Laffaire de complot en 21 actes, par Hichem Ajbouni
Dans une longue publication sur Facebook, le dirigeant d’Attayar, Hichem Ajbouni, démonte point par point l’absurdité de l’affaire dite du « complot contre la sûreté de l’État ». Il révèle comment cette instruction repose sur des accusations bancales, des témoignages douteux et des procédures surréalistes. Arrestations avant même l’existence de preuves, témoins au casier judiciaire chargé, noms ajoutés en dernière minute pour grossir artificiellement le dossier… Tout y est.
Voici son texte traduit de l’arabe dans son intégralité.
« Sitcom de la mascarade de l’affaire du complot
Voici quelques faits et actions sur lesquels le juge d’instruction Samir Zouabi s’est appuyé dans son ordonnance de clôture de l’instruction [parti se réfugier au Qatar depuis juillet 2024 après l’arrestation du directeur général de la police judiciaire et du bras droit de la ministre de la Justice, son conseiller et juge, qui ont supervisé la « fabrication » du dossier du complot] :
1-Hattab Slama, vendeur de véhicules, gare sa voiture devant la maison de Khayam Turki. Il ne connaît ni Khayam, ni la politique, et n’a jamais mis les pieds en Turquie. Résultat ? Accusé de complot et condamné à deux ans de prison ! [Faites bien attention à l’avenir où vous garez vos voitures, on pourrait vous accuser de comploter]
2- Ghazi Chaouachi et Ridha Belhaj sont beaux-frères, mariés à deux sœurs ! Ils voyagent ensemble en France, mais Ghazi rentre de Nantes après avoir rendu visite à son fils Elyes, tandis que Ridha revient de Paris après avoir vu son fils Marouane.
Le juge d’instruction considère que cela constitue une preuve de complot !
Donc, un conseil : si vous voyagez ensemble, rentrez toujours ensemble, sinon cela pourrait vous coûter cher !
3- Mustapha Kamel Nabli, gouverneur de la Banque centrale en 2011-2012, comploterait depuis cette époque contre Son Excellence et contre le gouvernement de Najla Bouden en 2023 ! [Dites « Macha’Allah »]
4- Il y a plusieurs années, Ghazi Chaouachi a acheté des cartes SIM [des puces] pour son épouse et ses enfants mineurs.
Le juge d’instruction considère que Ghazi lui a dissimulé ces numéros et ne les a pas déclarés, ce qui constitue une preuve supplémentaire de complot !
Si seulement il avait fait l’effort de demander ces numéros, il aurait eu Madame Sofia (épouse de Ghazi) et ses enfants Youssef et Sarah au téléphone lui disant : « Allô, qui est à l’appareil ? »
5- Le témoin XXX affirme qu’un de ses amis en Belgique lui a rapporté que son amie en Grande-Bretagne lui a dit qu’un complot se tramait en Tunisie !
Le juge d’instruction n’a ni cherché à connaître l’identité de l’ami en Belgique ni celle de l’amie en Grande-Bretagne, et encore moins pensé à les interroger directement !
Imaginez : les services de renseignement tunisiens n’ont rien détecté, mais l’amie de l’ami de XXX en Grande-Bretagne a tout découvert !
6- Najla Letaief, prétendue nièce de Kamel Letaief, n’a trouvé nulle part ailleurs que l’ambassade de Tunisie en Belgique pour se réunir avec certains comploteurs afin de mieux coordonner et planifier leurs actions !
Sauf qu’en fin de compte, Najla n’est pas sa nièce… n’est pas sa nièce… n’est pas sa nièce [avec la voix d’Abdelrazak Chabi] et n’existe même pas !
7- Selon la déclaration de l’informateur XXX, certains comploteurs se réunissent dans une maison à Gammarth appartenant à une certaine Salwa, surnommée « Tata » !
Le juge d’instruction n’a ni demandé son nom complet, ni vérifié son identité, ni cherché à l’entendre, ni même essayé de confirmer les dires de l’informateur sur ces réunions clandestines chez Tata ! [Il fonctionne à la confiance]
8- Un informateur patriotique et sincère a affirmé que Lazhar Akremi fait des allers-retours en Libye, ce qui constitue une preuve de complot !
Le juge d’instruction aurait pu demander aux services des frontières et découvrir que Lazhar Akremi n’a pas mis les pieds en Libye depuis 1979 ! [En principe, le témoignage d’un informateur menteur devrait être invalidé, mais il a été utilisé pour justifier l’accusation de complot]
9- L’informateur XX, incarcéré depuis 2017, a pourtant témoigné sur un complot qui aurait eu lieu… en 2023 ! [Ne partez pas avant d’avoir dit « Gloire à Dieu »]
10- Abdelhamid Jelassi voyage souvent en Turquie, ce qui, selon le juge d’instruction, renforce l’accusation de complot contre la sûreté de l’État !
Sauf que ce dernier a oublié que sa fille unique, Mariem, étudie en Turquie et qu’il est tout à fait naturel qu’il aille lui rendre visite, après avoir été privé d’elle pendant 17 ans sous le régime de Ben Ali !
11- Abdelhamid Jelassi a écrit des articles contre le coup d’État du 25 juillet 2021, ce qui, selon le juge d’instruction, est un acte de complot !
Il a également écrit un article sur l’Iran, ce qui a poussé une personne à lui envoyer un message pour le remercier et se présenter comme membre de l’Organisation des Moudjahidines du peuple, un groupe opposé au régime iranien et classé organisation terroriste !
Le juge d’instruction a alors considéré cela comme une collaboration avec une organisation terroriste !
