Catherine Cormier–Larose , poète et directrice du festival de poésie de Montréal à la Presse : « J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde »

Dans le cadre d’une tournée en Tunisie, menée à l’occasion de la parution de «Kaléidoscope», une anthologie de poésie québécoise, traduite en arabe, Catherine Cormier-Larose entretient ce dialogue entre deux cultures, deux nations, et s’adresse au monde à travers la poésie. Cette aventure littéraire est un foisonnement de mots qui magnifie l’époque, menée collectivement.
La Presse — «Kaléidoscope», votre anthologie de poésie, a été présentée à un large public à la librairie Al Kitab. Que pouvez-vous nous dire de plus sur cet ouvrage distingué de poésie ?
Dans le cadre du festival international de la poésie qui a eu lieu en avril 2024, il y a eu une présence québécoise importante. Poètes et poétesses ! On a tenu à ce que leur passage en Tunisie et leur participation demeurent. Que leur partage de la poésie reste ! C’est difficile de se lire à l’international et d’avoir accès à la poésie mondiale. En créant cette anthologie de 30 poètes et poétesses québécois, on les a traduits en langue arabe, ainsi les Tunisiens pouvaient les lire, nous permettant de les faire entrer dans une poésie québécoise qui dialogue avec la Tunisie, et en entretenant cette croyance en une poésie qui peut sauver le monde. Avec Moez Majed, le fondateur du festival, nous trouvons que la poésie peut être un vecteur de paix, qui rend accessible tout ce qui est inaccessible, qui partage des valeurs, crée une communion universelle, au-delà des différences. La poésie a été traduite par le Tunisien Ashref Kerkeni, révisée par Khalil Khalsi, les deux sont spécialistes en lettres. Moez Majed a assuré la direction littéraire du projet, en faisant attention à bien traduire les expressions québécoises.
Comment s’est passé ce processus de traduction poétique ?
A la base, on a travaillé avec une équipe qui croit profondément en une poésie traduite, en une poésie qui doit l’être et qui doit être faite par des poètes. Le poème est plus important que « le mot à mot » ou du mot juste. Ce sont des traductions créatives. L’écriture a une âme. On a traduit en gardant l’idée du poème en langue arabe. On écrit avec le cœur.
Parlez-nous de votre festival international de la poésie au Québec ?
Depuis quelques années, la direction du festival de la poésie de Montréal, qui est un festival uniquement dédié à la poésie, très local et annuel, essaie d’attirer des poètes de partout du Québec avec un aspect lié à la francophonie. Chaque année, on essaie de travailler, discuter et échanger avec des poètes de par le monde, de la Tunisie et du monde arabe. D’où notre connexion au festival international de la poésie de Sidi Bousaid. En Tunisie, on publie beaucoup en français, d’où ce rapport fluide qui s’est créé. On est en train de travailler sur une revue de 12 poètes tunisiens et tunisiennes, 6 arabophones et 6 francophones, qu’on veut avoir dans une revue spéciale. Emna Louzir a d’ailleurs été enregistrée. Il y a des choses de ce partage qui perdurent, créant ainsi des liens, en changeant les idées, afin de communier et de communiquer. On fait de la poésie un vecteur de changement.
Pour « Kaléidoscope », votre dernière anthologie, comment s’est faite la sélection des 32 poètes et poétesses ?
La sélection d’une anthologie est toujours un brise-cœur. Avec Nora Attala, j’ai codirigé la publication. C’est une poétesse québécoise et le travail s’est fait à deux. Elle voyage beaucoup partout dans le monde. C’est une poète qui sème la poésie québécoise partout. On a choisi des poètes très importants, qui écrivent et font œuvrer la poésie, qui la publient et la tissent, avec des poètes moins connus d’ailleurs. D’Ottawa, d’origine italienne, autochtone, du Guatemala. En mélangeant, on a créé ce « Kaléidoscope ». Les poétesses arabes retenues sont canadiennes avec des origines arabes. La poésie québécoise a mis beaucoup de temps à s’ouvrir sur le monde. Nous sommes la seule région francophone du Canada, et batailler pour notre patrimoine linguistique fut un combat. C’est tout un travail de générations. La peur de perdre notre langue est omniprésente. Nous vivons dans un monde avalé par le culture « américaine », des Etats-Unis spécifiquement. C’est l’époque ou jamais de se protéger contre cette culture mondialisée.
Quelle place a la poésie au 21e siècle, particulièrement en 2025 ?
Les gens souffrent beaucoup de nos jours. Sur le plan personnel mais aussi à cause de l’état de notre monde, des guerres qu’on n’a pas choisies de vivre, du capitalisme ambiant, de la violence inerrante. La poésie allège les maux. C’est une manière de rassembler, d’unir, de créer des communautés tout en étant rebelle et résistant. J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde. C’est une fenêtre qui permet d’entendre les voix des autres.
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