Culture

Chroniques de la Byrsa: Tunis a-t-il mal à son ventre ?

Créé voilà exactement 140 ans en arrière (en 1884), construit en 1891, le Marché central de Tunis a connu à partir de 2003 des travaux de réhabilitation totale menés par l’Association de sauvegarde de la médina de Tunis sous l’égide de la mairie de la ville et grâce à un prêt accordé par l’Agence française de développement (AFD). Il s’agissait de procéder à la modernisation des équipements techniques ainsi qu’à la rationalisation de cet espace de 12.000 m². Ce grand chantier s’est prolongé jusqu’en 2007, année de sa réouverture au public.

Dans notre dernière livraison, outre la fonction économique et commerciale de tels espaces, nous avons attiré l’attention sur leur caractère d’attraction touristique. Là, s’étalent sous les yeux de tout visiteur les réalités les plus profondes relatives au genre de vie d’une population donnée : sa production, ses goûts, son pouvoir d’achat, etc. etc.

A sa réouverture, le Marché central a doté la capitale de l’une de ses plus belles facettes. 17 ans plus tard, qu’en est-il ?

Il se commettait, certes, parmi les agents chargé de faire respecter le règlement, bien des indélicatesses mais de là à laisser champ libre aux contrevenants

Une virée toute récente dans ce « ventre » de Tunis nous a laissé un goût de profonde amertume. En matière d’approvisionnement, nous avons été frappés par le rétrécissement de l’offre. Il faut bien l’avouer, la baisse du pouvoir d’achat des consommateurs a réduit l’offre comme peau de chagrin. En dehors des produits de base, bien des articles se sont littéralement volatilisés. Je ne prendrai qu’un exemple, celui des champignons. En saison, il en était proposé au moins deux ou trois variétés. Aujourd’hui, et tout à fait occasionnellement, on ne trouve plus que les champignons de Paris sous emballage. Finies les chanterelles, trompettes de la mort et autres morilles. Il est vrai qu’à la réouverture, déjà, certains marchands de ces articles « exotiques » n’étaient plus au rendez-vous, leurs marchands ayant entre temps rendu le tablier…ou l’âme. Et avec eux disparut également un large éventail de produits : endives, asperges, cresson, gibier, etc.

Côté organisation, on relève tout d’abord la disparition du poste de police du marché depuis la « Révolution ». Il se commettait certes, parmi les agents chargé de faire respecter le règlement, bien des indélicatesses mais de là à laisser champ libre aux contrevenants de tous poils pour agir à leur guise… Un exemple entre mille : tous ces marchands qui débordent largement hors de leurs locaux pour encombrer les allées et provoquer les désagréments de la bousculade des chalands, sans parler du comportement quasi délictueux de toute une faune qui s’est arrogé le droit de maltraiter la clientèle en toute arrogance.

Côté hygiène, il suffit de faire un tour dans la halle aux poissons. La préposée à son entretien trône au croisement des allées de l’aile…pour vendre glace et sachets en plastique, laissant les usagers patauger dans l’eau généreusement répandue par les poissonniers.

Pour parachever ce triste tableau, en circulant dans le carré central, levez les yeux au ciel, vous verrez les tentures censées vous protéger des pluies et des rayons brûlants du soleil d’été : celles qui ne sont pas parties en lambeaux sont trouées et les autres surchargées de poussière.

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