Reportages : les incendies ravagent Los Angeles et Hollywood, les habitants totalement sidérés
Reportages : les incendies ravagent Los Angeles et Hollywood, les habitants totalement sidrs
Des habitations réduites en cendres, des commerces en flammes, et au milieu de la dévastation, des habitants hagards : la ville d’Altadena, ravagée mercredi 8 janvier 2025 par un violent incendie en banlieue de Los Angeles, ressemble à une zone qui vient d’être bombardée.
« Ici, c’était notre maison », raconte à l’AFP William Gonzales, en désignant une ruine où il ne reste qu’un tas de braises et une cheminée.
« Nous avons pratiquement tout perdu », souffle ce quadragénaire derrière son masque noir. « Les flammes ont consumé tous nos rêves, après des années passées ici.»
Les abords de Los Angeles sont ravagés depuis mardi par plusieurs violents incendies, qui ont fait au moins cinq morts. Plus de 100.000 personnes ont dû fuir face aux flammes et des vents violents, avec des rafales jusqu’à 160 km/h, continuent d’attiser les flammes.
À Altadena, derrière les montagnes au nord de Los Angeles, les pompiers déployés semblent dépassés par l’ampleur des dégâts et le nombre de foyers à atteindre. Les rues sont remplies de flammes.
Désespéré, un commerçant sexagénaire pleure devant les ruines de sa boutique de spiritueux, qu’il tenait depuis 30 ans.
« Ce magasin, c’était toute ma vie », sanglote-t-il, avant de partager son choc lors d’un appel vidéo avec sa famille.
Dans le voisinage, Jesus Hernandez se demande si ses parents seront couverts, pour leur petite maison pavillonnaire « estimée à 1,3 million de dollars » (4,1 millions de dinars).
« J’espère que l’assurance pourra payer la plupart des frais, sinon nous devrons rester avec des amis ou quelqu’un d’autre », souffle ce jeune homme d’une vingtaine d’années.
Crédit photo : Robyn Beck / AFP
Eau coupée
Santa Monica, Altadena, la vallée de San Fernando : en l’espace de quelques heures, les incendies se sont multipliés à cause de la violence des rafales. Les braises parcourent parfois plusieurs kilomètres et plus de 1.500 bâtiments ont été détruits dans la région.
Les vents de Santa Ana qui soufflent actuellement sont un classique des automnes et des hivers californiens. Mais cette semaine, ils ont atteint une intensité jamais vue depuis 2011, selon les météorologistes.
Un véritable cauchemar pour les pompiers, condamnés à limiter les dégâts. En luttant contre le premier incendie, qui s’est déclaré mardi matin dans le quartier huppé de Pacific Palisades, ils ont vidé dans la nuit trois réservoirs alimentant les bornes incendies de la région.
De quoi rendre anxieux David Stewart, qui lutte toujours pour protéger sa maison.
« Le comté a coupé notre approvisionnement en eau, alors nous sommes sortis avec des pelles pour jeter de la terre sur les flammes », raconte ce quinquagénaire, encore tendu.
Derrière ses lunettes, il peine à reconnaître sa ville, recouverte d’une fumée qui racle la gorge et empêche de respirer correctement.
« Là c’était un petit magasin d’antiquités, une pizzeria », pointe-t-il. « Ces endroits sont là depuis toujours, depuis que je suis né. »
« Je vis dans cette région depuis plus de 20 ans et nous avons vu des incendies dans les montagnes et les collines, mais jamais rien de tel », soupire un voisin, Jesse Banks.
La lutte est loin d’être terminée. Les rafales doivent désormais faiblir, mais l’alerte aux vents forts doit rester en vigueur jusqu’à vendredi.
Au milieu de la catastrophe, les avertissements des scientifiques, qui rappellent régulièrement que la dépendance de l’humanité aux énergies fossiles aggrave la fréquence et l’intensité des événements extrêmes, se vit dans la chair.
« C’est probablement le changement climatique qui affecte tout. Je suis sûre que ça a ajouté à tout ça », regrette Debbie Collins, propriétaire d’un magasin de cadres.
Sa boutique est pour l’instant épargnée par les flammes, juste de l’autre côté de la rue. Face à l’urgence, cette retraitée est revenue sauver ce qu’elle peut.
« Le monde va vraiment mal et nous devons en faire plus », lâche-t-elle.
