Economie tunisie

Plateformisation de l’économie en Tunisie : Des débuts prometteurs

Avec une jeunesse connectée, une infrastructure numérique en progrès et des politiques favorables, la Tunisie offre un terreau propice à l’essor de l’économie des plateformes. Pourtant, des obstacles majeurs persistent : paiements mobiles limités, cadre réglementaire flou et informalité du travail. Entre opportunités et défis, ce modèle économique cherche encore sa voie. 

Loin d’être un phénomène passager, la plateformisation de l’économie s’impose comme un modèle commercial pertinent, exploitant les technologies numériques pour faciliter la mise en relation entre le consommateur (la demande) et le producteur ou le prestataire de services (l’offre). L’essor de nombreuses plateformes telles que « Netflix », « Airbnb », « Uber » ou « Amazon » a révolutionné des secteurs économiques entiers, exerçant un effet d’entraînement sur l’activité elle-même, dont le volume et la taille croissent à mesure que le réseau d’utilisateurs s’étend. 

Bien que son impact varie à travers le monde — l’écart entre les pays en développement et les pays riches reste considérable —, l’économie des plateformes présente de nombreux avantages, notamment économiques. Toutefois, ses inconvénients doivent être surveillés de près. Il convient tout d’abord de rappeler que l’économie des plateformes diffère du modèle commercial traditionnel, basé sur une chaîne de valeur linéaire. Dans ce modèle, les plateformes ne participent pas directement à la production mais servent de facilitatrices d’interactions. 

Ces interactions ont un effet de levier sur l’activité des producteurs, leur permettant d’accéder à de nouveaux consommateurs et, plus largement, à de nouveaux marchés, à moindre coût et avec une rapidité accrue. Avec une diversité croissante, à travers les plateformes de e-commerce, de services, de travail ou encore de réseaux sociaux, l’économie des plateformes touche désormais tous les secteurs d’activité. Cela est considéré comme un atout, car plusieurs études ont mis en avant son rôle d’accélérateur d’innovation dans les économies émergentes et sa contribution à la création d’une valeur économique et sociale durable.

Ces plateformes numériques peuvent, en effet, accroître la productivité des entreprises et favoriser leur formalisation. Cependant, ce nouveau modèle comporte aussi son lot d’inconvénients. La protection des données personnelles, véritable carburant de ce modèle commercial, figure parmi les principales préoccupations. Par ailleurs, l’économie des plateformes affecte directement les entreprises traditionnelles et peut, dans certains cas, entraîner des pertes d’emplois, notamment parmi les populations vulnérables travaillant dans l’économie informelle locale. En matière d’emploi, si l’économie des plateformes offre des opportunités de travail flexible souvent appréciées, elle pose aussi des défis. La précarité liée aux contrats courts, en particulier sur les plateformes de travail « gig », soulève des problèmes de revenus, de conditions de travail, de statut et d’accès à la protection sociale.

Un environnement favorable 

En Tunisie, bien que l’économie des plateformes ait fait son apparition il y a quelques années, elle n’a réellement pris de l’ampleur qu’après la crise du Covid-19. L’explosion des commandes sur les plateformes de e-commerce, le développement du télétravail et la digitalisation de certains services publics, comme la distribution des allocations familiales, ont encouragé l’expansion de ce modèle. Un capital-confiance s’est progressivement constitué autour de ces plateformes, favorisant leur développement et la multiplication des initiatives locales. Toutefois, cette économie reste encore à un stade naissant en Tunisie. 

Une étude récente mandatée par la GIZ, portant sur la plateformisation de l’économie tunisienne, révèle que la plupart des entreprises adoptant ce modèle cherchent encore un business model viable. Si de nombreuses plateformes locales opèrent à l’échelle nationale, seules quelques-unes disposent de filiales à l’étranger. En raison de l’absence de données officielles sur les entreprises de l’économie des plateformes en Tunisie, l’étude s’est basée sur les données de « Smart Capital Tunisie » comme indicateur. Les estimations portent sur environ 250 entreprises tunisiennes, réparties entre sites de commerce électronique, plateformes de services, plateformes de travail numérique dans les secteurs de la mobilité ou des technologies, places de marché, etc., dont environ 25 % sont des startup.

Le modèle B2B domine l’économie des plateformes en Tunisie, avec une part de marché de 47 %, suivi du B2B2C (20 %). Cette prépondérance du B2B s’explique par la profondeur limitée du marché B2C et les systèmes de paiement restreints, limitant ainsi les opportunités de monétisation des transactions B2B2C. Le rapport souligne que tous les secteurs ont connu une montée en puissance de cette économie, bien que le degré d’adoption varie. Globalement, l’économie des plateformes numériques présente un potentiel considérable pour la Tunisie, grâce à sa capacité à générer des opportunités d’emploi, à améliorer l’efficacité des chaînes d’approvisionnement, à autonomiser les micro-entrepreneurs et à optimiser les opérations de livraison du dernier kilomètre, contribuant ainsi au développement socio-économique. 

Cependant, plusieurs défis subsistent, notamment une infrastructure inadaptée, en particulier pour les paiements mobiles et la logistique, ainsi que l’absence de réglementation sur le travail informel dans cette économie. 

Pour tirer pleinement parti de cette opportunité, l’étude recommande un dialogue concerté entre les différents acteurs, afin d’élaborer et de mettre en œuvre de bonnes pratiques visant à améliorer les conditions de travail des travailleurs des plateformes, notamment ceux exerçant des emplois manuels.

L’article Plateformisation de l’économie en Tunisie : Des débuts prometteurs est apparu en premier sur La Presse de Tunisie.


lien sur site officiel

Source :

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Bouton retour en haut de la page