12- Issam Chebbi et Nejib Chebbi échangent entre eux des liens d’articles et des informations sur la situation tunisienne, ce qui est qualifié d’actes de complot ! [Que Dieu nous vienne en aide]
13- Quand le juge d’instruction demande à Jaouhar Ben Mbarek s’il a rencontré des officiers américains, il répond non.
Mais on lui a traduit « two officers » par « deux officiers », alors qu’il avait en réalité rencontré une conseillère politique de l’ambassade des États-Unis, accompagnée de deux employées tunisiennes [une traductrice et une assistante politique] !
Petit détail : cette même conseillère politique avait tenté de convaincre Jaouhar Ben Mbarak de soutenir le coup d’État du 25 juillet 2021 ! [Ce qui réfute totalement l’accusation de collusion pour faire tomber le régime]
14- Un informateur affirme qu’un certain Rafik Chaabouni, trafiquant d’armes connu résidant en Europe, aurait été chargé par Kamel Letaief d’acheter des armes en Libye pour les utiliser lors du coup d’État.
Sauf que ce Rafik Chaabouni n’existe nulle part en Europe et personne ne le connaît ! [Un personnage fantôme]
15- Les déclarations de témoins XX et XXX, sur lesquelles repose l’accusation de complot, ainsi que le témoignage de Walid Ben Othman (qui est en prison pour faux témoignage, mais dont la déclaration a tout de même été prise en compte par le juge d’instruction !!!), ont été recueillies quelques jours après l’arrestation de Khayam Turki et Kamel Letaief !!!
Autrement dit, l’arrestation a eu lieu avant qu’on ne trouve des témoins pour témoigner contre eux !! [C’est une première dans l’histoire des affaires de complot]
16- C’est la première fois dans l’histoire des affaires de complot qu’un dossier n’est pas basé sur des rapports des services de renseignement, mais sur des témoignages de personnes qui n’ont rien vu et qui ont toutes un passé judiciaire douteux (faux, chèques sans provision, escroquerie, faux témoignages).
Et on sait bien que ces types de témoignages ne sont même pas pris en compte dans des affaires ordinaires, alors imaginez dans une affaire de complot contre la sûreté de l’État et de terrorisme, qui peut mener à la peine de mort !
17- Le témoin XXX, après avoir donné sa déclaration en février 2023, est revenu des mois plus tard pour ajouter quelques noms qu’il avait oubliés dans sa première déposition… et comme par hasard, ces noms appartiennent tous au mouvement Ennahdha !
[Témoignage à la carte, en plusieurs épisodes !]Ils se sont rendu compte qu’un dossier de complot sans dirigeants islamistes, c’était difficile à faire avaler à l’opinion publique.
Et le plus absurde, c’est qu’ils ont ajouté des cadres du premier et du deuxième rang du parti Ennahdha (Noureddine Bhiri, Sahbi Atig, Saïd Ferjani, Kamel et Mohamed Bedoui), mais ils ont épargné le président du parti, Rached Ghannouchi !! [Contrairement à ce que racontent les mercenaires médiatiques sur les plateaux et les réseaux sociaux].
18- Parmi les 40 accusés dans l’affaire du complot, beaucoup ne se connaissent même pas !
Ils ne se sont jamais rencontrés, ni de près ni de loin…
Mais par un miracle judiciaire, ils sont accusés d’avoir formé une organisation criminelle pour conspirer contre la sûreté de l’État !!
[BHL par exemple, ne connaît aucun des accusés, mais il a été ajouté dans le dossier pour le rendre plus « sérieux » !]
19- Le rapport de la Commission tunisienne des analyses financières (CTAF) n’a trouvé aucune trace de blanchiment d’argent ou de financement suspect lié aux accusés.
Mais le juge d’instruction, dans sa décision de clôture de l’enquête, a copié-collé la même phrase pour tous les accusés :
« Les accusés possèdent plusieurs comptes bancaires et effectuent des transactions financières intenses, non justifiées et suspectes. »
[Cela contredit complètement les conclusions de la CTAF !!!]
20️– À la dernière minute, trois nouveaux noms ont été ajoutés au dossier :
Nadia Akacha, ancienne cheffe du cabinet présidentiel,
Youssef Chahed, ancien chef du gouvernement,
Kamel Guizani, ancien directeur de la sûreté nationale au moment du coup d’État du 25 juillet. [Donc, lui, il a participé au coup d’État, puis il a décidé d’organiser un complot contre l’État !!!]
Tout le monde sait que ces trois personnes n’ont rien à voir avec Ghazi, Issam, Jaouhar, Khayam, Abdelhamid, Ridha et les autres accusés !
Leur ajout de dernière minute ne vise qu’à grossir le dossier, renforcer la fabrication de l’affaire et en même temps régler des comptes politiques.
21- À la page 223 du rapport d’analyse des téléphones des « conspirateurs », l’expert a écrit cette conclusion :
« Le contenu des réunions est inconnu, mais il semble qu’ils préparaient un dialogue national. »
Mais cette conclusion ne convenait pas à ceux qui fabriquent le dossier, alors ils l’ont supprimée de la décision de clôture de l’enquête…
Parce qu’elle prouvait qu’il n’y avait aucun complot dans le dossier du complot !!!
Ceci n’est qu’un échantillon de la médiocrité avec laquelle cette affaire de complot contre la sûreté de l’État a été fabriquée.
Cela explique pourquoi les autorités ont interdit d’en parler pendant deux ans, refusé la diffusion publique des procès et insisté pour les tenir à distance, sans la présence des accusés, détenus arbitrairement dans les prisons de l’isolement absolu.
Le sitcom de la farce du complot sera mis à jour régulièrement, à chaque nouvelle absurdité découverte ».
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