Culture

Nada Mezni Hfaiedh, réalisatrice de «L’entre deux», à La Presse : «J’ai choisi de faire un cinéma engagé»

 

Avec son long métrage «L’entre deux», Nada Mezni Hfaiedh a signé le premier film tunisien sur l’intersexualité. Le film aborde le problème des enfants nés avec deux sexes et la difficulté qu’il rencontrent face à une société qui ne les tolère pas et à des lois qui ne les prennent pas en considération. La réalisatrice nous a accordé cet entretien. 

Certains pensent que vous débarquez avec une mentalité étrangère et que vous vous mettez à parler dans vos films des «non-dits tunisiens»…

D’abord, je ne viens pas de débarquer puisque je suis en Tunisie depuis 2008 et que je suis purement tunisienne. C’est vrai que je suis née à l’étranger et que j’ai vécu une grande partie de ma vie à l’étranger.

En fait, je suis née en Arabie saoudite, ensuite je suis partie avec ma famille aux Etats-Unis et après mon mariage j’ai vécu au Canada. Défendre les causes humanitaires et révéler les injustices sociales sont la vraie source d’inspiration pour mes films et en tant qu’artiste, je me sens investie du devoir de parler de ces injustices et de dévoiler les sujets tabous de notre société. Dès le début, j’ai choisi de faire un cinéma engagé et je n’ai aucune appréhension ni frilosité face à ce genre de sujet. Pour moi, c’est ça le cinéma.

Pourquoi vous intéressez-vous autant au problème de genre ?

Je me pose également la même question… Peut-être que le fait d’être née en Arabie saoudite y est pour quelque chose. Je respecte la société saoudienne où j’ai grandi, mais là-bas, ce genre de sujet était carrément tu.

Cela dit, quand je suis rentrée en Tunisie, j’ai retrouvé la même attitude silencieuse face à cette réalité sociale. Le fait que je sois réalisatrice qui adore ce qu’elle fait m’a permis aussi d’aborder tous ces non-dits. Même si je me sens libre en tant que femme, en faisant des films, je me sens encore plus libre. Il ne faut pas être homosexuel ou intersexuel pour défendre des causes humanitaires. Parler des gens marginalisés est une chose qui m’interpelle naturellement et humainement.

Les préjugés face aux gens différents, l’intolérance vis-à-vis d’eux sont pour moi des injustices que mes films dénoncent.  A mon sens, à travers le cinéma, on peut changer les mentalités, ne serait-ce que d’une once à chaque fois qu’on réalise un film.   

L’identité sexuelle pose à ce point un problème juridique en Tunisie ?

Effectivement et j’espère que ce film va engager une véritable action pour résoudre ce problème. En fait, ces enfants sont différents lors de leur naissance (ils naissent avec deux sexes) et ce sont les parents qui déterminent le sexe approprié pour leur enfant. Ils l’inscrivent à l’Etat civil avec le sexe qu’ils ont défini et on leur fait subir les opérations nécessaires pour qu’ils soient conformes à l’image que la société tolère.

Mais en grandissant, ces enfants découvrent qu’ils ont un corps qu’ils n’ont pas choisi. Ils se retrouvent dans l’impossibilité de changer de sexe puisque la loi tunisienne l’interdit formellement. D’ailleurs, il n’y a aucune loi qui protège aujourd’hui les enfants intersexués. 

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