Commentaire | Le phosphate, dernier gilet de sauvetage
En dépit d’une complexité sans égale et même s’il est encore dans un profond coma, le phosphate constitue un gilet de sauvetage pour l’économie tunisienne. Les références sont toujours là : il fut un temps où le secteur assurait 4 % du budget de l’Etat, soit l’équivalent de 4 mille milliards de dinars, avec une production record en 2010 de l’ordre de 10 millions de tonnes… Un constat et des chiffres dont le seul souvenir ne manque pas d’entretenir l’espoir.
Par où commencer pour évoquer les obstacles qui empêchent un secteur aussi vital que le phosphate de retrouver le niveau de sa production habituelle, notamment celle atteinte avant la révolution ?
Il n’est pas bon de vivre dans le passé, mais il est toujours utile de rappeler que le phosphate constituait une mine inépuisable pour renflouer le budget et les caisses de l’Etat. Dans le monde merveilleux des gouvernants de la décennie noire, la Tunisie et son phosphate ne s’y retrouvent plus. Car plus personne n’est convaincu des arrêts répétitifs de la production. Un secteur dont l’impact est plus que jamais négligeable, son apport sur l’économie sonne de plus en plus faux. Pas dans le temps, pas dans les règles, très loin des aspirations et surtout rarement tourné vers les priorités du pays.
Dans une impasse prolongée, la production dans ce secteur avance à l’envers. En dépit des tentatives répétées pour remettre sur les rails l’une des meilleures productions au monde, les décisions, les bonnes, les vraies, ne sont toujours pas amorcées.
Le fait est cependant là: on assiste aujourd’hui à un mode d’emploi exclusivement orienté vers la contestation. Beaucoup de sans-emploi, notamment les jeunes, associent avec imprécision leurs revendications au travail à la rentabilité des sociétés de phosphate. Ils s’en font même un prétexte, voire un moyen de pression. On a beau s’inscrire dans une politique de vigilance et de prévoyance, en interdisant l’arrêt du travail quelles que soient les justifications, mais on n’a jamais réussi à mettre en place une approche globale susceptible de sauver le secteur.
La politique de ses moyens
Dans la panade générale, ceux qui ont veillé aux destinées de ce secteur dans un coma profond avaient tenté de surnager, mais ils s’étaient débattus davantage avec l’énergie du désespoir qu’avec la clairvoyance et l’autorité que recommandait leur fonction. Un bon responsable doit être irréprochable pour prétendre pouvoir s’occuper des autres.
Le transport du phosphate par voie ferroviaire, ainsi que la corruption ayant entaché l’achat de wagons ne pouvant être utilisés sur les voies existantes, étaient fortement révélateurs. Qu’elle y ait été préparée ou pas, la production de phosphate inquiétait de plus en plus avec son incroyable faculté à se prêter à des défaillances collectives. Des dérapages institutionnels depuis 2011 et dépassant au fil du temps toutes les bornes.
Il est vraiment dommage que le secteur n’ait pas pu bénéficier du contexte du changement de régime politique, lequel s’annonçait pourtant plus que jamais favorable. A force d’accumuler des éléments négatifs, les gouvernants de l’époque ont ajouté à ce triste décor un déficit de volonté politique évident au point de tomber même dans l’impuissance, voire dans l’impossibilité de redresser le secteur dont la production a fatalement chuté.
Cela ne manque pas de rappeler une vérité : on ne peut avoir que la politique de ses moyens. Et le moins que l’on puisse dire, c’était navrant et désenchantant à mourir…
Le modèle actuel de production de phosphate est affecté par des considérations qui n’ont plus vraiment de rapport direct ni avec les valeurs du travail, ni avec les performances économiques et financières. Pareille précision n’est pas anodine puisque la discipline et le respect des règles ne faisaient pas partie des priorités absolues des gouvernants de l’époque… Des gouvernants qui ont impunément commis l’impensable. Voire l’irréparable.
Toutefois et en dépit d’une complexité sans égale et même s’il est encore dans un profond coma, le phosphate constitue un gilet de sauvetage pour l’économie tunisienne. Les références sont toujours là : il fut un temps où le secteur assurait 4% du budget de l’Etat, soit l’équivalent de 4 mille milliards de dinars, avec une production record en 2010 de l’ordre de 10 millions de tonnes… Un constat et des chiffres dont le seul souvenir ne manque pas d’entretenir l’espoir.
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