Commentaire | Servir ou partir
Faut-il que le Chef de l’Etat ou le Chef du gouvernement se chargent eux-mêmes de résoudre les problèmes que rencontrent les citoyens auprès des ministères, des administrations publiques, des organismes ou des entreprises publiques ? Avec les charges incommensurables qu’ils ont à assumer au sommet de l’Etat, le rythme est déjà épuisant. Mais le Président de la République ne peut rester insensible aux dizaines de plaintes que reçoivent quotidiennement ses services. C’est pourquoi il n’hésite pas à multiplier ses visites inopinées sur le terrain pour relever les dysfonctionnements, les anomalies, le laisser-aller ou encore la mauvaise gestion de certaines entreprises et dont les impacts négatifs se ressentent au quotidien, que ce soit pour le transport public, les médicaments, le sucre, le lait, l’infrastructure, etc.
Souvent, les réponses avancées ne sont pas convaincantes. A d’autres occasions, on essaye de noyer le poisson en mettant en avant un souci de respect des procédures. Pourtant, les responsables oublient qu’ils sont nommés à leurs postes pour trouver des solutions, maintenir le service public et assurer l’approvisionnement. Sinon qu’est-ce qui fait la différence entre un fonctionnaire et un autre ? Ils ont les mêmes diplômes, le même parcours mais pas le même sens de l’Etat. Un responsable est celui qui se met devant et non pas derrière pour faire bouger les lignes et ouvrir les lucarnes de l’espoir. Or, se dérober à ses responsabilités en évoquant avec des trémolos dans la voix l’article 96 ou en renvoyant la balle dans le camp des structures de contrôle, aux conseils d’administration ou à la lenteur du rythme de la justice, n’est autre que renvoyer aux calendes grecques des questions d’urgence vitales pour des citoyens aux abois ou en quête de recouvrer leurs droits.
En recevant hier le Chef du gouvernement, le Président de la République a soulevé ces questions pour la énième fois. Comme exemple illustrant l’absurdité qui règne dans les rouages de l’Etat, il a évoqué le cas d’un père originaire de Zaghouan qui ne sait plus à quel saint se vouer pour corriger l’extrait de naissance de sa fille et qui porte une omission sur la nature du sexe du nouveau-né depuis 2016. Des années durant, ce parent a engagé toutes les procédures, présenté tous les documents, le certificat du médecin de l’hôpital de Zaghouan, porté plainte auprès de toutes les administrations concernées, sans réponse, sans correction. A qui la faute ? Peu importe. Mais qui est capable de rectifier, de corriger ? C’est là où cela devient grave, car il ne s’agit pas d’un simple papier mais d’un être humain qui risque d’être traumatisé toute sa vie à cause d’une omission. Tous les responsables concernés sont aux abonnés absents. Avec de telles attitudes, de tels responsables rendent l’administration comme le plus froid des monstres. Non seulement, ils n’assument pas les charges qu’on leur a confiées, mais aussi ils bloquent tout et ne font que compliquer davantage le quotidien des citoyens. A cet effet, le Chef de l’Etat a encore une fois ordonné qu’il faut assainir l’administration de ces responsables qui cachent un agenda politique ou sont aux services des lobbies ou des pays étrangers. D’autres comptent les jours et les mois qui restent pour la tenue de l’élection présidentielle pour pouvoir prendre position, a-t-il relevé. Or, il s’agit de l’Etat tunisien qui travaille dans la continuité et non des hommes, a souligné le Chef de l’Etat. Il a, à cet effet, assuré que «celui qui attend l’issue des élections pour prendre ses responsabilités devra attendre en dehors de l’administration et de l’Etat». Il n’y a pas message plus clair et plus direct. Il est grand temps que les responsables fassent leur choix : servir ou partir.
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