Economie tunisie

Regard d’expert | Ali Khribi, Conseiller fiscal agréé par l’Etat et membre de la CNCFT, à La Presse : «L’institution d’un nouvel impôt n’a jamais été une solution»

 

Actuellement, les Tunisiens sont appelés à déclarer l’impôt sur la fortune au plus tard le 30 juin de chaque année selon un modèle établi par l’administration fiscale et bien évidemment la déclaration de l’impôt sur la fortune immobilière devra être déposée à la recette des finances et rattachée au lieu de résidence du contribuable.

Pouvez-vous nous donner d’amples éclaircissements sur l’impôt sur la fortune instauré dans la loi de finances 2023 ?

En Tunisie, l’impôt sur la fortune immobilière, appelé IFI tout court, a été introduit par le décret-loi n°79-2022 relatif à la loi de finances pour l’année 2023. L’Impôt sur la Fortune Immobilière est un impôt spécifique qui existe dans certains pays, notamment en France, et qui vise à taxer la valeur nette des biens immobiliers détenus par les personnes physiques à un taux de 0,5% au 1er janvier de chaque année.

A votre avis, pourquoi cette taxe a été instaurée et quels sont ses objectifs?

L’exposé des motifs de la loi de finances pour l’année 2023 s’est limité à évoquer, avec des mots génériques, le motif d’apparition de l’IFI, et se traduit par le renforcement de l’effort de solidarité dans le financement des dépenses publiques, la réalisation de l’égalité fiscale et la limitation de la fraude fiscale.

Il est évident qu’en raison de ses implications redistributives, l’impôt sur la fortune immobilière reste un terreau fertile pour ces principes idéologiques de solidarité et d’égalité, même si son rendement ou son efficacité économique est difficilement justifiables jusqu’à nos jours.

Et quels que soient les explications théoriques et les motifs hyperboliques qui lui sont associés, quiconque s’intéressant au sujet, sait que l’impôt sur la fortune résiste depuis des années à la réfutation et continue toujours d’alimenter toutes les polémiques morales, politiques, fiscales ou économiques dans une poignée de pays.

Quel est le champ d’application de l’impôt sur la fortune ?

Sur ce point, le texte est bien clair, l’IFI concerne les personnes physiques détenant des biens immobiliers dont la valeur commerciale réelle globale est supérieure ou égale à 3 millions de dinars, y compris les immeubles propriétés des enfants mineurs qui sont à leur charge, à partir du 1er janvier de chaque année et après déduction de la valeur des biens exonérés.

Est-ce que toutes les catégories de biens sont imposables ?

Absolument non ! L’impôt sur la fortune immobilière est applicable sur la totalité de la fortune provenant de biens immobiliers des personnes physiques (biens immeubles et droits réels fonciers), il faut signaler que les biens meubles et les valeurs mobilières ne sont pas concernés par l’IFI.

La loi a exclu de l’IFI : l’habitation principale, quelles que soient la valeur et la superficie ; les immeubles destinés à l’exploitation professionnelle à l’exception des immeubles loués au profit des tiers, sous condition que le bien figure au niveau des actifs du bilan du contribuable ; les terrains agricoles exploités directement sous réserve de déclarer les revenus y afférents ; et les terrains agricoles destinés aux grandes cultures et exploités directement.

Comment les Tunisiens peuvent-ils déclarer leur impôt sur la fortune ?

Actuellement les Tunisiens sont appelés à déclarer l’impôt sur la fortune au plus tard le 30 juin de chaque année selon un modèle établi par l’administration fiscale et bien évidemment la déclaration de l’impôt sur la fortune immobilière devra être déposée à la recette des finances et rattachée au lieu de résidence du contribuable.

Il est également possible de déclarer et de payer l’impôt sur la fortune immobilière par les moyens électroniques fiables.

D’une manière plus claire, la déclaration de l’impôt sur la fortune immobilière devra être déposée à la Recette des finances à laquelle est rattaché le lieu de résidence principale du contribuable. A défaut, au niveau de la Recette des finances du lieu de l’établissement principal du contribuable ou celle du lieu de l’immeuble ayant la valeur la plus élevée si le contribuable n’est pas résident en Tunisie.

Comment évaluez-vous la situation économique de la Tunisie aujourd’hui ?

Malgré le fait que la Tunisie a bénéficié du soutien de la communauté internationale, notamment à travers des prêts et des programmes d’assistance technique, pour soutenir ses réformes économiques et fiscales, notre pays fait face à la conjoncture économique la plus délicate de l’histoire tunisienne.

Malheureusement, les perspectives économiques restent confrontées à une forte incertitude et à des risques baissiers dans un contexte national et international caractérisé par les perturbations du secteur financier, l’instabilité politique, l’absence d’une réforme fiscale, le niveau élevé de l’inflation, les retombées des tensions géopolitiques entre la Russie et l’Ukraine, les séquelles de la crise du Covid-19 et l’absence quasi-totale de la volonté de bâtir, la volonté de créer la richesse, d’innover et de suivre le rythme mondial.

Actuellement, nous sommes en proie à une hémorragie financière et à de graves difficultés économiques et le pays peine à renflouer ses caisses et comme le dit le dicton italien, «aux grands maux les grands remèdes».

La situation actuelle exige impérativement des solutions radicales, des solutions profondes et l’institution d’un nouvel impôt n’a jamais été une solution pour faire remédier l’économie, surtout dans un environnement fiscal instable, avec autant de catégories d’impôt et de textes législatifs archaïques.

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