Les Tunisiens et les JO: La Tunisie d’abord !
Les sports individuels et de combat sont nos points forts.
L’intérêt qu’accordent les Tunisiens à la participation de nos athlètes aux JO ne se résume pas uniquement à voir un beau spectacle, mais bien une projection sur les objectifs à atteindre
C’est une fête, une immense kermesse populaire, multiculturelle, qui interpelle le monde entier. La France a travaillé dur pour en faire une exception. Une partie des promesses et engagements ont été tenus.
Quelles sont les premières impressions?
Un couple de Français qui passe sa retraite chez nous et qui est là depuis neuf ans, résume en quelques mots ses impressions : « La cérémonie d’ouverture été assez relevée. Mais on a voulu satisfaire tout le monde, oubliant que le monde c’est une multitude de cultures qui ne sont pas obligées d’être compatibles avec les us et coutumes des uns et des autres.
Nous avons été choqués par certains tableaux qui dénotent que la liberté n’est pas licence.»
Son épouse, qui l’entendait parler, hochait la tête. Elle ajouta : «Je suis impressionnée par l’attitude des Tunisiens qui mettent sur un pied d’égalité tous les prophètes et envoyés de Dieu. L’outrage à Jésus est inacceptable. Et puis, ce n’est pas tout. Il y a eu des ratés au niveau de la nourriture, du logement, du transport, etc… La politique a tout vicié»
Et les Tunisiens dans tout ça ?
Ils ont été bien présents. Comme d’habitude, ils sont derrière leurs couleurs. Nous avons vu leur comportement avec Ons Jabeur. Ils ne laissent rien et là où les couleurs tunisiennes sont hissées, ils foncent sans hésiter. Pour ne pas exagérer, le milieu ambiant n’est pas le même que celui du football, en 1978, lors de la victoire de la Tunisie sur le Mexique, mais tout est relatif. L’engouement demeure donc vivace et cela prouve que les Tunisiens suivent bel et bien leurs représentants partout.
Cela ne date pas d’aujourd’hui. « Même au temps du protectorat, on y allait pour le plaisir d’encourager un des nôtres », nous confie un ancien sportif qui pratiquait la gymnastique à la Naceuria. « Nous veillons jusqu’à une heure avancée de la nuit pour connaître un résultat ou écouter un reportage ».
Mohamed Gammoudi a lancé une véritable mobilisation nationale, en remportant sa première médaille olympique. Habiba Ghribi a donné au monde un visage resplendissant de la femme tunisienne. Mellouli a prouvé que les spécialités sportives les plus pointues sont à la portée de nos nageurs. Hafnaoui puis Jaoudi, bientôt Rahmouni, ont suivi le sillon tracé. Le même raisonnement est valable pour Ferjani en escrime ou en sports aquatiques.
Et toutes ces prouesses, sous l’œil attentif de fans qui ont fini par reconnaître que notre bonheur est dans nos sports individuels et de combat.
Le fait est que les salons de thé ou les cafés climatisés sont pris d’assaut, que des commentaires, assez pertinents parfois, prouvent que les Tunisiennes et les Tunisiens sont intéressés par ces JO.
La preuve, nombreux sont ceux qui énoncent les temps, les progrès chronométriques, les noms d’un certain nombre des adversaires des Tunisiens, ce qui est quand même remarquable. «Que ce soit en football ou en boule et pétanque, nous sommes là, a insisté un jeune qui sirotait un jus. Nous pouvons avoir des désaccords sur tout, sauf sur ça. La Tunisie d’abord, c’est un slogan que l’on adopte de Kélibia à Bordj Bourguiba. Là, nous sommes chauvins. Ce petit bout de terre a toujours brouillé les cartes des meilleurs. Dans un certain nombre de disciplines comme la natation, l’escrime, la boxe où nous pouvons mieux faire, l’haltérophilie si on s’en occupe». Notre interlocuteur est diplômé de l’Enseps… au chômage. Il attend un poste.
Coïncidences
Cette compétition regroupe les meilleurs spécimens humains en confrontation directe dans des épreuves où les enchaînements incroyables, qui défient la pesanteur et mettent en valeur d’extraordinaires capacités humaines, ont coïncidé avec l’organisation en Tunisie de deux séminaires extrêmement importants: la mise en place d’un plan d’action couvrant la période 2024- 2035 pour le sport et la jeunesse.
Pour qu’il n’y ait pas de confusion, chacun de ces secteurs a sa propre spécificité.
Mais les deux ne peuvent s’en tirer, concevoir des plans à long terme, qu’avec la collaboration des autres départements.
Dans le cas contraire, nous ne pourrions jamais réussir à faire redécoller notre sport et satisfaire les exigences d’une jeunesse qui a son mot à dire.
La veille du démarrage de ces séminaires, le Chef du gouvernement a fixé l’orientation. En sport, la Tunisie participe pour avoir des résultats. Cela suppose que les participations de complaisance sont à oublier. Au niveau de la jeunesse, sa formation engage tous les départements et ne se limite pas au seul MJS.
À point nommé
Ces départements se doivent d’apporter leur contribution en fonction des besoins culturels, artistiques, sportifs, dans le cadre du sport pour tous, la formation professionnelle, etc.
Au niveau du sport de compétition de l’élite, c’est une tout autre question.
Là, il s’agit de reprendre en main un secteur mis à mal par un empirisme maladif, qui a complètement défiguré la scène et bloqué toute possibilité d’action.
Ces JO viennent donc à point nommé pour nous permettre de nous situer par rapport à nos futurs adversaires potentiels. C’est énorme, mais dans nos cordes.
Les sports individuels et de combat sont nos points forts. L’intérêt qu’accordent les Tunisiens n’est en rien une satisfaction de voir un beau spectacle, mais bien une projection sur les objectifs à atteindre.
La différence est énorme et c’est aux responsables de tirer les conclusions.
Ne terminons pas sans rapporter ce que nous a confié un ancien professeur de sociologie à propos du comportement des Tunisiens lors des compétitions sportives internationales : « Ne le dites pas. Nous sommes à la limite aussi critiques que chauvins ».
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