Actuel | Révision de l’Accord de libre-échange – Tunisie-Turquie – Objectif : alléger le déficit de la balance commerciale
Les produits turcs n’ont cessé, depuis l’adoption de l’accord du libre-échange entre la Tunisie et la Turquie, d’occuper davantage de place sur le marché national et de séduire le consommateur tunisien. La présence des enseignes turques dans le pays a constitué un risque concurrentiel pour les commerçants, les industriels et les distributeurs nationaux, enregistrant des ventes importantes, répondant de manière très large aux besoins du consommateur et offrant pratiquement tous les articles liés à une filière de distribution (alimentaire, habillement, mode, accessoires de maison…). Ces produits ont inondé le marché tunisien créant ainsi une concurrence jugée déloyale.
Ainsi, les autorités nationales n’ont pas veillé au développement de la commercialisation des produits nationaux, à la réouverture des petits commerces et usines de fabrication, ni assurer un équilibre entre protection du produit local et libre concurrence.
Pour contenir l’invasion du produit turc, le ministère du Commerce et du Développement des exportations a procédé, depuis le début du mois courant, à la révision des dispositions de l’accord de libre-échange liant la Tunisie à la Turquie pour alléger le déficit de la balance commerciale avec ce pays.
Cette révision vise aussi à protéger l’industrie tunisienne via trois mesures essentielles. La première étant de réviser le droit de douane d’une liste de produits industriels, ayant un équivalent local, pendant cinq ans, passant de 0% actuellement à un taux variant entre 27 et 37,5% (75% du tarif appliqué pour le régime général).
La deuxième concerne la révision de l’accord pour les produits agricoles ayant obtenu des concessions unilatérales de la partie turque pour soutenir les exportations tunisiennes via l’instauration de quotas annuels totalement exonérés de droits de douane. Enfin, le développement des investissements turcs en Tunisie et l’organisation d’un forum d’investissement tuniso-turc pour présenter des projets et des opportunités d’investissement en Tunisie aux investisseurs turcs (prévu à Istanbul pour le premier semestre 2024).
Notons que le déficit commercial avec la Turquie a atteint 2.807,7 millions de dinars pour les dix premiers mois de 2023, sur un déficit commercial total de 15.856,6 millions de dinars. Jusqu’à fin octobre 2023, les exportations vers la Turquie s’élevaient à 538 millions de dinars, alors que les importations atteignaient les 3.345,7 millions de dinars.
Le ministère de tutelle compte agrandir la liste des produits exclus du régime privilégié, notamment les produits similaires fabriqués sur le marché local et les industries en difficulté à cause de l’intensification des importations de la Turquie.
Le ministère rappelle que d’autres mesures de défense commerciale sont activées à la demande de l’industrie nationale affectée par des pratiques déloyales à l’importation ou par des importations massives de Turquie.
Il s’agit entre autres d’imposer des taxes protectionnistes pour fournir des ressources supplémentaires au Trésor public et de mettre en place une plateforme d’enregistrement des exportateurs étrangers autorisés à exporter leurs produits vers le marché tunisien.
Par ailleurs, un système de contrôle préalable à l’importation des produits de consommation a été mis en œuvre, en plus d’un contrôle des demandes de domiciliation de titre de “Commerce extérieur” pour l’importation de ces produits. Ils s’imposeront à la Turquie comme aux autres pays.
La Tunisie a en effet décidé de réviser des mesures prévues par l’accord avec la Turquie, pour protéger la production nationale. Une décision justifiée par une importante hausse des importations ayant mis à mal l’industrie et l’emploi.
D’ailleurs, rien n’empêche d’activer les accords de l’OMC pour faire face à une éventuelle invasion des produits étrangers, allusion faite à la mesure de sauvegarde que compte appliquer le ministère du Commerce pour protéger les industriels, victimes des importations massives.
Les appels se sont multipliés de la part des investisseurs et des organisations nationales pour que le ministère révise les termes de l’accord de libre-échange avec la Turquie et la niche fiscale dont bénéficient les produits turcs importés en Tunisie face à un marché tunisien noyé sous les marchandises turques qui bloquent la production locale.
L’Utica, en l’occurrence, qualifie cette invasion des produits turcs d’inédite et anormale, car elle menace l’économie tunisienne. Ce phénomène a des répercussions qui ne nuisent pas seulement au commerce mais aussi à l’industrie surtout que 70% du tissu industriel tunisien sont principalement formés de PME assez fragiles. Sachant que les industriels et les commerçants tunisiens n’ont cessé de contester la faible demande turque des produits tunisiens.
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