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L'édito poignant de Kaouther Zantour

 

Sous d’autres cieux, un média qui ferme ses portes est un événement national. Les États font tout pour que cela n’arrive pas tant leurs dirigeants sont conscients de l’importance de la presse dans l’édification et la construction démocratiques. 

En Tunisie, la situation de la presse est calamiteuse depuis des années en raison de la crise économique, du Covid et de la situation politique. En raison aussi du business model basé exclusivement sur la publicité qui a bien atteint ses limites.

Dernier média victime en date, le journal Acharâa El Magharibi dont la directrice-fondatrice Kaouther Zantour a annoncé mardi 29 octobre 2024 dans un édito poignant le dernier numéro.

 

Mme Zantour évoque les différentes crises par lesquelles est passé son journal, ses dettes, les salaires impayés de ses journalistes depuis des mois ou encore le loyer impayé. Elle remercie les rares qui l’ont soutenu dans sa mésaventure, notamment l’homme d’affaires et mécène Moncef Sellami. Elle épingle surtout l’absence de tout soutien de l’État qui continue à inonder de publicité publique les journaux de caniveau et les journaux propagandistes et s’abstient de donner le moindre millimes aux médias qui respectent les normes de la profession et la déontologie.

Acharâa El Magharibi aurait eu 10% de l’argent que donne l’État quotidiennement à Echourouk ou à La Presse, il aurait été sauvé, ainsi que ses journalistes.

 

Sauf que l’État tunisien ne veut pas sauver les médias de qualité qui le critiquent ou qui défendent les valeurs démocratiques. Pourtant, il n’y a pas un pays démocratique au monde qui ne soutienne et ne subventionne les médias de qualité, car ce sont eux qui préservent la conscience collective et ce sont eux qui préservent la démocratie et défendent les libertés.

S’il ne les poursuit pas sur la base du décret 54, l’État tunisien laisse péricliter les médias de qualité jusqu’à leur mort.

 

Ce qui est arrivé aujourd’hui à Acharâa El Magharibi, reconnu pour sa grande qualité et son respect strict de la déontologie, peut arriver à d’autres demain.

Business News ne fait pas l’exception, malgré son déficit qui s’accumule d’une année à l’autre depuis quelques autres. Sans le soutien infaillible de ses actionnaires de référence Karim Guellaty et Nizar Bahloul, le journal aurait disparu. Il ne peut perdurer avec l’assèchement des revenus publicitaires, l’absence totale de subventions publiques et le retrait subit de la publicité des entreprises publiques (Tunisie Telecom, BH Bank, BNA) parfois contraire aux engagements contractuels fermes. À ces pressions financières, s’ajoute les pressions judiciaires.

Quelle que soit sa force, un journal ne peut pas résister à tant de pressions. 

Le cas d’Acharâa El Magharibi n’est pas unique. On ne compte plus les médias (de qualité ou pas) dont les journalistes ne sont pas payés depuis des mois. Le SNJT reçoit des missives presque quotidiennes.

Le dernier édito de Kaouther Zantour sonne comme un SOS pour toute la profession en Tunisie.

Sans médias libres et indépendants, respectant les normes de la profession, la Tunisie ne saurait construire une société juste, indépendante et consciente. C’est une évidence pour tous les pays développés et c’est pour cela que, dans ces pays-là, on fait tout pour soutenir la presse.

Que ces pays et ces médias semblent lointains de la Tunisie dont seuls les propagandistes et les exécrables du métier continuent à bénéficier du soutien de l’État !

 

Cliquer ici pour lire l’intégralité de l’édito de Kaouther Zantour.


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