère en partie paralysé.
Autant rappeler qu’à l’instar de nombreux pays, le transport aérien en Tunisie a été affecté par la pandémie de Covid-19, avec des perturbations significatives du trafic aérien et des restrictions de voyages mises en place pour contenir la propagation du virus. Ces défis ont eu un impact sur les compagnies aériennes, les aéroports, le trafic des passagers et l’industrie du tourisme dans son ensemble, mais des efforts ont été fournis pour rétablir progressivement les activités aériennes dans le pays à mesure que la situation sanitaire s’améliorait.
Quelles solutions ?
Dans ce sillage, Habib Ben Slama, expert en transport aérien et en tourisme, reconnaît que le secteur en question souffre de nombreux manquements. Le premier, selon ses dires, réside dans la capacité de transport limitée des différentes compagnies nationales et notamment du transporteur national Tunisair, «alors que dans le monde entier, les compagnies reflètent la force et le pouvoir des pays et des nations». La concurrence avec d’autres transporteurs régionaux et internationaux pose des défis pour les compagnies aériennes tunisiennes, en particulier lorsqu’elles doivent rivaliser sur les prix et les services, citant par exemple le Maroc qui dispose d’une compagnie opérant des centaines de vols par jour et accaparant une grande part du transport aérien africain.
Bien que la Tunisie dispose d’aéroports internationaux modernes dans certaines régions, d’autres zones du pays requièrent des investissements supplémentaires dans l’infrastructure aéroportuaire pour répondre à la demande croissante de voyages.
Ben Slama rappelle que ce secteur dépend largement du tourisme. Il explique que la forte saisonnalité du tourisme en Tunisie peut entraîner des fluctuations importantes dans la demande de voyages aériens, ce qui peut rendre difficile la gestion des capacités et des revenus ainsi que la rentabilité du secteur, notamment en basse saison.
Pour surmonter ces défis, Habib Ben Slama estime indispensable d’investir dans l’expansion, la modernisation et la rénovation des aéroports existants pour répondre à la demande croissante de voyages aériens. «Cela pourrait inclure l’agrandissement des terminaux, l’amélioration des pistes, des aires de stationnement et d’autres infrastructures connexes, notamment l’appui de la compagnie Tunisair dont la flotte est considérablement réduite», a-t-il dit à La Presse.
«Le gouvernement pourrait envisager des partenariats public-privé pour financer, construire et exploiter de nouvelles infrastructures aéroportuaires. Cela permettrait de partager les risques et les coûts entre le secteur public et le secteur privé, tout en tirant parti de l’expertise et des ressources du secteur privé», a-t-il ajouté.
L’Open Sky, un accord en suspens !
Dans ce contexte, alors que l’essor du trafic aérien est entravé par plusieurs facteurs, l’accord de l’Open Sky peine à se concrétiser. Cet accord signé entre la Tunisie et l’Union européenne en 2017 consiste à ouvrir l’espace aérien tunisien, ainsi que les aéroports nationaux, aux appareils des différentes compagnies aériennes européennes, notamment, les «low cost».
Cependant, les inquiétudes sur la capacité concurrentielle de la compagnie aérienne Tunisair ont conduit à perturber son entrée en vigueur pendant des années, bien que cet accord ne concerne pas pour le moment l’aéroport Tunis-Carthage. Depuis 2022, l’ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie, Marcus Cornaro, a soutenu que «c’est au gouvernement tunisien de choisir le bon moment pour appliquer la convention de l’Open Sky, afin de booster le secteur du tourisme, de renforcer l’arrivée des compagnies charter et d’augmenter le nombre de visiteurs en Tunisie».
De même, les différents ministres du Tourisme qui se sont succédé ces dernières années ont affirmé qu’il n’existait plus aucun obstacle pour mettre en place l’accord relatif à l’ouverture de l’espace aérien tunisien à l’Union européenne. Or depuis, aucune avancée n’a été actée dans ce dossier. Probablement, tant que les compagnies nationales, notamment Tunisair, s’avèrent incapables de concurrencer les compagnies étrangères, le sky (ciel) est condamné à rester fermé.
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