Séminaire international sur la « lutte anti-contrefaçon et la propriété intellectuelle » : Protéger l’économie, la santé publique et l’environnement
En Tunisie comme dans tous les pays de l’Afrique du Nord, l’optimisation de la lutte contre la contrefaçon nécessite une approche globale impliquant le gouvernement, les entreprises, les organismes de réglementation et la société civile.
En partenariat avec l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi France) et l’Institut national de la normalisation et de la propriété industrielle (Innorpi Tunisie), le projet « Droits de propriété intellectuelle et innovation en Afrique » (AfrIPI), un projet de développement de la propriété intellectuelle (PI), financé par l’Union européenne et mis en œuvre par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (Euipo), organise du 12 au 14 septembre 2023, à Tunis, un séminaire international sur la « lutte contre la contrefaçon et la défense de la propriété intellectuelle ».
L’événement vise à sensibiliser les autorités, les titulaires de droits et les acteurs impliqués dans l’application des DPI (Droits de propriété intellectuelle) à l’importance de la PI, à la nécessité de lutter contre la contrefaçon ainsi qu’à l’impact de ce fléau sur l’économie nationale et l’écologie, dans l’objectif de promouvoir un protocole d’accord entre les différentes directions douanières des pays d’Afrique du Nord, notamment l’Algérie, l’Egypte, le Maroc et la Tunisie, avec le soutien de la France, et ce, à travers la facilitation de la mise en place de réseaux informels entre les autorités participantes.
Il s’agit, également, d’une occasion pour permettre aux ayants droit, aux autorités et aux institutions internationales d’examiner des solutions au problème de la destruction écologique des marchandises de contrefaçon saisies et de mettre en place un projet de recyclage des produits contrefaits dans la zone nord-africaine.
Renforcer le rôle du secteur privé
À l’ouverture des travaux de ce séminaire, Nafaâ Boutiti, directeur général de l’Innorpi, n’a pas manqué de rappeler qu’il est important de lutter contre la contrefaçon pour protéger les économies, la santé publique et l’environnement et que les gouvernements, les entreprises et les consommateurs jouent tous un rôle dans cette lutte en renforçant la législation, en mettant en place des mécanismes de contrôle de la qualité et en sensibilisant à ces problèmes.
« Ce séminaire vise essentiellement à débattre de la question de la lutte anti-contrefaçon, durant lequel les aspects juridiques (propriété industrielle, acquisition et application des droits…) seront abordés. C’était aussi une occasion pour renforcer la collaboration entre les secteurs public et privé, ainsi que les différentes parties prenantes en la matière, que ce soit à l’échelle nationale, régionale, voire internationale », a-t-il précisé.
Dans ce même cadre, Boutiti a ajouté que la coopération régionale est indispensable pour faire réussir ce défi de taille, étant donné l’impact de ce fléau sur l’économie, l’environnement, la santé…
«En Tunisie, on a l’arsenal juridique adéquat avec des lois relatives à la protection des différents aspects de la propriété industrielle qui ont été mises en place depuis les années 2000-2001. Mais ceci ne suffit pas aujourd’hui. Pour ce faire, on est en train de réviser la législation existante en la matière. Cette mesure nous permettra de nous adapter à l’évolution des normes internationales et d’offrir un système de protection plus efficace, et ce, à travers l’utilisation de nouvelles technologies d’information », a-t-il encore souligné.
Un programme de 17 millions d’euros
Pour sa part, l’ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie, Marcus Cornaro, a indiqué que la contrefaçon n’épargne aucun pays tant au niveau régional qu’international. Ce fléau ne cesse de toucher plusieurs secteurs stratégiques comme la pharmaceutique, le textile, les pièces de rechange automobiles…, mais on constate aussi de plus en plus de contrefaçon dans le domaine numérique et dans les arts. « Face à cette situation, l’Union européenne s’est fortement engagée, depuis des années, dans ce combat pour avoir une réglementaire plus sévère. Donc, cette rencontre nous permet de renforcer cette collaboration avec la Tunisie dans l’objectif de consolider nos efforts et notre appui au niveau du continent pour avoir une vision globale à l’échelle africaine… Pour ce faire, un programme régional de cinq ans et d’un coût total de 17 millions d’euros a été mis en place pour lutter contre ce fléau », a-t-il souligné, tout en insistant sur l’importance d’avoir plus d’engagement entre les différentes parties prenantes, à leur tête le secteur privé, qui est directement touché par ce phénomène.
