Mes Humeurs – Squares et espaces verts
La Presse—Ma lecture du moment est délicieuse, presque ludique, son auteur est quasi inconnu du grand public : Julio Ramon Ribeyro. Il est péruvien et a vécu longtemps à Paris où il a travaillé à l’Agence France Presse (AFP). «Proses apatrides» (éd.Finitude) n’est ni un roman ni un recueil, même pas de la poésie en prose, l’ouvrage est une somme de fragments proches de ceux de Baudelaire. Disons pour simplifier que le fragment, popularisé par Roland Barthes. Fragments d’un discours amoureux est en quelque sorte le lieu où peuvent s’effacer les frontières qui séparent les genres… (Tiphaine Samoyault) 200 fragments, riches en contenus composent «Proses apatrides», ils relatent une partie de la vie de Ribeyro évoquant notamment son vécu parisien, ses réflexions, ses pensées et ses déambulations dans la ville ; il est d’une culture immense et s’étale avec plaisir sur tel ou tel sujet. J’ai choisi à dessein l’un des fragments qui m’a impressionné et qui me renvoie à des années en arrière, ce fragment (n°34) porte sur l’espace de jeu en ville, un square de la rue de Procession à Paris, comme il s’en trouve des dizaines dans cette ville. Le square comme lieu de rencontre, rassembleur de citoyens, où cohabitent des enfants et des vieux»… et sur les bancs du jardin, autour du bac à sable, les vieux». Et plus loin « la solitude des enfants préfigure celle des vieux».
Des squares petits ou grands, propres et soignés, on en rêve dans nos villes, pour nos enfants, pour nos vieux, pour les mamies, pour les visiteurs, pour les habitants, pour tout le monde. Mais il suffit de déambuler dans les rues pour repérer les imperfections ajoutées au manque notable de squares.
Une décennie en arrière, j’étais appelé à mener une enquête sur 6 localités pauvres ou des plus pauvres de la région de Tunis, pourtant nouvellement sorties de terre ( El Bokri, Douar Hicher, etc). ce que j’ai découvert ne prête pas à l’optimisme. Des quartiers qui abritent des milliers d’habitants, où on rêverait de voir un espace vert. Des endroits ressemblant à des paysages lunaires, une ou deux artères carrossables, des ruelles étroites, des cafés spacieux pleins à craquer, des chiffres au passage ( 25.000 cafés dans le pays contre 225 maisons de culture et 31 salles de cinéma), des jeunes chômeurs et oisifs, habités par un seul sentiment : l’ennui. Et ne nourrissent qu’une ambition : partir.
Flâneur aux aguets des changements, plus d’une fois, j’ai maugréé contre l’absence d’espaces verts, contre la poussée des cités sans âme, sans verdure, sans étendues de jeux pour enfants et de repos pour vieux. Aussi, quand je découvre un nouvel espace vert en ville, je saisis l’occasion pour saluer l’événement.
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