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Changement climatique et catastrophes naturelles : La Tunisie n’est pas à l’abri

 

A la vue des scènes apocalyptiques et douloureuses qui parvenaient de la Turquie et la Syrie, les Tunisiens redoutent qu’un tel scénario se produise dans notre pays qui paraît, historiquement, protégé contre ce genre de catastrophes. Le récent séisme qui a frappé le Royaume chérifien suscite davantage de craintes, étant littéralement notre voisin.

C’est l’hécatombe à Derna à l’est de la Libye. Le quart de la ville a été radié de la carte, des fosses communes pour enterrer les morts et des familles entières portées disparues, le dernier bilan fait état de plus de 5300 morts, le pays a lancé un appel à l’aide. Quelques jours auparavant, le sud de Marrakech, au Maroc, a été secoué par un séisme inédit. Les images sont désolantes, des villages montagneux se sont littéralement effondrés en une fraction de seconde faisant près de 3.000 morts. Un bilan provisoire.

Après ces deux catastrophes qui ont secoué le Maghreb arabe, les Tunisiens se posent des questions. La Tunisie est-elle vraiment à l’abri des catastrophes naturelles qui touchent aujourd’hui, non pas seulement des pays lointains, mais bel et bien nos voisins ?

La Tunisie, comme de nombreux autres pays méditerranéens, n’est pas à l’abri des catastrophes naturelles. Ces phénomènes peuvent se produire dans différentes régions du monde en fonction des conditions météorologiques et climatiques. Même si le climat méditerranéen en Tunisie est caractérisé par un été sec et chaud et des hivers frais et humides, les précipitations sont très irrégulières et la pluviosité varie considérablement du nord au sud. Ceci n’empêche que notre pays reste exposé à des phénomènes climatiques extrêmes. 

Historiquement, la Tunisie a connu de grandes inondations qui ont causé d’énormes dégâts humains et matériels, les inondations de 1969 en témoignent. Vers la fin des années 60, le pays a connu les pires inondations de son histoire causant la mort de 540 personnes et détruisant environ 70 mille habitations, selon un bilan officiel. Ces inondations ont frappé tout le pays, notamment les régions du centre. Kairouan était la plus touchée, comme le confirmaient les informations de la chaîne nationale à l’époque. En 1973, 100 personnes ont trouvé la mort dans des inondations qui ont frappé le nord du pays, notamment les régions limitrophes de l’Oued Medjerda. Béja, Medjez El-Beb, Jendouba étaient alors les villes les plus sinistrées.

Depuis, notre pays n’a pas connu de catastrophes naturelles considérables, à l’exception de quelques inondations, notamment en 2003 ou encore en 2009. S’agit-il du calme qui précède la tempête ? La Tunisie est-elle menacée par les puissantes tempêtes telles Daniel, une catastrophe sans précédent en Libye ?

Un scénario peu probable en Tunisie

L’ingénieur à l’Institut national de la météorologie Mehrez Ghannouchi tient plutôt un discours rassurant. Selon lui, la tempête Daniel n’impactera en aucun cas la Tunisie. « D’ores et déjà, Daniel frappe l’est de la Méditerranée, elle va perdre en puissance d’ici quelques jours jusqu’à sa disparition », explique-t-il à La Presse. Le climat en Tunisie suivra une période de stabilité à court et moyen terme. « Ce qui rend ce scénario peu probable en Tunisie, c’est que la mer Méditerranéen n’est pas très profonde au large de notre pays. Elle est également entourée de zones arides qui rendent difficile l’apparition de puissantes tempêtes », a-t-il estimé. Ajoutant toutefois que le changement climatique peut bouleverser toutes les données de prévision à long terme.

Il rappelle qu’une tempête se forme lorsqu’un courant d’air chaud venu de la mer rencontre un courant d’air froid provenant de la terre. C’est le choc de ces masses d’air aux températures et à la teneur en eau différentes qui crée des vents violents parfois accompagnés de pluie, de neige, de grêle ou de sable. «Il est peu probable qu’une tempête similaire à celle qui a frappé la Libye affecte, à court et à moyen termes, la Tunisie», rassure, pour sa part, le climatologue tunisien Zouhaier Hlaoui.

«Ce phénomène, qui s’inscrit dans le cadre d’un système aérologique méditerranéen, ne risque pas de toucher les régions tunisiennes, car il se caractérise par un déplacement de l’ouest vers l’est, et parce qu’il a atteint les côtes libyennes et égyptiennes, il n’est plus possible qu’il revienne vers les côtes tunisiennes, d’autant qu’il s’est affaibli ces derniers jours», a encore développé le climatologue, dans une déclaration accordée à l’agence TAP. Toutefois, il est probable d’enregistrer, durant les périodes intermédiaires (entre les saisons- automne et printemps), «le phénomène de retour de l’Est», qui génère plusieurs perturbations, notamment de fortes précipitations, causant des inondations, à l’instar des inondations enregistrées en Tunisie en 1969 et en 1990», a-t-il toutefois mis en garde. 

Quid des séismes ?

En février dernier, la Turquie avait connu l’un des pires séismes de son histoire. Le dernier bilan fourni par l’agence publique turque de gestion des catastrophes (Afad) fait état de 44 374 morts. Le nombre total de morts en Turquie et en Syrie est de 50 325.

A la vue des scènes apocalyptiques et douloureuses qui parvenaient de ces deux pays, les Tunisiens redoutent qu’un tel scénario se produise dans notre pays qui paraît, historiquement, protégé contre ce genre de catastrophes. Le récent séisme qui a frappé le Royaume chérifien suscite davantage de craintes, étant littéralement notre voisin.

Le professeur en géologie et sciences de la Terre Chokri Yaaich, joint par La Presse, nous explique que tous les pays du monde sont exposés à des séismes de différentes intensités. Sauf que, nuance-t-il, «il y a des zones où l’intensité des séismes est plus forte et d’autres zones qui sont en dehors de la pression tectonique, ce qui les expose à des secousses légères.»

Ainsi, les plaques tectoniques sont en mouvement constant dans différentes directions. Il a également indiqué que la Tunisie se trouve au nord de la plaque tectonique africaine, qui se déplace progressivement vers le nord-est, sur une distance de 5 à 25 mm chaque année. «Ce mouvement contribue à stocker l’énergie dans les couches souterraines de la Terre, qui se libère lorsque cette énergie atteint un certain seuil, provoquant un tremblement de terre qui se propage de couche en couche jusqu’à atteindre la surface et devenir un séisme», analyse-t-il.

A l’heure des changements climatiques

Les catastrophes naturelles s’intensifient sous l’effet des changements climatiques, s’accordent les scientifiques. Sauf que la Tunisie ne semble pas assez préparée aux conséquences et aux implications environnementales de ces changements qui s’accélèrent d’une année à l’autre. Les longues séquences de sécheresse en témoignent parfaitement. La Tunisie connaît une augmentation des températures moyennes, ce qui se traduit par des étés de plus en plus chauds. Cela peut avoir des conséquences sur la santé des habitants, la disponibilité de l’eau et l’agriculture. Les précipitations sont devenues plus irrégulières, avec des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents.

De même, l’élévation du niveau de la mer menace les zones côtières de la Tunisie, y compris des villes importantes comme Tunis, Sfax et Sousse. Cela peut entraîner une érosion côtière accrue et des inondations plus fréquentes.

Pour faire face à ces défis, la Tunisie a-t-elle pris des mesures pour s’adapter au changement climatique, par la mise en œuvre de politiques de gestion de l’eau et la promotion de pratiques agricoles durables et d’énergies renouvelables ? Les chantiers sont énormes !

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