Inclusion financière | Bilel Darnaoui, Directeur Général de Monétique Tunisie à La Presse : «La monnaie électronique vecteur incontournable de l’inclusion financière»
«Une disparité a été constatée en termes de genre. En effet, les femmes sont moins incluses financièrement que les hommes et les zones côtières sont mieux couvertes que celles de l’intérieur».
Quelle est votre perception de la situation générale de l’Inclusion financière en Tunisie ?
Si on tient compte des dernières études en date en la matière, le taux d’inclusion financière avoisine les 60%, concernant les Tunisiens qui disposent d’un compte bancaire ou postal et qui sont clients dans une Institution de micro-finance (IMF) ou qui consomment des produits d’assurance. Ce taux est loin de celui enregistré dans les pays développés, mais reste meilleur que la moyenne africaine.
Ce taux est aussi à ajuster avec ceux de l’utilisation de ces comptes financiers ou de ceux de l’usage des différents moyens de paiement.
Une disparité aussi a été constatée en termes de genre. En effet, les femmes sont moins incluses financièrement que les hommes et les zones côtières sont mieux couvertes que celles de l’intérieur.
Quels sont les atouts majeurs pour assurer l’inclusion financière ?
Je vais en citer trois principaux que je considère plus en avant que d’autres :
– un socle réglementaire attractif et une infrastructure technologique évolutive et sécurisée
– le développement de la culture et la communication financières
– le développement des cas d’usage et l’amélioration de l’expérience client.
Quels objectifs pour la stratégie nationale d’inclusion financière ? Comment déployer cette stratégie ?
Outre l’inclusion financière, un autre objectif stratégique est aussi à atteindre : la réduction du cash en circulation.
Ces deux objectifs vont de pair. Pour les atteindre, il faut mettre en place un socle règlementaire solide, évolutif et flexible qui permet à tous les acteurs (banques, IMF, EDP, etc.) de développer une offre de services diversifiée, à valeur ajoutée, tout en assurant l’interopérabilité.
Il faut aussi encourager au maximum l’éclosion de nouveaux acteurs financiers qui permettent une couverture géographique optimale, dont principalement des établissements de paiement qui ont vu le jour depuis l’année dernière.
Il est nécessaire de développer un business model attractif, qui permet de rémunérer, à leur juste valeur, les différents intervenants dans l’écosystème de paiement et d’assurer sa pérennité. A ceci s’ajoutent le développement de la culture financière et la mise en place d’une stratégie de communication durable.
Il faut également développer les cas d’usage attractifs (le paiement GtoP (gouvernement vers le particulier, les transferts sociaux, les subventions, le PtoG : paiement de factures, les redevances municipales, la vignette auto et le BtoB (règlements fournisseurs…), ainsi que l’infrastructure et les points d’acceptation (les agents payeurs).
La monnaie électronique peut être un tremplin pour une meilleure inclusion financière et un outil pour la digitalisation d’au moins une partie des services financiers. Qu’en pensez-vous ?
Effectivement, la monnaie électronique est le vecteur incontournable de l’inclusion financière parce qu’elle favorise une meilleure expérience client, une diversification de l’offre de service, un meilleur rapport qualité/coût…
D’autres avantages sont aussi à mettre en exergue dont une meilleure traçabilité des opérations financières, une économie de coûts de traitement des opérations, etc.
La finance digitale peut-elle transformer les perspectives économiques des pays émergents ?
L’impact est multiple : l’éclosion fulgurante des fintechs dans ces pays qui ont permis de développer des offres innovantes et de répondre aux besoins des usagers (clients finaux, administrations, banques, etc.) à moindre coût.
Autres impacts à retenir : la réduction de l’économie informelle, une meilleure allocation des transferts sociaux et de traçabilité des opérations (impacts positifs sur le revenu de l’Etat) et de recouvrement, une réduction des coûts des transactions financières, et un développement de la responsabilité environnementale et sociétale des acteurs économiques.
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