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Gaspillage et rareté des ressources en eau : Les citoyens ne sont pas seuls en cause !

 

Entre 35 et 40 % des quantités d’eau distribuées par la Sonede sont perdues dans des fuites de canalisations. Un gaspillage énorme dans un pays qui vit depuis 25 années en situation de pénurie d’eau avec moins de 377 m3 par habitant par an.

La situation de l’eau est vraiment critique en Tunisie. Avec une baisse continue des niveaux des barrages et face à un stress hydrique accentué, l’eau se raréfie jour après l’autre. Si à tort ou à raison on a tendance à accuser les comportements insoucieux et irresponsables des citoyens, les autorités ont également une part de responsabilité. D’ailleurs, le dossier, voire cette urgence est traité au plus haut niveau de l’Etat. Mardi 2 juillet 2024, le Président de la République, Kaïs Saïed, a décidé de démettre Ahmed Soula de ses fonctions en tant que président-directeur général de la Société nationale d’exploitation et de distribution des eaux (Sonede).

Un limogeage qui intervient dans un contexte où la Sonede fait face à des critiques récentes sur la qualité et la régularité de son service. Les raisons précises de cette décision n’ont pas été détaillées dans le communiqué officiel, mais il est clair que le gouvernement cherche à apporter des changements significatifs pour mieux répondre aux besoins des citoyens. Cette décision intervient également quelques jours après le limogeage, par le Chef de l’Etat, du chef du district d’El Manar de la Sonede suite à une importante fuite d’eau potable provenant d’une conduite.

Le message du Président de la République est donc clair. Pour lui, la détérioration de la situation de l’eau en Tunisie implique également nos responsables et non pas seulement le citoyen qui est contraint, à chaque fois, de vivre un été difficile marqué par les pénuries d’eau.

Ces derniers rebondissements qui interviennent alors que l’été a à peine commencé ouvre le grand dossier du réseau de conduites de la Sonede et de son entretien. En effet, loin du stress hydrique et des comportements des citoyens, cette difficile situation d’accès à l’eau, critique pour certains, résulte également du mauvais état du réseau de canalisations de cette société publique.

En effet, entre 35 et 40 % des quantités d’eau distribuées par la Sonede sont perdues dans des fuites de canalisations. Un gaspillage énorme dans un pays qui vit, « depuis 25 années en situation de pénurie d’eau absolue avec moins de 377 m3 par habitant par an », selon l’indice de stress hydrique de Falkenmark, publié en 2020.

Plus récemment, c’est le secrétaire général de la Fédération des eaux relevant de l’Ugtt, Houcine Cherni, qui confirme ces estimations. Selon ses dires, la Sonede enregistre des pertes à hauteur de 40% des quantités d’eau en raison aussi du détournement et des connexions clandestines que subit son réseau.

Des investissements nécessaires

Contacté à cet effet, l’expert en développement et ressources hydriques à l’Observatoire tunisien de l’eau, Houcine Rehili, fait un constat accablant. Affirmant que cette crise prend une dimension structurelle, il appelle donc à des solutions radicales. Houcine Rehili assure qu’il est grand temps de renouveler les réseaux d’eau en Tunisie, en précisant que dans certaines régions, jusqu’à 50 % de l’eau distribuée est gaspillée.

L’expert a souligné l’absence de moyens logistiques dans la plupart des branches locales de la Sonede, ce qui entrave leur capacité à effectuer les opérations de maintenance et de surveillance nécessaires. « Il faut mobiliser de grands investissements à l’échelle nationale pour entretenir et moderniser les conduites de la Sonede. Selon les estimations, les pertes dues au mauvais état des conduites est de 20% alors qu’il atteint 50% dans certaines régions », a-t-il regretté. Et d’ajouter que, dans un ordre de priorité, il est plus judicieux de lancer d’importants travaux au niveau de ces conduites. « Investir dans la modernisation de ce réseau nous permettra de préserver l’eau d’une manière extrêmement importante. Cela équivaut à la construction d’un nouveau barrage si on parvient à faire baisser considérablement le niveau de gaspillage », a-t-il insisté.

Houcine Rehili rappelle également que la préservation de l’eau doit se faire surtout dans le domaine de l’agriculture qui en est le plus grand consommateur. Autant rappeler que l’agriculture est le secteur le plus hydrovore, avec des prélèvements qui culminent à plus de 75 % de la consommation totale.

Compte tenu de l’importance de l’utilisation de l’eau à des fins agricoles, le remplacement de l’eau potable par des eaux usées traitées et une efficacité accrue de l’utilisation des ressources en eau par des mesures axées sur la demande, notamment la modernisation des systèmes d’irrigation, permettent de bien maîtriser la situation.

Des défis énormes

Inutile de rappeler que la Tunisie est confrontée à des défis importants en matière de gestion de l’eau en raison de son climat aride et semi-aride, ainsi que de la croissance rapide de sa population et de son économie.

Selon les rapports de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la Tunisie est l’un des pays les plus pauvres en eau du monde, avec une disponibilité en eau de moins de 400 mètres cubes par personne et par an, soit bien en dessous de la norme de stress hydrique de 1000 mètres cubes par personne et par an.

De plus, la Tunisie est confrontée à des problèmes de qualité de l’eau, avec des niveaux élevés de pollution des eaux souterraines et de surface. Les sources d’eau naturelles sont souvent surexploitées et épuisées, ce qui entraîne une diminution de la quantité et de la qualité de l’eau disponible.

Autant dire que l’Etat a mis en place un certain nombre de politiques et de programmes pour améliorer la gestion de l’eau, y compris la construction de barrages et de stations de dessalement d’eau de mer, l’adoption de techniques d’irrigation plus efficaces et l’encouragement de pratiques de gestion de l’eau durables. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour garantir une utilisation efficace et durable de l’eau en Tunisie.

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