Karim Krifa : des candidats à la présidentielle ont voulu négocier le soutien du PDL contre la libération d'Abir Moussi
Karim Krifa, le membre du comité de défense de la présidente du PDL (Parti destourien libre), Abir Moussi, est intervenu mercredi 30 octobre 2024 dans l’émission «Politika» sur les ondes de Jawhara FM afin d’aborder l’évolution de l’affaire d’Abir Moussi, l’évolution de son dossier judiciaire et finalement le bilan de la scène politique actuelle.
Lors de son intervention, Karim Krifa a vivement critiqué les médias, les accusant de maintenir le dossier de l’affaire d’Abir Moussi dans l’ombre. Selon lui, l’attitude de certains médias vise à empêcher que la vérité soit mise en lumière.
Abir Moussi a été condamnée à deux ans de prison, une sentence justifiée par l’application de l’article 24 du décret 54. Elle a également été, selon Krifa, méthodiquement exclue de l’élection présidentielle du 6 octobre 2024, en dépit du fait qu’elle ait présenté sa candidature à l’Instance supérieure indépendante pour les élections (Isie), sans toutefois recevoir de réponse à ce jour.
Pour faire face à cette situation, un livre, disponible en version papier et numérique, a été annoncé par Krifa. Ce livre vise à documenter l’ensemble des faits relatifs à l’exclusion de Moussi et à éclairer l’opinion publique.
Par ailleurs, Imed Kouraichi, dans une démarche officielle, a sollicité l’Isie pour clarifier qu’il ne s’était pas porté candidat à cette élection, afin d’éviter toute confusion. Une plainte a également été déposée pour l’annulation du procès-verbal du 10 août. Selon Krifa, le tribunal administratif a reconnu la candidature de Moussi, confirmant ainsi sa légitimité dans le processus électoral.
Karim Krifa a également mentionné les difficultés que traverse Abir Moussi depuis sa détention. Il affirme lui rendre visite quotidiennement et décrit son état de santé comme fluctuant. En dépit du fait qu’elle se montre forte moralement et reste impliquée dans ses affaires judiciaires, elle connaît des hauts et des bas et attend encore que des équipements médicaux lui soient fournis pour alléger sa condition.
L’un des épisodes les plus douloureux, selon Krifa, est le refus d’un parloir spécial pour qu’elle puisse voir sa fille, qui a récemment décroché son baccalauréat. Cette interdiction l’a privée de l’occasion de la serrer dans ses bras pour célébrer ce moment important. Abir Moussi, souligne-t-il, doit se contenter de traitements antidouleur au quotidien, et ses demandes pour entamer des démarches de délégation de signature à un proche restent sans suite.
Sur le plan judiciaire, Krifa indique que ses affaires sont en suspens, en dépit du fait qu’un appel contre la sentence du tribunal de première instance ait été déposé. Un procès est d’ailleurs prévu le vendredi 1er novembre 2024, et Krifa espère que la justice abordera cette affaire avec équité.
L’invité de «Politika» a également abordé les circonstances de l’arrestation d’Abir Moussi, précisant que c’est Farouk Bouasker qui a déposé la plainte l’ayant conduite en prison. Les propos incriminés, a-t-il rappelé, avaient été tenus lors d’une conférence de presse, ce qui souligne selon lui l’importance de protéger la liberté d’expression dans le cadre politique. Krifa a ainsi dénoncé le décret 54, qu’il considère comme une menace sérieuse pour les droits et libertés fondamentales en Tunisie, appelant à son abrogation.
Il a souligné que la critique du processus électoral est un droit légitime pour tout leader politique et a rappelé le rôle du Parti destourien libre (PDL) pendant la « décennie noire », une période où le PDL a activement milité pour faire tomber le règne des Frères musulmans en Tunisie. Avant le 25 juillet, seize députés du PDL avaient signé une pétition appelant à la dissolution de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) et à l’élaboration d’une feuille de route pour la Tunisie.
Krifa a également évoqué le rôle du PDL dans la préservation de la présidence de la République, affirmant qu’Ennahdha souhaitait écarter Kaïs Saïed du pouvoir, un plan que le PDL aurait contrecarré. Il a critiqué l’ambiguïté de certains anciens dirigeants de la décennie écoulée, affirmant que certains d’entre eux, autrefois au pouvoir, se retrouvent aujourd’hui « accidentellement dans l’opposition ».
Enfin, Krifa a révélé que des candidats à l’élection présidentielle du 6 octobre 2024 auraient tenté de conclure un marché avec le PDL : en échange du soutien du parti, ils promettaient de libérer Abir Moussi une fois élus.
Pour le PDL, l’élection présidentielle ne constitue pas une priorité, et le parti se focalise sur d’autres perspectives politiques. Karim Krifa a affirmé que même si Abir Moussi avait participé aux élections sans succès, le PDL aurait accepté les résultats, car le parti se projette désormais au-delà des calculs électoraux.
En abordant la question de la justice, en réponse à Fatma Karrai, Krifa a affirmé que l’indépendance judiciaire repose uniquement sur la volonté des juges et qu’il ne dispose pas de la compétence d’évaluation de l’indépendance du pouvoir judiciaire. Toutefois, il a dénoncé les actions d’un juge d’instruction qui chercherait à inculper Abir Moussi avec un risque de condamnation à vingt ans de prison pour avoir affirmé que les élections doivent respecter les normes internationales.
Le membre du comité de défense de Abir Moussi a réitéré son appel à l’abrogation du décret 117 et de toutes les lois d’exception qui en découlent, notamment le décret 54, et a souligné la nécessité d’instaurer des institutions constitutionnelles. Il a rappelé qu’une volonté politique serait nécessaire pour supprimer le décret 54, comme ce fut le cas pour l’amendement de la loi électorale, effectué en seulement 72 heures. Il a également ajouté que, selon lui, avant le 25 juillet, Rached Ghannouchi représentait le véritable obstacle et danger et non Kaïs Saïed. Il a critiqué la nomination par Ennahdha de candidats à la Cour constitutionnelle, qu’il estime proches d’associations dirigées par Youssef Al Qaradawi, et a précisé que le PDL était le seul parti à exiger un contrôle des financements de ces associations. En soutien à cette politique, le PDL avait même mis ses députés « aux ordres » de Kaïs Saïed.
Enfin, en réponse à une question sur les formes de protestation adoptées par Abir Moussi et les députés du PDL, Karim Krifa a de nouveau attaqué les médias. Il a critiqué leur choix de mettre en avant l’utilisation de gilets pare-balles, de casques et les accrochages à l’ARP, tout en négligeant les congrès politiques, économiques et sociaux organisés par le parti.
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