Mohsen Marzouk : un pays sans politique étrangère…

Mohsen Marzouk : un pays sans politique trangre…
L’homme politique Mohsen Marzouk a publié, dimanche 23 mars 2025, un long statut dans lequel il dresse un constat alarmant sur l’isolement croissant de la Tunisie sur la scène internationale. À travers une analyse détaillée de la politique étrangère actuelle, il dénonce une diplomatie en berne, marquée par un retrait progressif du pays des grandes instances internationales et une absence quasi totale d’initiatives stratégiques.
Cette prise de position intervient dans un contexte particulier : la divulgation de documents attestant du retrait de la Tunisie de la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples. Une correspondance du ministère des Affaires étrangères révélait en effet que les autorités tunisiennes ne reconnaissent plus les compétences de cette juridiction, privant ainsi les individus et les organisations de la possibilité d’y déposer des recours. Ce désengagement, perçu comme un nouvel épisode du repli diplomatique du pays, s’inscrit dans une tendance plus large de marginalisation sur la scène internationale, que M. Marzouk critique avec virulence.
Il déplore également une rupture avec les traditions diplomatiques du pays, autrefois ancré dans des alliances et des échanges stratégiques à travers le monde. Il décrit par ailleurs une Tunisie devenue « presque invisible », cloîtrée dans une posture défensive, et dénonce une présidence qui, en dehors de rares interactions diplomatiques, semble avoir renoncé à tout engagement actif à l’international.
Ainsi Mohsen Marzouk indique :
« Jamais, dans toute notre longue histoire, de Carthage à aujourd’hui, la Tunisie n’a connu un tel isolement volontaire sur la scène internationale. Nous sommes devenus une nation presque invisible, recluse, comme si nous avions choisi de tourner le dos au monde. C’est une situation sans précédent.
Le président de la République, à l’exception d’un message de condoléances adressé à l’Iran, d’un échange protocolaire avec la Chine et d’une visite en Algérie lors de leur fête nationale, s’abstient depuis longtemps de se rendre à l’étranger. Pourtant, ces déplacements sont essentiels, non seulement en tant que devoir de sa fonction, mais surtout pour défendre les intérêts économiques vitaux du pays. Quant aux délégations étrangères que nous recevons, elles se limitent, au mieux, à des ministres – l’Italie constituant une rare exception.
Notre continent, l’Afrique, qui représente aujourd’hui l’une des plus grandes zones d’opportunité économique au monde, est totalement négligé. La Tunisie n’y joue plus aucun rôle, alors qu’elle pourrait y construire des partenariats stratégiques durables.
Dans le monde arabe, notre influence est tout aussi effacée. Notre participation terne au dernier Sommet de la Ligue arabe en est une preuve supplémentaire.
En Europe, hormis nos relations avec l’Italie, réduites à la gestion de la question migratoire et à l’exportation de notre huile d’olive, nous sommes pratiquement absents. Pire encore, un procès de grande ampleur est en cours en Tunisie, où des citoyens sont accusés de comploter avec des États européens. Ce contexte contribue à détériorer encore davantage nos relations diplomatiques.
Quant aux États-Unis, à l’Amérique latine, à l’Inde ou à la Chine – en dehors d’une visite protocolaire sans résultats concrets – nos contacts sont au point mort. Il suffit de rappeler que le président chinois, lors d’un récent déplacement entre le Brésil et le Maroc, n’a même pas envisagé une escale en Tunisie. Un symbole de notre marginalisation.
Restent Mars et Elon Musk… Mais comme aucun projet de colonisation humaine n’y est encore prévu, on ne peut pas encore juger de nos liens avec la planète rouge.
Pendant ce temps, le rôle du ministère tunisien des Affaires étrangères semble se réduire à dénoncer les organisations internationales et à annoncer notre retrait de certaines d’entre elles, au lieu de renforcer notre présence et notre activité au sein de ces instances.
Comment le monde perçoit-il aujourd’hui la Tunisie ? Mieux vaut ne pas poser la question. Pourtant, l’histoire de la Tunisie, sa position géographique et la nature de son économie imposent une politique étrangère dynamique. Nos relations internationales devraient représenter la moitié de l’activité de l’État. Elles sont un levier essentiel de création de richesse. Depuis des millénaires, notre terre est un carrefour d’échanges, de commerce et de civilisation. Cela suppose évidemment une nouvelle vision, intégrée et ambitieuse. Or, aujourd’hui, cette vision n’existe tout simplement pas ».
S.H
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