Exigences et attentes autour du CA : Briser les chaînes invisibles
Si « les promesses n’engagent que ceux qui y croient », la seule promesse qui devrait être faite, c’est celle de redonner aux supporters le «goût du CA». Un mélange de dignité, d’orgueil retrouvé et de fierté. Bref, que le Club Africain fasse sa vie sans penser à celle des autres !
En début de saison, à la faveur d’un départ «placé » sous le signe de l’austérité, le CA n’a pas manqué d’effrayer ses supporters et les observateurs de tout bord. La dernière saison ayant été globalement moyenne, certains avaient même qualifié le CA de désormais club moyen. Mais qu’en est-il vraiment, après-coup? Rembobinons tout d’abord : Au CA, le changement en haut de la pyramide a été favorablement accueilli avec l’intronisation d’un exécutif composé de jeunes passionnés qui en connaissent un rayon sur le club de Bab Jedid. Nantis d’une solide expérience au sein des différentes commissions et sections clubistes qui ont défilé, le CA pouvait compter sur des dirigeants qui ont, pour la plupart, exercé des années et servi fidèlement le CA. Evidemment, il fallait surtout composer avec le gouffre financier hérité des bureaux qui se sont succédé, celui de Slim Riahi et Abdessalem Younsi en particulier. C’est donc dans ce contexte particulier que la reprise a été actée. Et si elle a formellement concerné les footballeurs, elle a surtout dépassé le cadre du terrain vert. En clair, outre une rentrée qui a consisté en un jeu de pronostic pour la saison qui s’annonce, il fallait forcément aussi composer avec l’appréciation qu’ont les fans de « leur CA », l’exigence autour du club, l’attente, la passion et surtout l’image qui ne sont finalement pas mesurés convenablement.
« Les promesses n’engagent que ceux qui y croient »
En l’état donc, le CA est en réalité un club capricieux et tourmenté. Le passé et la passion comptent, bien sûr. Mais une juste appréciation du « présent-passé proche » doit permettre de relativiser la déception, ce sentiment trop souvent éprouvé par les supporters du club, ces dernières annuités. Au CA, en général, abstraction faite de l’interdiction de recruter qui frappe le club ces dernières années, on ne sait jamais vraiment si les joueurs qui arrivent vont réussir, si les jeunes du cru vont s’épanouir ou si les tauliers vont se bonifier. Foncièrement, tout ce beau monde n’offre que peu de garantie au vu des résultats, tout simplement parce qu’ils n’en ont pas ! Et c’est pour cela qu’à intervalles réguliers, le CA se retrouve souvent dans une forme d’inconnue. Aujourd’hui, comme dit l’adage, « les promesses n’engagent que ceux qui y croient », et la seule promesse qui devrait être faite en l’état, c’est celle de redonner aux supporters le «goût du CA». Un mélange de dignité, d’orgueil retrouvé et de fierté. Bref, que le CA fasse sa vie sans penser à celle des autres ! Aujourd’hui, la « culture grand club » est une chose, la réalité de celle-ci sur le terrain en est une autre. Inutile cependant de tenter de définir avec précision ce qu’est un grand club, voire analyser le football tunisien en strates, en différentes échelles de niveau et de puissance pour mieux le découper !
Pas d’étude de cas donc en prenant le CA pour « échantillon représentatif », mais juste une introspection qui se base cependant sur des segments et des précisions importantes. Le gratin absolu concernerait ceux qui disposent d’une attractivité exceptionnelle, de moyens faramineux et d’un effectif jugé solide. Et là, le CA a accusé un retard considérable pour des raisons connues de tous. Un cran en dessous, le CA a ainsi payé le prix fort de son imprudence et de ses choix hasardeux, le tout conjugué à un défaut de pérennité managériale et à une instabilité chronique qui ne permet pas de se projeter (souvent, on efface tout et on repart d’une page blanche). Ce sont là les deux indicateurs qui font osciller le CA entre la catégorie des valeurs sûres et celle qui se trouve en dessous (outsider ambitieux). En progression tantôt, en régression de temps à autre, le CA se retrouve constamment en reconstruction, au rang de club au « potentiel-progression » intéressant sans plus.
Rien n’est gravé dans le marbre
Aussi frustrant soit-il pour les inconditionnels que l’on en est encore et toujours à parler de potentiel clubiste, sans pour autant atteindre ce plein potentiel de performance vers la fin, quand, au final, les ambitions sont rangées dans le grenier. Les arguments, en ce sens, sont légion, et il est forcément temps de tordre le cou à la fatalité et forcer son destin à terme. Au CA, aujourd’hui, il est temps de briser les chaînes invisibles parce que toute situation ne semble pas destinée à demeurer figée ! Volet « board Clubiste », aussi, en particulier même, il serait inutile d’opérer une grande valse dans la gestion sportive du club, mais de continuer à s’employer avec détermination et fermeté même tantôt. Viendra par la suite le temps de la « cueillette », de la gloire, de l’honneur retrouvé à travers l’extension de l’armoire à trophées. Aujourd’hui, l’on admet volontiers que la trace laissée dans l’histoire suffit à inscrire le CA dans nos consciences avec l’étiquette de colosse de la Ligue 1. Pourquoi ? Parce que la notion en question est indissociable d’un rapport profond entre la situation du club au moment présent et la conscience de son histoire. Entre son projet et son passé. Entre son image et ses souvenirs, il ne suffit donc pas de compiler les trophées, mais il faut toutefois gagner régulièrement, tout en sachant perpétuer un savoir-faire, une identité, offrir une façon de vivre et de comprendre le football à ses fans et même au-delà de cette sphère !
Au Club Africain, ce football vécu comme un art de vivre est aujourd’hui ce qui permet aux Clubistes de célébrer leur vitalité, même situés au pied du podium (classement en marge de la phase 1 du championnat). Aujourd’hui, le CA doit se servir de son histoire comme un référent pour actualiser ses talents. Certes, l’époque et la logique d’un foot-business toujours plus forts sont, ces derniers temps, de vrais tests de résistance pour ce club centenaire. Mais si, au Parc A, la dictature du « court-termisme » exerce encore trop d’influence, en Tunisie, les « perversions » de la culture du résultat ne se sont jamais autant sentis qu’autour du Club Africain.
Au CA, depuis qu’il a été décrété, le sacro-saint professionalisme de façade n’a pu qu’être perçu comme un entrant trop brutal et trop étranger au monde du football tunisien. Il est peut-être maintenant temps de prendre conscience de cette nécessité de jeter des ponts entre les époques, pour qu’au final, le CA soit autant un club mythique qu’un serial conquérant.
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