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Londres veut envoyer les demandeurs d’asile au Rwanda

La Grande Bretagne va externaliser son immigration. Toute personne entrée illégalement sur le territoire britannique pourra désormais être envoyée au Rwanda.

Le Royaume-Uni fait face à une opposition massive après l’annonce de son projet d’envoyer au Rwanda les demandeurs d’asile arrivés illégalement sur son sol. « À partir d’aujourd’hui, toute personne entrant illégalement au Royaume-Uni ainsi que ceux qui sont arrivés illégalement depuis le 1er janvier pourront être relocalisés au Rwanda », a annoncé le Premier Ministre Boris Johnson dans un discours dans le Kent, au sud-est de l’Angleterre.

Le dirigeant conservateur avait promis de contrôler l’immigration, un des sujets clés de la campagne du Brexit. Mais le nombre de traversées illégales de la Manche a triplé en 2021, et Londres reproche régulièrement à Paris de ne pas en faire assez pour les empêcher.

En envoyant des demandeurs d’asile à plus de 6 000 kilomètres de Londres, le gouvernement veut décourager les candidats au départ vers le Royaume-Uni, toujours plus nombreux : 28 500 personnes ont tenté la traversée de la Manche en 2021, contre 8 466 en 2020, selon le ministère de l’Intérieur.

FORTE OPPOSITION

Le Rwanda pourra accueillir « des dizaines de milliers de personnes dans les années à venir », a ajouté le dirigeant conservateur, vantant ce pays d’Afrique de l’Est comme l’un des « plus sûrs au monde, mondialement reconnu pour son bilan d’accueil et d’intégration des migrants ».

Mais ce projet, susceptible de s’appliquer à tous les étrangers entrés illégalement en Grande Bretagne d’où qu’ils viennent, a suscité des réactions scandalisées et la « forte opposition » de l’ONU.

« Les personnes fuyant la guerre, les conflits et les persécutions méritent compassion et empathie » a rappelé Gillian Triggs, Haut Commissaire assistante du HCR en charge de la protection internationale. « Elles ne devraient pas être échangées comme des marchandises et transférées à l’étranger pour être traitées ».

Balazs Ujvri, porte-parole de Commission européenne, a souligné que « le traitement externe des demandes d’asile soulève des questions fondamentales concernant à la fois l’accès aux procédures d’asile et l’accès effectif à la protection, conformément aux exigences du droit international ».

« BILAN LAMENTABLE »

Amnesty International a critiqué « une idée scandaleusement mal conçue » et souligné le « bilan lamentable en matière de droits humains » du Rwanda tandis que Human Rights Watch avertit que le dispositif va « compliquer » le processus pour « les réfugiés syriens qui cherchent désespérément un endroit sûr ».

« Ils arriveront et s’attendront à être traités selon les valeurs fondamentales que le Royaume-Uni dit soutenir. Mais à la place, ils seront transférés » à des milliers de kilomètres, a dénoncé l’ONG.

Les associations soulignent également la différence dans le traitement réservé aux réfugiés en provenance d’Afrique et du Moyen Orient, et celui accordé aux réfugiés Ukrainiens, qui sont largement accueillis sur le sol britannique.

TENTATIVE DE DIVERSION

Désireux de regagner en popularité avant des élections locales le mois prochain, Boris Johnson et son gouvernement cherchent depuis des mois à conclure des accords avec des pays tiers où envoyer les migrants en attendant de traiter leur dossier.

« Notre compassion est peut-être infinie mais notre capacité à aider des gens ne l’est pas », a déclaré Boris Johnson, qui anticipe des recours en justice contre le dispositif.

L’opposition travailliste a également accusé Boris Johnson de vouloir détourner l’attention après le scandale du Partygate, qui lui a valu une amende pour avoir participé à une fête d’anniversaire en plein confinement.

Enfin, le coût de cette mesure est aussi fortement critiqué : Londres financera dans un premier temps le dispositif à hauteur de 120 millions de livres, soit 144 millions d’euros. Un budget qui serait largement sous-estimé selon les critiques.

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