Commentaire – L’anticipation tunisienne face aux incertitudes
S’il y a un seul mot pour résumer l’évolution géopolitique des dernières années et la situation actuelle, c’est bien le mot incertitude. Après l’hégémonie d’un ordre mondial bipolaire, le monde a vécu la domination américaine à sens unique, ensuite le retour de la Russie, après il y a eu l’émergence de plus en plus forte et visible de la Chine. A côté, siège l’Union européenne en tant qu’ensemble plus ou moins cohérent.
Aujourd’hui, de plus en plus de pays émergent sur la scène mondiale pour devenir de véritables puissances régionales, tels que l’Inde, le Pakistan, l’Iran et beaucoup d’autres. Puissances régionales sur le plan politique et parfois militaire.
De leur côté, les Etats-Unis continuent à exercer un leadership à travers le monde. Toutefois et avec l’élection de Donald Trump, il est possible — certains disent même que c’est certain — que l’Amérique lâche l’Union européenne et valide les positions actuelles russes en Ukraine. En d’autre termes, l’Amérique de Biden a engagé l’Europe dans une guerre indirecte contre la Russie, pendant que l’Amérique de Trump se réconcilie avec le pays de Poutine.
Tout cela signifie que l’Otan n’aura plus autant d’importance que par le passé et pourrait même être menacée dans son existence. Cela signifie aussi que l’Amérique de Trump n’accordera plus cette garantie totale en cas de guerre contre la Russie. Cela signifie surtout que si l’Amérique renonçait à une partie de son leadership à couvrir l’Europe et à gérer l’ordre mondial, ce serait la fin de la mondialisation.
La mondialisation commençait déjà à être menacée par la multiplication des acteurs émergents, par la volonté de constituer le groupe des Brics et de le renforcer par l’émergence du géant chinois et par la guerre « économique » entre les USA et la Chine qui devra marquer les 30 prochaines années.
Récemment, s’est tenu le 11 novembre, en Arabie Saoudite, le sommet arabo-islamique où l’Iran était présent. Ce sommet a annoncé, par consensus, le refus des pays arabes et musulmans d’une attaque massive contre l’Iran et de la poursuite du processus de normalisation avec Israël, sans la création immédiate d’un Etat palestinien. Certes, beaucoup de réserves ont été émises dont celle de la Tunisie. Il n’en demeure pas moins que la position adoptée étant beaucoup plus ferme qu’avant, représente un changement de cap majeur de l’ensemble des pays arabo-musulmans. C’est donc une autre pierre lancée dans le jardin de la mondialisation.
Kaïs Saïed a eu raison de dire et de répéter que notre pays ne sera jamais dans les axes ni dans les clans et qu’il multipliera les alliances qui servent ses intérêts. Seul l’intérêt de la Tunisie sera le facteur favorisant l’essor des alliances stratégiques. D’où les contacts qu’il y a eu et qu’il y aura probablement avec des pays comme l’Arabie Saoudite, les Emirats, l’Egypte, l’Iran, la Chine, la Russie et également l’Europe et les Etats-Unis.
Que Trump ne serve plus de parapluie à l’Europe acte de fait le processus de la démondialisation. Et cet éclatement des ensembles, ce repli de chaque pays sur ses intérêts nationaux, c’est la voie de l’avenir qui semble avoir été bien anticipée par la Tunisie.
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