Quels impacts ?
Les produits contrefaits représentent une menace imminente pour le développement de l’Afrique du Nord, comme pour d’autres régions du monde. Il y a, tout d’abord, l’impact économique où on peut citer plusieurs problèmes, particulièrement la perte de revenus (la contrefaçon prive les entreprises légales de revenus, ce qui peut entraîner une réduction des investissements, de la croissance économique et de la création d’emplois), la concurrence déloyale (les produits contrefaits sont souvent vendus à des prix beaucoup plus bas que les produits d’origine, ce qui crée une concurrence déloyale pour les entreprises locales) et la réduction de la confiance des investisseurs (la contrefaçon peut dissuader les investisseurs étrangers d’injecter des capitaux dans la région, car cela peut être perçu comme un signe d’instabilité économique et juridique).
On peut aussi citer la détérioration de la qualité des produits, étant donné que les produits contrefaits sont généralement de qualité inférieure, ce qui peut nuire à la satisfaction des consommateurs et à la réputation des entreprises locales. Il y a aussi une perte de recettes fiscales, puisque les contrefacteurs échappent souvent aux taxes et aux droits de douane, ce qui prive les gouvernements de recettes fiscales importantes qui pourraient être investies dans des projets de développement. Pas seulement, aujourd’hui on constate aussi un impact sur l’innovation. En effet, les entreprises locales sont découragées d’investir dans la recherche et le développement de nouveaux produits lorsque la contrefaçon est répandue, car elles risquent de voir leurs innovations copiées rapidement. Ceci sans oublier la déstabilisation des marchés, puisque la présence de produits contrefaits peut perturber les marchés, entraînant des fluctuations des prix et une incertitude économique.
Pour ce qui est de la menace pour la santé publique, les produits contrefaits, en particulier dans les secteurs pharmaceutique et alimentaire, peuvent présenter des risques graves pour la santé publique en raison de la présence de substances nocives, de l’inefficacité des médicaments contrefaits.
Quant à l’environnement, il n’est pas inutile de rappeler que certaines contrefaçons peuvent utiliser des matériaux de mauvaise qualité ou des pratiques de fabrication non réglementées, ce qui peut avoir un impact sur l’environnement en contribuant à la pollution et à la dégradation des ressources naturelles.
La nécessité de la coopération régionale
D’une manière générale, pour l’Afrique du Nord, qui cherche à stimuler son développement économique, la contrefaçon peut constituer un obstacle majeur. Il est donc essentiel de mettre en place des mesures pour renforcer la protection de la propriété intellectuelle, intensifier la lutte contre la contrefaçon et sensibiliser les entreprises et les consommateurs aux risques associés à ces produits contrefaits. Dans ce même cadre, une coopération régionale et internationale est également cruciale pour lutter contre la contrefaçon, car les réseaux criminels opèrent souvent à l’échelle mondiale.
Quant à l’économie tunisienne, les coûts exacts de la contrefaçon sont difficiles à quantifier précisément en raison de la nature clandestine de cette activité et du manque de données fiables. Cependant, ces coûts varient en fonction des secteurs économiques, de l’ampleur de la contrefaçon et d’autres facteurs. Pour obtenir une évaluation précise de l’impact économique de la contrefaçon en Tunisie, il serait nécessaire de mener des études économiques spécifiques et d’analyser les données disponibles pour mieux comprendre ces impacts et mettre en place des stratégies de lutte contre la contrefaçon plus efficaces.
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