L’Equipe nationale au crible : Des choix pour engager l’avenir
L’équipe de Tunisie actuelle, tout le monde en convient, possède des ressources. On a réussi à réunir des éléments d’un niveau très acceptable, mais, franchement, nous ne comptons aucun joueur qui puisse se targuer d’être un jour l’auteur d’un coup de génie à même de changer la physionomie d’une rencontre.
Qu’en est–il de notre « Equipe Nationale » ? Nous n’en savons pas assez, rien du tout, presque rien, à l’occasion des conférences de presse où on raconte ce qui n’éveille en rien notre curiosité. Et comme il n’y a pas beaucoup de communication à ce propos, certains se rabattent sur les réseaux sociaux pour… en savoir davantage. Pas nous !
En effet, à en croire ces « fans » des joueurs de notre sélection qui vibrent à chaque victoire en dépit de la médiocrité de l’adversaire et renversent tout sur leur passage en cas de contreperformance, l’avenir est déjà en rose. Il leur suffit que les joueurs qui ont leur faveur tirent leur épingle du jeu, pour que la joie soit totale. Une façon d’apprécier les talents d’une façon tout ce qu’il y a de subjective et qui ne mène pas très loin, dans un football qui évolue à la vitesse de l’éclair.
Certains de ces éléments, partis faire fortune ailleurs, sont, pour leur majorité, de dignes représentants du football dont ils portent le maillot. D’autres, par contre, sont de véritables artistes en leur genre. Ils sentent les bons coups et s’appliquent à en faire partie. Ils sont à l’occasion buteurs ou reçoivent des notes de comportement au-dessus de la moyenne. Les joueurs sur lesquels sont portés des jugements bien définis, les clubs se battent pour les engager… Inutile de préciser que ce sont toujours les mêmes éléments qui bénéficient de cette attention et que c’est du matraquage bien organisé pour faire pencher la balance du côté que l’on choisit.
Le visage véritable de notre onze
Mais en fait, qu’en est-il véritablement ? Les langues ne commencent à se délier qu’à la veille des rassemblements organisés pour préparer une rencontre, qu’elle soit officielle ou amicale. Les matchs amicaux que l’on concocte sont autant d’occasions de revoir une partie de l’effectif.
Il n’en demeure pas moins que ces apparitions ne donnent jamais le visage véritable de notre onze. Les joueurs, débarrassés de toute pression du résultat, se livrent pour redorer leur blason ou pour tout simplement remplir leur contrat. Certains effectivement se livrent corps et âme. Ils ne trichent pas et donnent l’impression qu’ils sont heureux d’avoir accompli leur mission, une fois, une balle décisive servie ou un but marqué. Contrairement à ceux qui font tout pour durer en jouant à l’économie et en usant de ficelles dont ils ont le secret.
C’est le cas de ceux qui n’ont plus rien à donner en dépit de la réussite qu’ils affichent dans leurs clubs respectifs.
L’équipe nationale devient de ce fait un recours pour garder une sorte de bonification qui sert leurs propres intérêts.
L’équipe de Tunisie actuelle, tout le monde en convient, possède des ressources. On a réussi à réunir des éléments d’un niveau très acceptable, mais, franchement, nous ne comptons aucun joueur qui pourrait se targuer d’être un jour l’auteur d’un coup de génie à même de changer la physionomie d’une rencontre. Les Messi, Ronaldo et Neymar ne courent pas les rues.
A revoir les matchs joués, nous constatons que l’écart se resserre de plus en plus entre notre équipe et celles que nous sommes appelées à rencontrer dans les différentes compétitions africaines ou pour des éliminatoires de coupe du monde.
