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Action municipale : Entre le marteau de la loi et l’enclume des citoyens

 

Il est impératif de donner aux conseils locaux les moyens de mieux s’impliquer dans le fonctionnement de l’action municipale, à moins qu’on songe au retour à l’ancienne formule des conseils municipaux.

Le 8 mars 2023 : tornade sur nos villes, avec la dissolution des 279 conseils municipaux. S’ensuivront, du 21 janvier au 2 février 2024, les élections des conseils locaux (CL), les premières en Tunisie, auxquelles ont pris part quelque 2434 candidats. Dans la foulée, la police environnementale, il est vrai très contestée pour son empiétement sur les prérogatives de la vieille police municipale, est, à son tour, éliminée, au même moment où des procès inculpant des responsables municipaux atterrissent dans les tribunaux.

Un chamboulement total dans le paysage communal, au point que, par moments, on ne savait plus qui fait quoi, étant donné que les nouveaux venus, et en l’absence d’une loi en bonne et due forme définissant leurs attributions et délimitant leur marge de manœuvre, sont restés comme suspendus dans l’air. «Cette loi sera très probablement rendue publique après sa promulgation dans les tout prochains jours», nous déclare Maher Othman, nouveau membre du conseil local de la ville du Bardo qui pense qu’«il est temps de mettre fin à ce flou qui nous a empêchés d’avancer dans une vraie action municipale. Certes, ajoute-t-il, nous avons eu, du moins dans notre mairie, la chance d’être soutenus par l’administration qui nous a facilité la tâche pour mener à bien certains projets de développement relatifs notamment à la voirie, l’environnement et les activités culturelles et sportives. Toujours est-il que le vide juridique qui nous pénalise ne nous permet guère de mieux faire».

Si dans certaines communes, des conseillers locaux ont ainsi pu se débrouiller pour mettre la main à la pâte, il n’en est pas de même pour d’autres, peut-être la majorité, qui, apprend-on, se sont heurtés à l’impossibilité de prendre la moindre décision. Selon des sources municipales concordantes, le torchon aurait même brûlé entre des membres de conseils locaux et l’administration municipale, d’un côté, et entre des CL et des administrations régionales, de l’autre, à cause justement dudit obstacle juridique. Un vrai imbroglio !

Au four et au moulin

Dès lors, le secrétaire général de chaque mairie est devenu l’homme à tout faire. Et tout doit passer par lui. Avec des pouvoirs qui n’ont jamais été aussi élargis, il est le maître à bord, chargé non seulement de la gestion des affaires courantes qui relevaient, par le passé, de la compétence du maire de la ville, mais aussi de la prise des décisions inhérentes aux questions administratives et financières et aux projets de développement dans les domaines de la propreté, de l’infrastructure, de la voirie, de l’environnement, de l’enfance, de la culture, du sport et des relations extérieures.

Hier responsable de second plan qui obéissait aux instructions de «monsieur le maire» et son équipe de conseillers municipaux qui pouvaient le virer à tout moment, le secrétaire général de la mairie est aujourd’hui seul aux commandes. Pas de supérieur hiérarchique direct que le gouverneur de la région.

Inévitablement, sa tâche colossale, comme toute action si centralisée, a fait des ratages dans plusieurs communes où des secrétaires généraux, sans doute débordés par l’énorme volume de travail qu’ils ont, ont été licenciés, pour dysfonctionnements et erreurs de gestion. Là situation à été telle que, face au nombre de plus en plus élevé de ces licenciements, le département de tutelle a dû recourir aux cadres de son administration centrale pour combler les postes vacants.

Élections municipales ?

Par ailleurs, trois autres zones d’ombre paralysent actuellement l’action municipale et méritent d’être tirées au clair. Primo, l’élaboration (pour certaines communes) et la révision (pour d’autres) du plan d’aménagement urbain. Un passage obligé sur la voie menant à la victoire dans la lutte contre le phénomène des constructions anarchiques. Hélas, plus de la moitié des communes, selon nos sources, ne l’ont pas fait, malgré les appels de la tutelle et du ministère de l’Equipement et de l’Habitat.

Secundo, les difficultés financières dont souffrent la plupart des mairies et qui sont consécutives à la modestie du budget annuel et au tarissement des recettes, continuent de les empêcher de lancer de nouveaux projets. Tertio, le fameux « Plan de développement et de gouvernance locale» est à l’arrêt.

Il faut débloquer la situation

Concocté il y a cinq ans par la Fédération tunisienne des présidents des municipalités, en partenariat avec des organismes étrangers, ce plan a pourtant connu un bon démarrage en faisant bénéficier pas moins de 272 communes de son appui. D’un coût de 1.537 MD (avec une rallonge de 476 MD), ce projet sera-t-il récupéré ou définitivement abandonné ?

Pour résumer la situation, il faut reconnaître que les conseils locaux, dans leur configuration actuelle, n’ont pu mettre en place les objectifs escomptés même au niveau de la gestion quotidienne, sans parler des projets et autres ambitions que cultivent les habitants de chaque cité qui espèrent l’amélioration de leur environnement direct.

Une question s’impose: seront-ils contraints de se cantonner à un rôle d’accompagnement des communes dans leurs projets de développement, sous la supervision des conseils des régions et des districts ?

Le cas échéant, un retour à l’ancienne formule des conseils municipaux deviendrait envisageable. «On semble y aller», soutient notre interlocuteur Maher Othman, membre du conseil local du Bardo, qui assure qu’il ne s’agit pas là d’une rumeur, mais bel et bien de la position exprimée par un grand nombre de ses collègues des différents conseils locaux du pays.

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