Face aux lobbies de l’économie : Les PME s’écroulent !
Freiner le développement des PME revient à impacter la croissance économique et le marché de l’emploi. Le constat aujourd’hui est alarmant pour ces entreprises surendettées. Les décisions susceptibles de les sauver et leur éviter la disparition sont pourtant à la portée des décideurs. À quel niveau résident donc les obstacles et de quelles natures sont-elles ?
Avec un fond de roulement épuisé sous l’effet de la crise du Covid-19 , la guerre en Ukraine et d’un arsenal de textes juridiques qui va à l’encontre de leur expansion, leur expansion et leur développement, la majorité des petites et moyennes entreprises (PME) se trouvent aujourd’hui en situation de redressement judiciaire ou de liquidation pure et simple.
Une situation intenable
Les statistiques inhérentes à la situation financières des PME font froid dans le dos et n’ont nullement besoin d’une longue dissertation ou d’explication pour tirer la sonnette d’alarme, avec notamment, plus de 92% d’entre elles qui se trouvent actuellement en situation de faillite, selon les confirmations récentes relayées par le porte-parole de l’Association tunisienne des petites et moyennes entreprises Abderrazek Houas. Il ajoute que « 72,2% des PME sont en cessation d’activités ». Ceci dévoile la triste réalité des PME et les grandes difficultés financières dans lesquelles elles se sont enlisées.
Pour ce qui est des conséquences de l’endettement, la même source indique que « 90,3% des PME font l’objet de poursuites judiciaires pour l’émission de chèques sans provision et que 31,9% d’entre eux ont fait l’objet d’un redressement fiscal », d’où l’inéluctable recours aux prêts bancaires. « 58,9% des PME ont demandé des prêts bancaires et 60,5% d’entre elles ont dû attendre plus de 3 mois pour que leurs dossiers soient étudiés ».
Ce cri de détresse n’est pourtant pas nouveau. En effet, Abderrazek Houas a alerté en octobre 2021 sur cette difficile situation et a évoqué le calvaire des propriétaires des PME en évoquant la faillite de 130 mille entreprises, ce qui a condamné au chômage plus de 700 mille employés. À cet effet, Il avait pointé du doigt la « mains invisible » de certains lobbies. Dans le monde de l’économie, il semble bien que la concurrence dérange, ce qui explique l’attentisme qui caractérise la politique à l’égard de la situation actuelle des PME.
Ceci nous rappelle par ailleurs la position de Patrice Bergamini, ancien ambassadeur de l’Union européenne en Tunisie dans sa déclaration accordée au journal Le Monde le 19 juillet 2019. « Quand on parle de libre concurrence, loyale et transparente, c’est d’abord entre opérateurs tunisiens. Si l’on doit aider la transition économique, la forcer, la pousser, c’est parce qu’il y a des positions d’entente, de monopoles. Certains groupes familiaux n’ont pas intérêt à ce que de jeunes opérateurs tunisiens s’expriment et percent ». Une position qui a, à cette époque, déplu au chef du gouvernement en place. Toutefois, tous les maux (ou presque) du secteur des PME, résident dans la déclaration d’Abderrazek Houas et de Patrice Bergamini. Il existe en Tunisie bel et bien des lobbies qui accaparent l’économie du pays, endiguent l’essor de ce secteur et empêchent les petits entrepreneurs de percer.
Des mesures s’imposent de toute urgence
Contacté par La Presse pour nous éclairer encore plus sur la question, Abderrazek Houas nous explique que la situation perdure depuis 2011.
L’instabilité observée dans tous les secteurs du pays après cette date a profondément impacté tous les secteurs économiques du pays. La nouvelle loi se rapportant à la Banque centrale de Tunisie qui lui a conféré plus d’indépendance à l’égard de l’Etat avait en quelque sorte apporté le coup de grâce au secteur des PME en 2016. Les lobbies ont profité de cette perche tendue pour imposer encore plus leur diktat .Ils ont aujourd’hui une participation majoritaire dans les banques dont dépend la vie des PME et contrôlent ainsi l’économie du pays, selon lui. En 2021, a commencé la chute vertigineuse de ces entreprises qui se trouvent aujourd’hui sous la menace de la disparition.
Que faire alors devant ces lobbies, et comment se libérer de l’emprise infernale de l’endettement puisque la survie de 99,6% des PME dépend des banques selon une enquête effectuée par l’association sur un échantillon de 1500 entreprises. Abderrazek Houas nous fait savoir qu’il urge de dépénaliser la vie économique et assurer la pérennité et le développement des PME et créer un système de financement orienté vers les PME en raison de l’incapacité de la Banque Tunisienne de Solidarité et la Banque de Financement des Petites et Moyennes Entreprises d’assumer leur rôle en termes de financement et de soutien aux PME. Ce nouveau système doit être en mesure d’assurer la création, l’accompagnement et le suivi des PME.
La même source a préconisé une lutte efficace contre l’économie parallèle en instaurant de nouvelles lois, ainsi que la révision de la base des données au niveau des Recettes des Finances relevant du ministère des Finances puisqu’il semble que des personnes décédées ou en faillite sont toujours inscrites à cette base de données.
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