Les propos scandaleux de Riadh Jrad font polémique
L’autoproclamé porte-parole du régime et jeune propagandiste, Riadh Jrad n’était pas content après les décisions du Tribunal administratif rétablissant trois candidats à la présidentielle qui avaient été rejetés par l’instance électorale. Mécontent, il a qualifié de débiles les réactions de la scène politique et d’éminents experts et invoqué des rumeurs et des complots visant à manipuler l’opinion publique.
L’assemblée plénière du Tribunal administratif, composée de 27 juges, avait en effet statué en faveur de la réintégration à la course pour Carthage de Abdellatif El Mekki, Mondher Zenaidi et Imed Daimi.
Alors qu’il y a quelques jours, lorsque le tribunal avait débouté les recours des candidats en première instance, Riadh Jrad avait crié victoire, mais les décisions définitives ont poussé le jeune propagandiste à diffamer les juges et à mettre en doute leur indépendance. Il s’est même permis de nommer quatre magistrats censés avoir siégé à l’assemblée en invoquant leurs liens avec des personnalités politiques de l’opposition ou leur engagement dans des associations.
Les propos de Riadh Jrad ont provoqué une grosse polémique. Suivi par des milliers d’internautes, il a jeté en pâture les magistrats et a tenté de discréditer la juridiction administrative avec ses insinuations. Sur la scène politique, plusieurs personnalités ont dénoncé des propos scandaleux et dangereux. Il est d’ailleurs question de plaintes pour diffamation.
L’ancien magistrat et secrétaire d’Etat, Abderazzek Ben Khelifa a tenu à démentir Riadh Jrad et à rétablir la vérité. Sur son compte, il révèle que les juges cités n’étaient même membres de l’assemblée qui avait statué sur les candidatures et que certains étaient en vacances à ce moment-là.
Abderazzek Ben Khelifa a démontré que les calomnies de Riadh Jrad n’avaient aucun fondement. « L’auteur du statut oublie que les membres de l’assemblée sont au nombre de 27 ce qui signifie que les quatre juges diffamés constituent une minorité. Ce qui lui échappe aussi, c’est que ces mêmes juges avaient statué sur la légitimité du référendum ou l’élection de Kais Saied. Il a calomnié Samia Bekri parce qu’elle est membre de l’Association des magistrats alors que ceci est un honneur… Il a calomnié Naima Ben Akla parce qu’elle est l’épouse du prisonnier politique Ridha Belhaj, alors qu’elle avait statué sur des jugements contre Nidaa Tounes à l’époque où son époux était leader du parti… Il a calomnié Yosra Krifa alors qu’elle était en vacances et n’avait participé à aucune décision… Il a calomnié Ridha Ben Mhamoud parce qu’il a travaillé avec Bhiri et alors qu’il n’avait pas participé à la majorité des affaires à cause de la maladie. Et on sait que l’actuel président a été élu par Ennahdha et plusieurs membres de son gouvernement avaient occupé des postes politiques lors de la décennie… ».
Abderazzek Ben Khelifa a fini par conseiller Riadh Jrad de s’informer, relevant que les juges diffamés ont un palmarès en or de décisions rendues en faveurs des libertés, et qu’il suffisait de consulter la bibliothèque du Tribunal administratif, « vous trouverez qu’ils ont suivi les mêmes principes depuis 30 ans. Ridha Ben Mahmoud avait par exemple statué en faveur de la Ligue de défense des droits de l’Homme et de l’Association des jeunes avocats dans les années 90’… ».
Le journaliste juridique, Mongi Khadhraoui s’est aussi exprimé après la sortie de Riadh Jrad et son témoignage se base sur une expérience de plus de 20 ans où il a pu suivre les travaux du Tribunal administratif. « Les juges du tribunal se sont toujours prononcés en faveur des affaires des libertés sous Ben Ali… J’ai assisté à des centaines, voire des milliers d’affaires. Les juges ne se prononçaient que sur des références solides… Ils passaient des journées à faire des recherches… ».
Après avoir évoqué plusieurs affaires anciennes et récentes, Mongi Khadhraoui a, lui aussi, affirmé que Yora Krifa n’était même pas présente. Il a également relevé l’attaque visant Samia Bekri parce que membre de l’Association des magistrats et proche d’Anas Hmaidi : « S’ils avaient connaissance de l’ampleur de la défense par cette association du droit des Tunisiens à une justice indépendante, ils n’auraient pas proféré ces paroles ».
Le journaliste a rappelé que plusieurs juges font partie de l’association dont l’épouse de Ridha Belhaj qui avait prononcé des jugements contre l’Etat alors même que son époux était la deuxième personnalité du palais présidentiel.
Mongi Khadhraoui a conclu en estimant que quiconque ne connait pas le fonctionnement et l’historique du Tribunal administratif « devrait, au mieux, avoir la décence de garder le silence ».
I.L
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