Fonds d’assurances pour la perte d’emploi : Le Président de la République passe à la vitesse supérieure
Par manque de volonté et pour des calculs certainement politiques, le projet de fonds d’assurances pour la perte d’emploi a été toujours renvoyé aux calendes grecques.
Indubitablement, la justice sociale a été reléguée au second plan lors de la décennie noire qui a marqué une triste période de la Tunisie où les décisions des politicards de tout acabit et de pseudo-parlementaires n’étaient mues que par des considérations qui ne prenaient pas en compte les doléances de ceux qui aspiraient à vivre dans la dignité et rêvaient d’un emploi décent, ceux-là mêmes qui ont provoqué le cataclysme en 2011. Plus les années passaient, plus le pays s’engouffrait dans le dédale de la dette et plus les décideurs à cette époque semblaient comme paralysés sous l’emprise de l’ingérence de puissances étrangères. Tous les grands projets annoncés le plus souvent en fanfare n’ont jamais vu le jour, dont, à titre d’exemple, celui relatif au fonds d’assurances pour les personnes en situation de chômage.
Rien que des promesses depuis 2013
La question de la création de ce fonds d’assurances chômage a été toujours abordée par les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir avant le 25 juillet 2021, mais n’a pas été suivie de concrétisation. Depuis 2013, la Troïka a signé le texte du Contrat social au siège de l’Assemblée nationale constituante qui fait état de la nécessité de créer un fonds d’assurances contre la perte d’emploi financé par les partenaires sociaux. Et pourtant, les cinq chapitres du nouveau Contrat social portaient en particulier sur la protection sociale et l’institutionnalisation du dialogue social.
Six ans plus tard, et plus précisément en 2019, le ministre des Affaires sociales avait confirmé que le gouvernement œuvrait à mettre à exécution ce projet avec le concours du Conseil national du dialogue social qui a vu le jour un an auparavant. Toutefois, aucun gouvernement n’a été capable de traduire sur le terrain la création d’un aussi important projet. A cette époque, cette caisse pour le chômage devrait verser une pension mensuelle et assurer une couverture sociale aux salariés licenciés pour des raisons économiques dans l’attente de leur réinsertion professionnelle.
D’une année à une autre, le projet a été jeté aux oubliettes. Les gouvernements qui se sont succédé depuis 2011 avaient cette tradition de renvoyer aux calendes grecques les projets susceptibles de tendre la perche aux personnes vivant dans la précarité. Selon la classe politique qui s’est emparée du pouvoir après la chute de l’ancien régime, le fonds d’assurances chômage pouvait attendre. Les partis politiques au pouvoir avaient d’autres ambitions en dépit de la montée du nombre de chômeurs, la détérioration de leur situation financière et la montée de la grogne sociale et de la défiance à l’égard de la classe politique. A titre de rappel, en mai 2021, les sondages d’opinion publiés par Sigma Conseil sont venus confirmer le grand taux de pessimisme des Tunisiens (90%). Quant au taux de confiance à l’égard des institutions, l’Assemblée des représentants du peuple s’est classée à la dernière position avec 19%. Pour 77% des Tunisiens, Rached Ghannouchi, ancien président de l’ARP, n’inspirait pas confiance.
Un projet exhumé par le locataire de Carthage
Conscient de la grande importance de ce projet, le Chef de l’Etat Kaïs Saïed avait abordé cette question avec un fin connaisseur des dossiers sociaux qui a été durant plusieurs années à la tête de différentes directions au ministère des Affaires sociales, à savoir le Chef du gouvernement, Kamel Maddouri. En effet, le président de la République avait souligné à cette occasion la nécessité de créer un fonds d’assurances pour la perte d’emploi pour des raisons économiques. Kaïs Saïed a également évoqué d’autres questions liées à la situation sociale et économique en général, insistant à cet égard sur le fait que « la politique suivie par la Tunisie doit être fondée sur une nouvelle approche, différente des approches et concepts antérieurs, en rompant définitivement avec le passé et ses souffrances, ainsi qu’avec les maux causés par l’abandon des services publics essentiels, tels que l’éducation, la santé et le transport, depuis des décennies ». Un fonds pour la protection sociale des ouvrières dans le secteur agricole devrait aussi voir le jour.
Avec le projet de loi de finances au titre de l’année prochaine, la création de ce fonds refait surface, d’autant que le Chef de l’Etat accorde une importance cruciale à la réalisation de la justice sociale. D’après un communiqué publié par la Présidence de la République, le Chef de l’Etat a souligné, notamment « la nécessité de revoir un certain nombre de droits de douane et de créer un fonds spécial d’assurances pour la perte d’emploi et un fonds pour la protection sociale des ouvrières dans le secteur agricole ». Cette rencontre a aussi permis d’évoquer un projet de création des lignes de financement des personnes ayant des besoins spécifiques pour lancer des projets qui leur garantissent une intégration totale dans la société, selon les dispositions de l’article 54 de la Constitution, étant donné que l’Etat est tenu de protéger les personnes handicapées contre toute discrimination.
Dans ce même contexte, le président de la République a indiqué que « la justice et l’équité exigent que chacun contribue, sous un régime fiscal transparent et équitable basé sur une fiscalité progressive, dont l’efficacité a été prouvée à travers de nombreuses expériences comparatives ».
Il a également souligné qu’une nouvelle relation entre le citoyen et l’administration basée sur la confiance est le premier prélude dans le domaine fiscal et dans tous les autres domaines.
Le nouveau fonds allègera les dettes des caisses sociales
Selon la déclaration de l’expert Badreddine Smaoui à une radio privée, la création de ce fonds pourrait voir le jour avec l’adoption du projet de la nouvelle loi de finances pour l’année 2025. Selon ses dires, le fonds en question ne concernera que les personnes qui ont perdu leur emploi suite à des difficultés économiques observées dans leurs entreprises et non les employés qui avaient été révoqués ou avaient présenté leur démission.
L’expert souligne qu’un projet de cette envergure requiert, en parallèle, un dialogue approfondi avec toutes les parties prenantes en vue de réunir les facteurs nécessaires à sa réussite. Le financement de ce fonds sera assuré par trois parties, à savoir l’employeur, l’employé et l’état.
Sa création est de nature à alléger le fardeau de la dette des caisses sociales, conclut-il.
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