Crédit photo : Agustin Paullier / AFP
La situation est sans précédent à Santa Monica où résident toutes les stars de Hollywood
Ils n’en croient pas leurs yeux : sous un épais nuage de fumée noire bloquant le soleil, les habitants de la région de Los Angeles continuent d’évacuer mercredi matin face aux incendies qui menacent la ville, et peinent à réaliser l’ampleur de la catastrophe.
Au-dessus du canyon de Santa Monica, près de Pacific Palisades où le premier incendie s’est déclaré mardi, des dizaines personnes incrédules regardent les villas à plusieurs millions de dollars plongées dans l’obscurité.
Les rafales sont encore tellement fortes qu’elles font trembler les Tesla et Alfa Romeo du quartier, et la voiture de police qui ordonne au mégaphone de « quitter la zone immédiatement ».
« Il faut s’inquiéter des cendres dans les poumons. Il faut s’inquiéter pour sa vie avec ces bourrasques de 80 à 100 miles à l’heure », soit 130 à 160 km/h, lâche à l’AFP Sarahlee Stevens-Shippen, en sortant du ravin. « Nous sommes en mode panique. »
Cette retraitée de 69 ans vit ici depuis les années 70. Masque sur le nez, elle est retournée dans sa maison à l’aube pour récupérer quelques affaires, après avoir évacué la nuit précédente.
« Lorsque j’ai vu la lueur de l’incendie qui traversait la montagne hier vers 20 heures, j’ai décollé », confie-t-elle. Les flammes « avaient déjà sauté l’autoroute côtière à proximité et des palmiers prenaient feu ».
Pendant la nuit, deux autres incendies ont éclaté au nord de la ville, près de Pasadena et dans la vallée de San Fernando. Au moins deux personnes sont mortes, plusieurs dizaines de milliers ont dû fuir et les autorités avertissent que le pire n’est pas encore passé, car le vent doit encore s’aggraver.
« Cela a été un choc qui n’est pas encore passé, mais nous sommes en mode survie, alors nous prenons juste ce qui est nécessaire et nous sortons », reprend Mme Stevens-Shippen.
Crédit photo : Robyn Beck / AFP
Jamais vu
Chargé d’un gros sac plastique bleu rempli de vêtements, Martin Sansing émerge également du canyon par un escalier escarpé. Avec sa femme, ce producteur de télévision vient de fuir sa villa de quatre chambres.
Lorsqu’il l’a achetée pour 1,6 million de dollars (5,1 millions de dinars) il y a quinze ans, dans ce quartier en contrebas des montagnes surplombant Los Angeles, il se croyait à l’abri.
« Nous sommes dans une zone assez urbaine. Nous ne sommes pas sur une colline », explique le quinquagénaire, en toussant à cause de l’air âcre. « Je n’ai jamais imaginé que nous serions touchés. »
Chaque automne/hiver, la Californie est balayée par les vents de Santa Ana, chauds et secs. Pour les pompiers, ils représentent un cauchemar, car ils aggravent fortement le risque d’incendie.
Cette semaine, leur force a atteint une intensité jamais vue depuis 2011, selon les météorologistes. Une catastrophe qui tombe au pire moment : le sud de la Californie connaît un hiver très sec, après deux années anormalement pluvieuses. La végétation qui a repoussé offre ainsi beaucoup de combustible aux flammes.
« Il est difficile de ne pas penser que ça a un rapport avec ce qui se passe sur la planète », soupire M. Sansing. Avec le changement climatique, « ces phénomènes semblent de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses. »
Dans un centre d’hébergement à quelques kilomètres de là, Arlinda Henderson tente encore de réaliser ce qui lui arrive.
Cette habitante du quartier de Pacific Palisades vivait dans sa villa avec son mari depuis 1984. Depuis 40 ans, elle avait déjà vécu quelques évacuations, mais jamais rien d’aussi grave.
« Cette fois-ci, c’était différent, raconte cette retraitée. Le feu a dévalé la colline très rapidement à cause du vent. Je n’avais jamais rien vu de tel ».
L’ex-hôtesse de l’air a tout juste pris ses photos de famille et son chat, avant de fuir.
« Je pense que notre maison a disparu », soupire-t-elle, au milieu des lits picots où elle a passé la nuit. « J’ai essayé d’appeler la maison, et j’ai essayé quelques voisins, mais ça ne sonne pas. »
À 76 ans, elle craint désormais que son assurance refuse de la couvrir contre les incendies, si elle reconstruit dans le quartier.
« Je n’arrive pas à croire que Los Angeles soit entourée de feux de forêt, c’est vraiment impressionnant. »
Reportages de Romain FONSEGRIVES et Sébastien VUAGNAT – AFP –
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