Filière oléicole | Mourad Ben Hassine, P.D.G. du CEPEX à La Presse : “La valeur des exportations d’huile d’olive peut atteindre 10 milliards de dinars au cours des trois prochaines années”
Baptisé “or vert”, l’huile d’olive est devenue l’épine dorsale de notre balance alimentaire et commerciale. Avec des prix à l’international en hausse, ce breuvage “béni”, comme aiment l’appeler les Tunisiens, constitue une manne financière pour le pays. Pour battre ses concurrents, l’huile d’olive tunisienne, de très bonne qualité, doit conquérir de nouveaux marchés tout en conservant sa place sur les marchés, traditionnels. Rencontré en marge de la table ronde organisée, récemment, pour présenter les opportunités de commercialisation de l’huile d’olive sur le marché chinois, Mourad Ben Hassine, P.-d.g. du Cepex, apporte son éclairage.
A travers cette journée, le Cepex souhaite orienter l’intérêt des exportateurs d’huile d’olive vers le marché chinois. Pourquoi ce marché ? Quelles sont ses potentialités ?
Tout d’abord, la Chine est l’une des plus grandes puissances économiques à l’échelle mondiale. Avec une population de 1,4 milliard de consommateurs et de nouvelles habitudes de consommation, notamment chez les jeunes générations qui s’orientent de plus en plus vers des produits sains comme l’huile d’olive, la Chine constitue un marché porteur. Il y a donc un potentiel réel.
Cependant, si l’on observe les chiffres, on constate que ce pays n’accapare que 1,3% des importations mondiales d’huile d’olive, ce qui laisse entrevoir un potentiel énorme, d’autant plus que de plus en plus de consommateurs s’intéressent à ce produit. Pour la Tunisie, le potentiel inexploité en matière d’exportation d’huile d’olive vers la Chine s’élève à 22 millions de dollars. Il s’agit donc d’une opportunité pour notre huile d’olive de conquérir de nouveaux débouchés sur les marchés internationaux.
Quelles sont les spécificités de ce marché et comment la Tunisie peut-elle en saisir les opportunités ?
Il est vrai que la Chine représente un marché très particulier en ce qui concerne les produits alimentaires et agroalimentaires. Notons, dans ce contexte, que le pays met à disposition des exportateurs une plateforme numérique au niveau de la douane. Les entreprises doivent donc s’y inscrire. Concernant l’huile d’olive, le Cepex en est le point focal et accompagne les entreprises souhaitant s’inscrire sur cette plateforme. Ce rôle d’accompagnateur inclut également leur soutien lors de leur participation à des salons, l’organisation de rencontres professionnelles, l’invitation d’acheteurs, ainsi que l’organisation de visites de délégations d’hommes d’affaires en Chine ou sur d’autres marchés.
Notre mission consiste à établir des connexions entre les opérateurs tunisiens et leurs homologues, surtout lorsqu’il s’agit d’un marché particulier comme celui de la Chine.
Par ailleurs, les plateformes électroniques et les réseaux sociaux sont des outils technologiques performants qui peuvent aider les exportateurs tunisiens à pénétrer ce marché. Lors de cette table ronde, nous avons appris qu’un milliard de Chinois utilisent la plateforme WeChat. Il ne s’agit pas d’une application que seulement les jeunes utilisent, mais c’est plutôt une plateforme dédiée à tout le monde.
C’est devenu une étape incontournable pour toute entreprise souhaitant commercialiser ses produits en Chine. Cette plateforme est utilisée par les Chinois de tous âges et de toutes conditions sociales. Il faudra donc aborder ce marché avec une stratégie spécifique, en misant sur les outils technologiques pour le conquérir. Nous disposons d’un potentiel énorme, car les quantités d’huile d’olive exportées restent en deçà de ce que le marché pourrait absorber.
Ça c’est pour le marché chinois. Pour les marchés traditionnels, la Tunisie conserve-t-elle sa place ?
En 2023, la Tunisie était le quatrième exportateur d’huile d’olive au monde, avec environ 200.000 t exportées, dont seulement 20.000 t d’huile conditionnée. En 2023, nous avons atteint un record de recettes d’exportation d’huile d’olive, qui représente près de 50% de la valeur de nos exportations agricoles et agroalimentaires.
Pour 2024, nous avons déjà dépassé les 5 milliards de dinars de valeur d’exportation pour l’huile d’olive. Les récoltes s’améliorent d’une année à l’autre. La qualité aussi. Je pense que durant les trois prochaines années, on peut même atteindre les 10 milliards de dinars d’exportation d’huile d’olive. C’est un produit qu’il va falloir valoriser. Quand on parle d’huile d’olive, c’est toute une chaîne de valeur. A partir de l’olivier, on peut extraire d’autres produits qu’on peut valoriser. Ce qui permet d’avoir une chaîne de valeur très diversifiée. Mais bien sûr, l’huile d’olive reste le produit principal.
Pour atteindre de meilleures performances, on est appelé à mieux valoriser notre huile d’olive ?
Tout à fait, il y a le volet valorisation, mais il y a aussi le volet négociations commerciales avec nos partenaires économiques pour pouvoir obtenir plus de quotas pour l’huile d’olive conditionnée. Il y a certains marchés où il n’y a pas de contraintes à ce niveau-là. Le système des quotas est appliqué par le marché européen parce qu’il comporte de grands concurrents. Mais sur d’autres marchés que ce soit le marché nord-américain, le Canada, la Chine, il y a d’autres réglementations à prendre en considération. Je pense que les entreprises tunisiennes sont performantes. Elles sont au diapason de ces normes-là et peuvent répondre facilement aux exigences de ces marchés.
Pour notre premier marché traditionnel qui est l’Union européenne, existe-t-il des contraintes phytosanitaires ?
Il y a des exigences réglementaires. Mais il y a, de notre côté, un contrôle technique strict à l’exportation qui est assuré par l’Insspa (l’Instance nationale de la sécurité sanitaire des produits alimentaires). Notre huile exportée répond aux normes européennes. Le Packtec assure également un accompagnement des exportateurs d’huile d’olive conditionnée, outre le fonds Foprodex qui est géré par le Cepex et qui appuie les opérateurs qui commercialisent l’huile en vrac. Tous ces mécanismes-là permettent, en effet, de renforcer la compétitivité de nos exportations sur les marchés internationaux.
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