Tourisme tunisien : Sortir du piège de la quantité

Tout le monde en convient : sur le plan quantitatif, le tourisme tunisien arrive toujours à s’en sortir. Malheureusement, en termes de valeur, notre secteur est encore très loin du compte. Il n’arrive pas à traduire et à capitaliser tout son potentiel, pourtant important. Un paradoxe désolant qu’il faut soigner rapidement si l’on compte survivre à la concurrence. A ce stade, l’enjeu de la qualité serait décisif.
Le tourisme tunisien, en dépassant la barre de 10 millions de visiteurs en 2024, continue de garantir un apport considérable à l’économie tunisienne. On se demande toutefois si, avec toutes les transformations que connaît le marché international, notre secteur phare serait en mesure de se montrer toujours déterminant.
Difficile de trancher, mais la mission semble difficile. En effet, avec la dominance de cette offre de « masse », le tourisme tunisien, comme l’attestent toutes les analyses, est toujours incapable de capitaliser tout son potentiel et de maximiser ses performances, notamment en termes de valeur, ce qui explique des recettes en devises plutôt timides. Les statistiques parlent de 7,495 MD alors qu’au Maroc, à titre indicatif, la valeur touristique pour 2024 a dépassé les 33 MD (112 millions de dirhams) pour environ 17 millions de visiteurs.
Il faut reconnaître justement que, en dépit d’une nette volonté de changer, notre tourisme est encore incapable de se doter des outils nécessaires qui lui permettraient de rivaliser avec notamment nos concurrents directs, d’améliorer son niveau d’attractivité et de conforter, du coup, son positionnement à l’international.
Et c’est, de toute évidence, cette question de la qualité qui fait défaut et freine toujours la compétitivité du secteur, faute certainement de diversification, d’amélioration des services dispensés et de réagencement de notre environnement touristique global.
Une situation, critique qui suppose, et comme on l’a souvent soulevé sur ces mêmes colonnes, de la réinvention et de la régénération totales de notre produit, en misant, en priorité, sur l’authenticité, l’exclusivité et la richesse culturelle et patrimoniale.
Une formation à repenser
Une telle réinvention est tout à fait possible, surtout que le potentiel naturel de notre pays fonde l’ambition d’un saut qualitatif considérable. Il suffit seulement d’identifier la parade adéquate pour la valorisation de ce potentiel.
D’ailleurs, lors d’une rencontre tenue par la BAD en marge des réunions du Printemps de la Banque mondiale et du FMI pour l’année 2025, tous les experts africains ont donné toute sa mesure à la capitalisation du potentiel naturel et à la valorisation des richesses vertes locales pour la garantie d’une rentabilité économique globale et durable.
C’est dire donc que, contrairement aux années précédentes, la chasse à la qualité à travers la bonne exploitation de nos propres ressources naturelles n’est plus un choix mais plutôt une nécessité pour la survie de notre secteur touristique. Une orientation que confirme la Cheffe du gouvernement qui a rappelé, lors d’un Conseil ministériel restreint, tenu le 23 avril 2025, la nécessité de se conformer aux normes de qualité internationales, à travers la diversification de l’offre, l’amélioration des services et la garantie de l’attractivité des investissements.
Il s’agit d’assurer une offre alternative à forte valeur ajoutée, qui soit en mesure de répondre aux différentes tendances des donneurs d’ordre internationaux.
Dans ce tableau des exigences, l’écologique et le culturel s’affirment comme des niches prioritaires.
Il ne suffit toutefois pas de garantir cette offre, mais le plus dur serait, peut-être bien, de pouvoir la gérer et la commercialiser. Un enjeu qui repose, lui-même, sur le besoin d’un capital humain professionnel et qualifié.
On reconnaît, en effet, que malgré une longue expérience touristique et hôtelière, la qualification professionnelle reste, selon la majorité des observateurs, l’une des principales défaillances de notre secteur, faute de formation pointue, de spécialisation et même d’engagement sérieux. Une question fondamentale qui mérite d’être revue en profondeur. Reste que cette formation doit impliquer non seulement le personnel mais plutôt tous les acteurs du secteur : techniciens, commerciaux, gestionnaires…, et autres structures d’encadrement.
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