Economie tunisie

Afrique : Lorsque les monnaies locales s’impriment ailleurs !

 

Sur les 54 pays du continent africain, environ 43 pays dépendent totalement des imprimeries européennes et américaines. Pourquoi les monnaies africaines ne sont pas imprimées localement ?

Du fait de l’opacité qui entoure les opérations d’impression de monnaies, le nombre réel de pays africains faisant appel, au moins ponctuellement, aux services des imprimeurs étrangers, notamment européens et américains, n’est pas connu.
Mais une chose est sûre, un bon nombre de ces monnaies africaines ne sont tout simplement pas imprimées sur le continent. Après plus de 60 ans d’indépendance, on estime à 43 le nombre des pays africains qui externalisent l’impression de leur monnaie. Quelles sont les raisons qui poussent ces pays à un tel comportement, tout en sachant que la monnaie est considérée comme un instrument de souveraineté d’un Etat, aussi bien du point de vue politique qu’économique et émise sous le contrôle d’une banque centrale. Et quels risques encourent ces pays en confiant la fabrication de cet instrument de souveraineté nationale à des parties qui leur sont étrangère ?

Prédominance coloniale

D’après les études faites sur cette question, les monnaies africaines sont globalement imprimées dans quatre pays européens — France, Royaume-Uni, Allemagne et Suède — et deux pays d’Amérique du Nord — Etats-Unis et Canada.
Parmi les monnaies imprimées en Europe figure en bonne place le Franc CFA. Cette monnaie commune à 14 pays d’Afrique de l’Ouest et centrale, héritée de l’ère coloniale, est imprimée, depuis 1945, à Chamalières près de Clermont-Ferrand, en France, par l’imprimerie de la Banque de France.
Outre la France, une vingtaine de pays du continent impriment leurs monnaies au Royaume-Uni auprès du leader mondial de l’impression de monnaies, « De La Rue ». Il s’agit, entre autres, de l’Ethiopie, 4e puissance économique africaine et second pays le plus peuplé d’Afrique, de l’Angola, du Botswana, du Cap-Vert, de la Gambie, de la Guinée (franc guinéen), du Lesotho, de la Libye, du Malawi, de Maurice, du Mozambique, de l’Ouganda, du Rwanda, de Sao Tomé-et-Principe, des Seychelles, de la Sierra Leone, de la Tanzanie,… Là aussi, on note une véritable prédominance de pays anciennement colonisés par l’Angleterre.
Il est également à préciser que certains pays africains impriment leur monnaie dans différents pays, cela permet d’éviter certains risques visà-vis du pays et de l’imprimeur où la monnaie est imprimée.
Mais pourquoi opter pour les imprimeries occidentales ? La première vraie raison serait les techniques et les technologies qui peuvent, parfois, faire défaut dans certains pays africains. L’impression de billets de banque nécessite des avancées technologies pour limiter autant que possible les tentatives de falsification et très peu d’acteurs mondiaux ont le savoir-faire nécessaire cela.

Un coût très élevé

Aussi, il ne faut pas oublier que l’impression d’une monnaie coûte cher, très cher même. Car il faut disposer continuellement de produits innovants et être toujours en alerte continue pour suivre les innovations technologiques afin de faire face à la contrefaçon.
Selon les experts, la confection d’un dollar américain coûte entre 6 et 14 centimes. Les coûts peuvent varier selon la valeur du billet et les éléments incorporés pour rendre la falsification malaisée. Ces coûts restent assez chers pour les petits pays dont le nombre d’habitants ne dépasse pas dix millions d’individus. La rentabilisation d’un tel processus demeure, ainsi, compliquée.
Pour certains pays, la production de billets de banque à l’étranger peut s’avérer plus sûre, car elle peut éviter une inflation consécutive au recours fréquent à la « planche à billets ». Il n’est exclu pas que certains pays africains fassent appel à d’autres sur le continent et qui disposeraient des capacités nécessaires pour imprimer les monnaies. Cependant, des problèmes de confiance se posent.
Aussi, en imprimant leurs monnaies ailleurs, certains pays se sont retrouvés face à un surplus de billets, et ce, au cas où l’imprimeur imprimerait plus de monnaies que ce que lui demande la banque centrale du pays émetteur. Face à une grande liquidité, le pays va être confronté à des tensions inflationnistes.
Autre risque non moins important concerne le fait que les imprimeurs étrangers connaissent tous les secrets entourant la confection des billes de banque d’un pays. Une situation qui pourrait faciliter la production de billets contrefaits par des puissances étrangères afin d’inonder un pays en billets de banque et faire chuter sa monnaie.

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