Ceux qui paient le plus
De toutes les façons, cette préparation est loin d’être l’apanage du seul sélectionneur qui n’agit que pour mettre au point une stratégie ou des dispositions à prendre la veille d’une rencontre. L’éparpillement des joueurs aux quatre coins du globe, les méthodes auxquelles sont assujettis les uns et les autres au sein de leurs clubs respectifs en sont la cause. Ce n’est point une exception tunisienne. Les meilleurs de tous les pays du monde sont au service de ceux qui paient le plus. Il n’est plus question de choix sentimentaux ou d’appartenance logique, depuis que l’Arabie saoudite s’est décidée à relancer le football dans son pays et faire de sa Ligue pro l’une des meilleures du monde. On ne parlera plus autant de Manchester, du Real ou du PSG. C’est la règle du jeu. Le monde politique est en train de basculer sous l’effet implacable d’autres pesanteurs. Le monde sportif en fait autant.Ces clubs qui ont bercé la jeunesse de la planète, durant des dizaines d’années, commencent à ressentir qu’ils vivent les dernières étincelles de leur époque. Leurs vedettes s’en vont. Leur organisation s’embrouille. Leurs avancées technologiques s’estompent. Leur force de persuasion n’est plus opérante. C’est pour eux le moment de céder la scène des opérations à ceux qui sont en possession de moyens plus conséquents et plus…. convaincants. Et ce n’est pas fini, car le jour où ces forces montantes du Golfe mettront en place une logistique conséquente pour prendre au berceau les meilleurs jeunes africains, ce sera véritablement une nouvelle façon de concevoir l’organisation des plus grandes compétitions mondiales.
Indépendamment de cet aspect et à notre modeste niveau, il ne faudrait pas se leurrer. Les derniers résultats de nos différentes équipes en compétitions africaines ont été laborieux. La prestation de notre sélection U20 l’a été davantage.
Cette dernière, censée être le « réservoir » de l’équipe A, semble exister hors du temps. Est-on vraiment convaincu que ces jeunes apparaîtront un jour en équipe A ? Peut-être quelques-uns, mais il serait impropre de parler de « réservoir » lorsque l’attention ne se porte ,le plus souvent, que sur ceux qui viendront d’autres écoles, mieux formés, en meilleure condition, nantis d’une volonté évidente de servir cette équipe nationale qui leur rappelle leurs racines.Il n’est donc pas opportun d’ affirmer des assurances pareilles alors que la formation de nos jeunes reste aléatoire et que l’on n’arrête pas de courir derrière de nouveaux joueurs, ayant des liens avec leur patrie d’origine, qui se pointent et frappent à la porte de la sélection.
C’est le cas aussi de ceux qui sont de retour après un passage quelque part (où ils n’ont pas convaincu) et qui ambitionnent de retrouver cette sélection.Toujours est-il que quel que soit le mobile, si la place à prendre est au plus méritant, cela ne pose pas de problème. Et si nous soulevons cette question, c’est parce que certains joueurs semblent indéboulonnables, en dépit de leur réussite toute subjective, qui leur permet grâce à un but ou une passe, de garder des prérogatives qui leur assurent le droit d’intervenir, de choisir, d’avoir toutes les cartes en mains.
Leur « service »de presse est assez efficace pour faire circuler sur le web, en boucle, quelques-unes de leurs phases de jeu pour convaincre les plus réticents.Et on continue de les convoquer. En bons agents marketing ils possèdent « l’art du mentir vrai, aux fins de faire parler de soi ».
Les dés sont pipés
Dans ce cas, comment accorder de l’attention à ce que l’on veut bien déclarer en conférence de presse ou après le match pour assurer que ceux qui frappent à la porte de la sélection ont des chances égales ? Ces jeunes ne sont-ils pas en droit de croire que les dés sont pipés dès le début ?
Pour mettre un terme à ce dilemme, il y a forcément deux choix à faire : ou laisser la sélection sous la pression interne (suivez le regard et vous comprendrez) ou externe (activisme des joueurs qui pensent qu’ils sont indispensables) et continuer sur cette voie non passante.
Ou, le plus simplement du monde, construire un ensemble réellement compétitif avec cet effectif qui a fière allure et qui pourrait avoir recours à ces éléments qui s’imposent au sein de leurs clubs à haut niveau.
Les Talbi, Mejbri et autres Achouri, Jebali,ou Laidouni pourront dès lors s’exprimer sur le terrain et avoir la possibilité de servir de repère pour le reste de leurs camarades. Le match amical livré à nos voisins algériens a mis en exergue les potentialités de l’équipe de Tunisie. Mais, dans le jargon sportif, « une performance n’est une, que lorsqu’elle est répétée plusieurs fois de suite »..
Les prochaines rencontres amicales et officielles (le Botswana en éliminatoires de la CAN 2024 (7 septembre), l’Egypte en amical (12 septembre au Caire), la Corée du Sud à Séoul le vendredi 13 octobre, suivi d’un autre match le 17 du même mois contre l’équipe japonaise à Kobe (nos amis japonais tiennent à leur revanche !), pourraient nous éclairer davantage.
A travers les choix du sélectionneur, nous pourrions saisir aussi bien ses intentions profondes que celles de ses employeurs.
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