Chroniques de la Byrsa: L’ami iranien (II)
Comment faire de ce qui subsiste de l’aqueduc romain de Zaghouan-Carthage un vestige comparable et même supérieur en attractivité à ses analogues du bassin méditerranéen parmi lesquels certains des plus spectaculaires et avec lesquels il ne peut pas tenir la comparaison au point de vue esthétique ou de l’ingéniosité technique ? Telle est la question qui me vient à l’esprit lorsque je parle de ce monument à des étrangers (ou même à des compatriotes) curieux de la civilisation romaine. En faisant, par exemple, appel à l’imagination et en rappelant que notre ouvrage a perdu avec les ravages des conquêtes multiples ce qui fait leur admiration ailleurs, tels celui de l’Aqua Claudia, à Rome, par exemple, ou celui de Vaison-la-Romaine, en France ? Ce n’est guère suffisant, et peut-être pas même convaincant.
Me référant alors simplement à l’histoire et aux parties qui existent encore aujourd’hui, je rappelle que notre aqueduc romain ou, disons, son tracé souligné aujourd’hui par des segments qui ponctuent le parcours qui le conduit de Zaghouan à Carthage sur environ 70 km, mais également ceux qui le relient à Aïn Jouggar, à environ 35 km au sud-ouest de Zaghouan, et à Béjaoua, à une vingtaine de kilomètres au nord-est de la métropole antique pour en augmenter l’apport en eau, tout cela lui donne une longueur totale de 132 km et en fait le plus long de l’Antiquité romaine. Avec cette caractéristique, ajoutée à la taille inégalée des citernes d’une capacité de stockage de plus de 44.000 m3 et dans lesquelles se déversaient le précieux liquide au bout de sa course, au lieu dit La Maâlaga, à Carthage, nous voici devant le plus grand ouvrage hydraulique de l’Antiquité romaine avec lequel ne peut rivaliser aucun autre monument.
La rencontre et le commerce, dans le sens d’échange, avec ce patrimoine, ne se font pour ainsi dire que par inadvertance, à la faveur d’un déplacement sur la RN 3
Assurément, il y a là de quoi bomber le torse. Mais par pure vanité. Car la rencontre et le commerce, dans le sens d’échange, avec ce patrimoine ne se font pour ainsi dire que par inadvertance, à la faveur d’un déplacement sur la RN 3 reliant la capitale au Fahs.
Et encore, on ne fait que frôler le monument. Aucun circuit ne lui est dédié ; aucune station pour expliquer ses caractéristiques et son passé et encore moins d’événements ou d’activités commerciales en rapport avec lui. Et quand on sait ce que, par exemple, la localité de Vaison-la-Romaine, en Provence, tire sur le plan économique de son aqueduc-pont, on reste rêveur.L’actualité a charrié, ces derniers jours, une information selon laquelle les autorités de tutelle ont arrêté un programme de travail précisément au sujet de ce patrimoine afin de le sauvegarder et le mettre en valeur. On n’en connaît pas les détails, et c’est fort dommage car tout le monde devrait contribuer au succès d’une telle entreprise, fût-ce seulement sur le plan de la sensibilisation du public à l’importance d’une telle démarche. Mais il n’est pas trop tard pour mobiliser toutes les ressources à cette fin.Ce détour par l’aqueduc de Zaghouan nous a été inspiré par l’ami iranien rencontré la semaine dernière et qui s’intéresse aux questions de l’alimentation en eau des métropoles antiques. Nous le retrouverons ce dimanche pour connaître enfin son histoire.
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