Djerba | Mosquées Ibadhites : Des lieux chargés d’histoire et de souvenirs
Elles sont, de par leur architecture particulière, une spécificité de l’île de Djerba. Les mosquées ibadhites — c’est d’elles dont il s’agit — construites, il y a plusieurs siècles, ont joué plusieurs rôles. Ces lieux de culte, qui ont également abrité des « madrassas », ont constitué un maillon important du système de défense de l’île. Alors qu’ils représentent un pan précieux du patrimoine jerbien, plusieurs édifices menacent ruine et risquent de partir en poussière, faute d’entretien
«Les mosquées ont chacune leur aspect flou du petit matin, leur lumière crue de midi et leurs ombres apaisantes du soir ». Jeannine Berrebi
Vues du ciel, elles ressemblent à de minuscules points blancs enfoncés dans le sable ocre. Les mosquées ibadhites, à l’architecture très particulière, se fondent dans le paysage et font partie intégrante de l’île de Djerba. On en compte plus d’une centaine. Depuis le début de leur création, elles ont servi de point d’ancrage autour duquel gravite la vie sociale et spirituelle des petites communautés locales qui habitent l’île. Leur architecture spécifique est le reflet d’un des dogmes de la doctrine ibadhite rigoriste et pratiquée par de nombreux habitants; qui prône un mode vie austère, loin de toute ostentation.
Lignes minimalistes et épurées
Il est possible, d’ailleurs, de le remarquer dès le premier regard. Entièrement peints à l’eau de chaux, avec des mihrabs réduits à leur plus simple expression, ces édifices présentent des lignes minimalistes et épurées et sont dépourvus de tout objet ornemental superflu. Une de leur particularité sont les minarets escaliers. A l’intérieur, les salles de prière, qui retiennent la fraîcheur en été, ont une allure spartiate. Attenantes à elles, des pièces ont servi de lieu pour assurer des cours religieux dans les mosquées « madrassa ».
Image par Barcha de Pixabay
Outre leur rôle dans la transmission des savoirs et des connaissances, ces mosquées ont fait office de « forteresse » dans lesquelles les guerriers trouvaient refuge et pouvaient guetter l’arrivée des ennemis. En effet, ces mosquées portent les traces de l’histoire guerrière de l’île qui a essuyé les assauts de pirates et qui a été plusieurs fois, pendant les périodes de conquêtes, l’objet de convoitise de contrées étrangères. D’ailleurs, dans son livre « Les mosquées de Djerba », l’auteure Jeannine Berrebi mentionne que des meurtrières et des avancées ont été creusées dans les portes et les contreforts des mosquées afin que les soldats puissent verser de l’huile bouillante sur leurs assaillants au cours des attaques menées par des troupes étrangères.
Mosquées sentinelles
Ainsi la configuration et l’emplacement des mosquées témoignent du rôle qui leur a été attribué. Alors que les édifices alignés le long de la côte ont servi de guet — d’où le nom de« mosquée sentinelle » — , à l’instar des mosquées Sidi Yeti et Sidi Jmour qui représentaient des maillons importants du système de défense de l’île, ceux parsemés à l’intérieur de l’île ont été construits au gré des mouvements migratoires et des pérégrinations des petites communautés qui étaient nomades avant de devenir sédentaires. Dès qu’un point d’eau s’asséchait, ils se déplaçaient à nouveau pour trouver un autre point d’eau près duquel ils installaient leurs tentes et construisaient une mosquée.
Des légendes se sont tissées autour de certains de ces édifices. Selon l’une d’elles, la mosquée Ellil ou la « mosquée de la nuit », située à proximité du village de Oued Z’bib (entre El May et Ajim), aurait été appelée ainsi parce que des habitants, qui se sont réveillés le matin, ont été surpris de trouver une mosquée construite sur une des terres de leur cité, alors qu’elle ne s’y trouvait pas la veille.
Aujourd’hui, ces mosquées font la fierté de l’île car elles sont des lieux chargés d’histoire et de souvenirs.
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