Culture

Chroniques de la Byrsa: L’ami iranien (IV)

Nous voici, ce dimanche, arrivés à l’avant-dernière station de notre périple de l’eau qui nous a conduits de Zaghouan à la Maâlga  à Carthage, en compagnie d’un ami du hasard et que ce hasard a voulu qu’il soit iranien. Ce périple ne nous a pas seulement baladés à travers l’espace mais aussi à travers le temps puisqu’il nous a fait revenir à des ères plus ou moins lointaines de notre passé que tout le monde s’accorde à trouver exceptionnel et même unique à certains égards. Et c’est précisément vers cette singularité que j’attire toujours l’attention de mes compagnons dans des visites de découverte de notre pays pour installer, dans leur champ de vision, l’image d’un pays à la taille modeste, certes, mais au passé inversement proportionnel aux paramètres spatial et démographique.

Nous nous sommes, mon ami et moi, arrêtés sur le minuscule pont qui enjambe l’actuel canal qui relie les deux bassins des ports dits puniques, juste en face de la colline de la Byrsa qui a vu la naissance de l’Etat aujourd’hui dit tunisien et qui se dresse par-delà le plan d’eau en arc de cercle. Et de me mettre à énumérer la liste des particularités qui ponctuent notre passé. Puis, me rappelant soudain que j’avais affaire à un Iranien, donc fort probablement à un chiite, je lui ai demandé quel était le berceau du premier Etat chiite dans l’histoire ? Il me répondit sans hésitation : Le Caire. Je lui ai alors rétorqué qu’il se méprenait et que l’actuelle capitale égyptienne a bien été fondée au Xe siècle par la dynastie fatimide venue…de Tunisie où elle avait vu le jour presqu’un siècle auparavant et que sa première capitale s’appelait Mahdia. Il en serait littéralement tombé à la renverse s’il ne s’était pas retenu à la rambarde qui borde le petit pont.Une ville en bord de mer pour pouvoir organiser une expédition maritime contre le califat omeyyade

Il est resté un moment à me fixer, incrédule. Je lui ai alors rapidement retracé l’épopée de cet événement dont les répercussions se prolongent jusqu’à nos jours : l’arrivée au Maghreb à la fin du IX° siècle de Obaïd Allah al-Mahdi fuyant la persécution des Omeyyades de Damas et auquel des missionnaires chiites envoyés par l’imam Ismaïl ben Jaafar as-Saddiq avaient préparé le terrain avec le ralliement à leur cause de la confédération berbère des Koutama, dans l’actuel Est algérien…contre la promesse d’allègement des impôts ! Entré en conflit avec le dernier souverain de la dynastie aghlabide, Ziadèt Allah III, Obaïd Allah le vainquit le 19 mars 909 au cours d’une ultime bataille qui s’est déroulée au lieu-dit Lorbès, non loin de la localité de Dahmani, dans le gouvernorat du Kef, suivie de son entrée triomphale à Raqqada six jours après. Mais l’objectif final de la dynastie qu’il a instaurée était la prise du pouvoir à Damas. Pour cela, il a choisi de fonder une ville en bord de mer pour pouvoir organiser une expédition maritime contre le califat omeyyade.

D’où le transfert de la capitale de Kairouan à Mahdia qu’il a créée de toutes pièces. Mais Obaïd Allah mourra le 3 mars 934 sans avoir réalisé son rêve.

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