Ibrahim Debache, directeur général d’Ennakl Automobiles à La Presse: «Avec la guerre en Ukraine, plusieurs unités de production pourraient être transférées vers la Tunisie»

Le secteur automobile emploie plus de 28.000 personnes et génère plus de 3,5 milliards de dinars de revenus. En effet, sa contribution fiscale est estimée à plus de 2,2 milliards de dinars par an. Plus d’informations avec Ibrahim Debache, directeur général d’Ennakl Automobiles. Interview.
Pouvez-vous nous donner un petit aperçu sur votre parcours professionnel ?
Je suis le directeur général d’Ennakl Automobiles, je suis dirigeant de cette entreprise depuis 2007, je suis également président de la Chambre des concessionnaires et fabricants automobiles auprès de l’Utica. Par ailleurs, j’assure les fonctions de président de la Chambre tuniso-allemande de l’industrie et du commerce.
Quelle est la situation du secteur automobile en Tunisie ?
Le secteur de la distribution automobile est régi par des règles d’importation et de régulation avec des quotas qui sont répartis entre plus de 36 concessionnaires représentant pas moins de 56 marques. Il est constitué notamment d’une dizaine d’assembleurs (pick-up, bus, camions de moins de 3,5T Ptac et véhicules particuliers). Ce secteur emploie plus de 28.000 personnes, génère plus de 3,5 milliards de dinars de revenus et sa contribution fiscale est estimée à plus de 2,2 milliards de dinars par an. En 2021, 61.660 véhicules ont été immatriculés, dont 49.570 particuliers et 12 090 utilitaires, en progression de 24 % par rapport à 2020. Par ailleurs, sur le marché FCR, plus de 16.500 véhicules ont été ré-immatriculés.
L’industrie des composants automobiles a connu une progression depuis l’année 2000, et ce, au bénéfice des entreprises exportatrices. Est-ce que la pandémie de la Covid-19 a impacté négativement ce secteur ?
L’industrie des composants automobiles est représentée par 280 entreprises, dont 65% totalement exportatrices, emploie plus de 90.000 personnes et génère environ 7,5 milliards de dinars de revenus à l’exportation, en croissance moyenne annuelle de 10%. Le secteur de l’automobile dans le monde a connu un repli, et ce, suite à la crise sanitaire, en raison des périodes de confinement, mais également, de problèmes d’approvisionnement et de logistique, notamment en provenance de Chine. De plus, cette pandémie a engendré une volatilité des prix des matières premières ainsi que des surcoûts au niveau du fret maritime. Ces perturbations ont eu pour conséquence directe une pénurie de composants et notamment de semi-conducteurs, ainsi qu’un ralentissement des chaînes de production. L’effet immédiat a été une augmentation substantielle des prix à la vente. En revanche, la relocalisation des sources d’approvisionnement, décidée par plusieurs constructeurs automobiles, constituerait pour la Tunisie de nouvelles opportunités de production. Cette situation s’est aggravée avec le déclenchement, le 24 février dernier, de la guerre en Ukraine. Plusieurs unités de production pourraient être transférées vers des sites de production en Afrique du Nord et notamment vers la Tunisie.
Qu’est-ce qui a affecté le marché automobile tunisien ?
Suite aux difficultés d’approvisionnement, au cours du premier trimestre, nous avons constaté un recul des ventes de voitures neuves de l’ordre de 18% du marché comparé à 2021. Le deuxième trimestre s’est annoncé particulièrement difficile avec une révision à la baisse du nombre de véhicules destinés au marché tunisien.
Comment voyez-vous l’avenir du secteur automobile en Tunisie ? Et quel impact aura-t-il sur le marché de l’emploi ?
La transformation du modèle économique de l’industrie automobile à l’échelle mondiale, avec l’orientation de plus en plus prononcée vers la voiture électrique, la voiture autonome et le respect des nouvelles normes environnementales, laissent présager un développement potentiel et rapide de ce secteur. La Tunisie a les compétences et l’expérience pour répondre de façon compétitive aux nouveaux besoins des constructeurs.
Dans ce cadre, il y a lieu de noter que les développements mentionnés ci-dessus généreront des opportunités réelles en matière de recrutement de jeunes diplômés et ingénieurs spécialisés, notamment dans la mécatronique, l’intelligence artificielle et la production de software pour les véhicules à technologies embarquées. Aux industriels tunisiens de saisir ces opportunités et de confirmer le positionnement stratégique du site Tunisie en tant que plateforme de production pour l’industrie automobile.
Ya-t-il des programmes à l’avenir pour booster l’industrie automobile ?
Effectivement, nos partenaires institutionnels, notamment la Fipa, l’Apii, la TIA et les ministères de tutelle travaillent d’arrache-pied avec les industriels et acteurs du secteur pour la concrétisation de plusieurs projets d’extension dans le secteur.
Quelles sont les perspectives du secteur de l’automobile, lors de la conjoncture mondiale actuelle ?
Dans cette période de crise économique et de bouleversements géopolitiques qui ont affecté l’industrie automobile dans le monde, des transformations structurelles s’annoncent. Elles impliquent nécessairement une révision des modes et des technologies de production ainsi qu’une modernisation continue des formes de distribution et de commercialisation des produits et services dans le but de répondre efficacement aux besoins d’une mobilité durable et « friendly for the environment ». Il est attendu tout particulièrement un développement de la digitalisation des activités en rapport avec l’automobile.
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