Marché informel : Les bienfaits d’une formalisation progressive et ciblée

Entre un manque à gagner assez conséquent pour le budget de l’Etat et une marginalisation, de plus en plus élargie, du secteur formel, le marché parallèle continue à nuire sérieusement à l’économie nationale. Un constat qui nécessite une réaction rapide, car l’enjeu est trop important pour tolérer, encore, un tel «laisser aller ».
La Presse — Le choix, jusque-là réussi, de la Tunisie de miser, totalement sur le principe du compter-sur soi, pour la concrétisation des différents objectifs socioéconomiques du pays, a dicté, systématiquement, la mise en place d’une nouvelle approche financière capable de consolider, progressivement, les ressources propres de l’Etat.
Une approche qui tient compte, elle-même, de la bonne équation entre la gestion transparente et efficace des finances publiques et la diversification des sources de financement et de création de richesses. Une équation, somme toute, fondamentale, car son dysfonctionnement, tout au long des périodes précédentes a causé un véritable stress financier pour le budget de l’Etat.
En effet, la mauvaise gouvernance au niveau des biens publics, la corruption, l’inutilité, la déresponsabilisation et surtout l’évasion fiscale ont été très lourdes de conséquences financières. Et on peut dire que les résultats accomplis jusqu’à maintenant sont plutôt encourageants, mais, comme l’a réaffirmé, tout récemment, le Président de la République, lors de son entretien avec la cheffe du gouvernement, beaucoup reste à faire, notamment au niveau de l’appareil fiscal.
En effet, malgré les améliorations sensibles opérées, le niveau de fuite reste, malheureusement, élevé. Et c’est surtout le marché informel qui continue à tenir la dragée très haute, confirmant ainsi son statut de véritable couloir d’échange et de transit multimodal.
Selon les statistiques disponibles, même si on ne dispose toujours pas de données exhaustives et précises, les activités économiques au niveau du marché parallèle représenteraient environ 40 % du PIB, alors que les pertes fiscales seraient d’environ 5 milliards de dinars, selon l’Institut tunisien des études stratégiques, Ites. Certaines sources parlent même d’un montant beaucoup plus important. Un manque à gagner, donc trop élevé, surtout pour des finances publiques toujours fragiles.
Sensibilisation et responsabilisation
La situation est ainsi très critique et suppose des solutions urgentes et positives. Certes, il est difficile de réprimander totalement le marché parallèle, mais il est toujours possible de le soumette à un programme de formalisation progressive, ou du moins repenser intelligemment son organisation. C’est-à-dire agir avec prudence, car toute forte perturbation au niveau de ce marché pourrait être très lourde de conséquences socioéconomiques.
Et c’est justement cette nécessité qui justifie l’attention particulière accordée, depuis quelque temps, à la restructuration du marché parallèle, à travers notamment la multiplication des incitations économiques, l’assouplissement des procédures administratives et réglementaires et l’intensification des programmes de sensibilisation.
Il s’agit, d’une manière générale, d’une politique de responsabilisation pour associer le marché parallèle aux efforts de l’Etat et de mieux l’impliquer, ainsi, dans l’œuvre de développement national. Cette question est d’autant plus importante qu’en cas de bonne formalisation, les acteurs du marché parallèle seront, eux-mêmes, largement bénéficiaires.
Cela leur offre, en effet, la possibilité, comme le soulignent certains experts « la possibilité d’accéder aux crédits, aux marchés et aux investissements ». Autrement dit, l’opportunité, d’abord, de se développer, mais aussi et surtout de contribuer, d’une manière concrète, à l’élargissement du potentiel de croissance de l’économie nationale dans son ensemble et de lui apporter plus de certitude.
Partant, l’on estime que le programme d’aménagement d’espaces économiques collectifs au profit de cette catégorie de commerçants s’inscrit dans cette logique de formalisation du secteur informel.
On reconnaît, par conséquent, que la formalisation, notamment ciblée, est tout à fait possible. En effet, selon une note sur le secteur informel, élaborée dans le cadre du projet « savoir-éco », financé par l’UE, environ « 20.000 employeurs et 30.000 indépendants informels disposent de suffisamment de revenus pour réussir leur formalisation ». Il est donc question de vouloir faire.
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